Une école secondaire britannique interdit un club chrétien au nom de la lutte contre l’extrémisme et le terrorisme

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Un club chrétien de lycéens qui s’était constitué dans une école secondaire britannique – anonyme – a dû plier bagages à la demande de la direction de l’établissement en application du programme « Prevent », qui fait partie de la « Stratégie anti-extrémiste » du gouvernement de David Cameron. Le Christian Union Club cherchait simplement à organiser des réunions de prières amicales pour les élèves en classes préparatoires pour l’entrée à l’université. Le programme « Prevent » vise spécifiquement les établissements d’éducation ; il a été mis en place pour « prévenir » la radicalisation et combattre « l’extrémisme » et le « terrorisme ».
 

La « Christian Union » interdite de réunion dans une école secondaire britannique

 
On voit mal en quoi une réunion de prières chrétienne pourrait déboucher sur une radicalisation, sur l’extrémisme et le terrorisme. Interpellé à la chambre des communes par l’élue conservatrice Fiona Bruce, le Premier ministre britannique a d’ailleurs affirmé qu’il s’agissait d’une interprétation abusive du programme de prévention, pour lui donner en raison d’avoir souligné qu’« une telle action n’avait jamais été l’objectif de la stratégie ». David Cameron a déclaré : « Evidemment, ce que dit mon amie est exact. (…) Elle souligne que le devoir de mettre en œuvre “Prevent” fait l’objet d’abus : je n’ai pas entendu parler de cet exemple précis, mais il est évidemment grotesque, et les gens doivent évidemment mettre en œuvre leur bon sens lorsqu’ils prennent ce type de décision, car clairement, ce n’est pas cela qui était visé. »
 
Affaire classée ? Ce serait aller un peu trop vite. En parlant d’interprétation abusive du texte, le Premier ministre passe à côté du problème. Lors de la mise en place de la « Stratégie anti-extrémiste » à l’automne dernier, il était évidemment beaucoup question de musulmans, hommes ou femmes, nés au Royaume-Uni et qui cherchait à rejoindre l’État islamique en Syrie. Mais comme – antiracisme oblige – on n’appelle pas l’islam et ses aspects totalitaires par leur nom, et peut-être aussi avec une idée derrière la tête, la Stratégie, avec son volet « Prevent », est rédigé en termes « vagues et larges » dénoncés à l’époque par diverses organisations chrétiennes.
 

Quel extrémisme, quel terrorisme reproche-t-on aux chrétiens ?

 
Deux associations de défense de la liberté religieuse des chrétiens, Christian Concern et le Christian Legal Centre, ont pris très au sérieux la mise à la porte du Christian Union Club, assurant que « ce n’est qu’un début » : « La liberté des chrétiens d’enseigner l’intégralité de la Bible sera menacée car certaine croyances seront déclarées “extrêmes” », font-ils observer.
 
Tout est question de définition en effet. Christian Concern faisait remarquer dès l’automne dernier que la philosophie sous-jacente à la stratégie anti-extrémiste comporte des failles intrinsèques, ce qui permet de prévoir une réelle menace pour l’enseignement du christianisme aux enfants y compris à « l’école du dimanche » (catéchisme ou cours d’enseignement religieux) ou pour les bénévoles chrétiens intervenant dans les hôpitaux.
 

La Stratégie anti-terroriste utilisée contre un club chrétien

 
« Certaines croyances chrétiennes (par exemple, quant à la nature unique de Jésus-Christ ou à l’éthique sexuelle) sont déjà considérés comme “extrêmes” et “haineuses” par certaines composantes de la société », note un dépliant de l’association. « En utilisant cette définition de la Stratégie, ce gouvernement (ou des gouvernements futurs) pourrait qualifier des croyances et des comportements chrétiens d’“extrêmes” et viser des chrétiens en utilisant les mesures prévues par la Stratégie. »
 
Il ne suffit pas de la qualifier de « grotesque » pour prévenir cette utilisation anti-chrétienne que rien n’interdit sur le papier. Dans la foulée du massacre d’Orlando, on peut en effet prévoir que l’enseignement moral chrétien sur les relations homosexuelles puisse être dénoncé et utilisé par les équipes dirigeantes des écoles britanniques pour museler les chrétiens. On prétend bien déjà qu’il a contribué à l’acte terrorisme d’Omar Mateen !
 
La Stratégie va d’ailleurs plus loin : elle met en place un système de vigilance spécifique pour les dernières classes des lycées et l’enseignement supérieur, et permet aux autorités de fermer des sites Internet, d’interdire l’accès à des lieux d’éducation ou de culte aux « extrémistes » présumés, ainsi que le passage sur toute antenne de radio ou de télévision, et d’interdire l’accès au territoire aux candidats à l’immigration et aux prêcheurs étrangers de toute confession après examen de leur dossier.
 

« Prevent », une stratégie anti-terroriste utilisable contre les chrétiens

 
Andrea Williams, représentant les deux groupes de défense chrétiens, souligne la vraie difficulté qui n’est pas prise en compte par la Stratégie : « L’approche du gouvernement est fondamentalement défectueuse parce que ce n’est pas l’“extrémisme” qui est le problème. Ce sont des idées, des croyances et des idéologies spécifiques qui sont le problème. »
 
Le syndicat majoritaire des enseignants britanniques, la National Union of Teachers, a condamné en mars le programme « Prevent », affirmant qu’il est inefficace et même contre-productif. Il estime que le recrutement de l’État islamique passe bien plus par les réseaux sociaux que par les écoles.
 
Le gouvernement britannique ne peut l’ignorer. Le choix d’un programme qui permet de s’en prendre directement à des institutions et des organismes de toute confession ne doit donc pas être considéré comme relevant du hasard.
 

Anne Dolhein

 
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