Les chrétiens nord-coréens qui ont réussi à fuir la dictature paranoïaque qui sévit à Pyongyang témoignent de violations criminelles des droits de la personne contre quiconque professe la foi et se livre à des prières clandestines : passages à tabac répétés, viols, tortures. C’est le cas, après tant d’autres, du transfuge Choi Kwanghyuk, qui avait été arrêté pour avoir fondé une chapelle privée clandestine. Choi a réussi à s’évader d’un camp de travail alors qu’il anticipait un transfert prochain dans un camp de concentration où le régime aurait fini par le tuer. Le christianisme est pourtant une composante importante de la culture coréenne. La péninsule est le seul pays d’Asie qui se fût évangélisé de lui-même, à la fin du XVIIIe siècle.
« J’ai décidé de m’évader parce que je pensais qu’une fois envoyé dans l’autre camp, ils pourraient ensuite m’envoyer dans un camp de concentration ou me tuer », explique Choi dans un entretien à Fox News.
Choi Kwanghyuk témoigne d’un effrayant éventail de tortures contre les chrétiens
Aujourd’hui, Choi rapporte avoir été témoin d’un effrayant éventail de tortures. Des prisonniers peuvent être forcés, 24 heures durant, de se tenir debout sur leurs orteils dans des cuves remplies d’eau jusqu’à leur nez ; ils peuvent être dénudés et suspendus tête en bas pour être frappés ; ou se voir infligé la célèbre « torture du pigeon » dans laquelle les deux mains sont enchaînées à un mur à une hauteur de 60 centimètres, les forçant à rester accroupis des heures durant.
Des séances de passage à tabac sont infligées quotidiennement pour des infractions aussi banales que de ne pas s’être incliné assez rapidement devant un gardien. Les prisonniers sont aussi utilisés comme cibles pendant les entraînements d’arts martiaux. Les gardiens, témoigne encore Choi, violent régulièrement les détenues.
Le sadisme des petits fonctionnaires du régime est à l’image de la violence de cette dictature sanguinaire qui règne sur 25 millions de Coréens du Nord. La restriction d’alimentation est une autre façon pour le régime de torturer aussi bien ses prisonniers que ses citoyens libres.
Grace Jo se souvient de bébés « mourant sans le moindre secours » et de « soupes à la souris »
Une réfugiée identifiée sous le nom de Grace Jo, a confié à Fox News la semaine dernière qu’elle se souvenait de « bébés et de mamans mourant sans le moindre secours ». Deux de ses propres frères sont morts de faim et elle rapporte que les souris constituent une ressource vitale de nourriture. Sa grand-mère, se rappelle-t-elle, cuisinait de la soupe de souris quand la famille manquait de tout. Choi, lui aussi, rapporte que les souris et les rats sont une source de protéines pour pouvoir survivre.
Ces témoignages sont loin d’être uniques et malheureusement ils devraient se multiplier, alors que des études estiment que le nombre de chrétiens a tendance à augmenter au nord du 38e parallèle, frontière fixée entre les deux Corées à l’armistice du 27 juillet 1953. Le régime communiste et dynastique des Kim est officiellement athée et réprime toute manifestation de religiosité, sauf pour la vénération de son dictateur, actuellement Kim Jong-un.
La Corée, seul pays d’Asie qui se soit évangélisé seul avec Yi Byeok
Pourtant, avant la prise de pouvoir par les communistes, la Corée était marquée par une longue histoire chrétienne initiée par le jeune Coréen Yi Byeok, qui découvrit en 1770, à l’âge de 16 ans, un ouvrage de Matteo Ricci, jésuite italien né en 1552 et missionnaire en Chine. Réunissant plusieurs de ses amis, Yi Byeok devint ainsi le premier évangélisateur de la péninsule. Le premier baptisé fut un de ses compagnons, Yi Seung-hoon, en 1784. En 1785 le christianisme, qui se répandait rapidement, fut interdit dans le royaume et la même année Yi meurt de faim. Les martyrs furent légions. Cela n’empêcha pas la foi en Jésus-Christ de se répandre rapidement sur cette terre, Pyongyang étant même un temps surnommée la « Jérusalem asiatique ».
Aujourd’hui, l’ONG protestante Portes ouvertes estime que la Corée du Nord est le pays où les chrétiens sont le plus persécutés au monde, tout en estimant leur nombre à 400.000. Une autre ONG basée au Sud, Justice for North Korea, estime qu’un demi-million de Nord-Coréens pratiqueraient leur religion en secret. Le pasteur Jeong Peter, membre de cet organisme, rapporte que ces célébrations religieuses clandestines « sont limitées à des groupes de deux ou trois personnes qui lisent la Bible, prient et chantent ».
En 1942 la Corée comptait 2.000 églises, la majorité au nord
En 1942, la Corée comptait 2.000 églises, majoritairement presbytériennes et majoritairement situées au nord. Élément troublant, le fondateur de la Corée du Nord communiste, Kim Il-sung, se disait issu d’une famille protestante presbytérienne, avec un grand-père maternel qui était pasteur.
En raison de la clandestinité imposée à la pratique du culte, il est possible que les chiffres avancés aujourd’hui par les ONG soient sous-évalués. Cela pourrait signifier que le nombre de chrétiens a connu une hausse considérable depuis 2012, année où il était chiffré à 37.000 par le Département d’Etat américain. « Autrefois, on demandait aux gens de vénérer la famille Kim comme des dieux, mais aujourd’hui de nombreux Coréens du Nord ne respectent plus Kim Jong-un », avait confié un réfugié au quotidien londonien The Telegraph en juillet. Il ajoutait : « Cela signifie qu’ils cherchent autre chose pour soutenir leur foi ».