Bloomberg croit savoir que la Chine envisage de mettre fin aux limites des naissances qu’elle impose au nom du contrôle de la population depuis 40 ans, alors qu’un récent assouplissement ayant porté le nombre d’enfants autorisé d’un à deux en 2016 n’a pas donné les résultats escomptés. Confrontée à une crise du vieillissement de sa population et à d’autres effets pervers de cette politique tyrannique, la Chine est aux abois et s’apprêterait – peut-être ! – à rendre aux couples leur droit de procréer librement. Pour autant, rien n’est sûr encore et surtout, la Chine ne met pas fin à sa volonté de régenter les naissances, puisque rien ne permet de croire, même dans le meilleur des cas, qu’elle renoncera à dicter une politique de contrôle de la population.
Bloomberg cite des « personnes au fait de ces questions » pour annoncer que le Conseil d’Etat de la Chine a commandé une étude sur les répercussions d’une éventuelle levée de la politique de l’enfant unique décidée en 1980 et devenue politique des deux enfants en 2016. Ces personnes affirment que la libéralisation concernerait l’ensemble de la Chine mais il faut croire que c’est une affaire sensible puisqu’elles ont réclamé l’anonymat. L’objectif serait double : ralentir le vieillissement actuel et faire disparaître une source de critiques internationales, selon l’un des contacts du média.
Les choses pourraient même aller très vite avec l’institution d’une politique de la « fertilité indépendante » – comme c’est élégant ! – permettant le libre choix du nombre d’enfants dès le dernier trimestre de 2018 ou à défaut, l’an prochain, selon un autre proche du dossier cité par Bloomberg.
La fin de la politique des deux enfants en Chine ne réglerait pas les problèmes
« Il est déjà tard pour la Chine de lever la limitation des naissances, même si cela se fait cette année, mais c’est mieux que jamais » a déclaré Chen Jian, ancien responsable de la commission nationale du planning familial devenu vice-président de l’association chinoise de la réforme économique, cela ne s’invente pas. Mais il pense que cette abolition des limites « aura peu d’effet sur la tendance à la baisse des naissances en Chine ». Autrement dit, le mal est fait, et on pourrait ajouter qu’un gouvernement a beau jeu de se présenter comme favorable aux libertés lorsqu’une politique dictatoriale en a pour ainsi dire aboli l’exercice.
Cette Chine dont on dit si peu de mal dans les médias dominants peut maintenant être critiquée pour l’une des pires horreurs de l’histoire du monde. Bloomberg affirme : « Ce changement de politique mettrait fin à l’une des plus importantes expérimentations sociales de l’histoire de l’humanité, qui a laissé le pays confronté à une population qui vieillit rapidement et à un surplus de 30 millions d’hommes par rapport aux femmes. Ces politiques ont contraint des générations de parents chinois à payer des amendes, se soumettre à des avortements ou à élever des enfants dans l’ombre. »
Les amendes pour une femme seule qui tombe enceinte et veut garder son enfant peuvent atteindre 14 fois son revenu annuel, et on sait aussi que stérilisations et avortements forcés ont été utilisés pour mettre en œuvre cette politique de contrôle, qu’il s’agisse de la version ancienne ou de celle des deux enfants. La préférence marquée pour les garçons a entraîné un véritable génocide des enfants à naître de sexe féminin, de telle sorte que le surplus d’hommes qui atteint déjà près 34 millions, en réalité, annonce d’importants problèmes qui iront en s’aggravant : impossibilité pour ces jeunes de trouver une épouse, multiplication du nombre d’hommes dans la force de l’âge qui ne seront pas « stabilisés » par le mariage. Cocktail explosif.
Régenter les naissances : une constante depuis 1980 en Chine
Or même ce déséquilibre ne devrait pas être modifié par la nouvelle libéralisation potentielle. Déjà, le nombre de femmes en âge fertile est à la baisse, et la cherté de la vie fait que la plupart des Chinois ne veulent, voire ne peuvent envisager d’avoir plus d’un enfant. Raison de l’échec de la politique des deux enfants… Seuls 6,7 % des habitants éligibles de Pékin s’en sont prévalus. Raison, aussi, de la persistance des avortements sélectifs. Ceux-ci compris, la Chine compte 23 millions d’avortements par an. C’est à comparer avec les 17,23 millions de naissances enregistrées en 2017 en Chine continentale, en baisse de 3,5 % par rapport à l’année précédente.
Les Chinois sont peut-être nombreux à être « sortis de la pauvreté » comme on nous le répète à l’envi, mais pas de l’horrible pauvreté de la restriction des naissances et du rétrécissement des familles, avec à la clef des problèmes économiques – la Chine comptera bientôt un actif pour deux inactifs – mais aussi sociaux et humains, lorsque les vieillards vivront dans la solitude créée par les mesures inhumaines et anti-humaines prises par le pouvoir communiste. C’est en réalité une misère sans nom.
On propose, du côté du Conseil d’Etat de la Chine, de mettre en place des mesures plus favorables aux familles : aides fiscales, congé paternel et autres. On attend de voir – d’autant que la Chine prévoit d’énormes investissements dans ses capacités militaires et ses projets expansionnistes en Amérique latine ou en Afrique, sans parler de la Nouvelle route de la soie.
Reggie Littlejohn ne croit pas à la fin de la politique des deux enfants, ou du moins de ses dégâts
Pour Reggie Littlejohn, remarquable militante pour les droits des femmes et des fillettes chinoises face au génocide de l’avortement, la libéralisation annoncée risque fort d’être un leurre. Elle serait la première à se réjouir d’un changement pour le mieux, affirme-t-elle sur LifeSiteNews, mais si une étude a été mise en route rien n’assure que la loi sera adoptée. Elle souligne également une ambiguïté n’a pas encore été levée : s’agit-il simplement de permettre aux « familles » de s’agrandir, ou « d’autoriser » toutes les naissances. La chose est d’importance dans la mesure où actuellement une femme non mariée n’est jamais autorisée à avoir un enfant et que c’est dans cette situation qu’un grand nombre d’avortements forcés se produise, sans que l’on n’en connaisse la proportion sur la totalité des 23 millions avortement annuels. Dans certaines provinces, les mères célibataires s’en tirent avec une amende, dans d’autres, les autorités ont recours aux avortements forcés même très tardifs.
Tant qu’on n’aura pas mis fin à cette situation, tant qu’on n’aura pas aboli le système du hukou, le certificat légal qui seul permet l’accès à l’école, aux soins, au mariage, au voyage, et qui est refusé aux enfants nés illégalement, Reggie Littlejohn continuera de se battre. Elle ajoute qu’aujourd’hui en Chine, compte tenu du contexte économique, de nombreux couples choisissent d’avoir une petite famille, ce qui laisse présager de la poursuite des avortements sélectifs qui aujourd’hui menacent particulièrement les deuxièmes filles des ménages.
Et elle conclut : « Par conséquent, j’attends avant de célébrer la fin des avortements forcés et du génocide des filles en Chine. Lorsque ce jour arrivera vraiment, je me réjouirai de voir l’expérimentation sociale la plus désastreuse de l’histoire du monde jetée dans la poubelle de l’histoire, qui est sa place. »