Travailler sur les minorités, c’est tout le programme du Parti… travailliste dont Jeremy Corbyn est le dirigeant et l’âme. Interrogé par Andrew Marr de la BBC, il a déclaré vouloir acheter des milliers d’appartements ou de maisons afin de régler le problème des sans-abri. Et puis, donner de nouveaux pouvoirs aux Conseils municipaux afin qu’ils puissent passer devant les investisseurs étrangers qui achètent, sur plan, de belles et neuves propriétés, en les laissant vides pendant des mois ou des années, en attente de profits immobiliers pour la revente – un joli programme très socialiste.
Jeremy Corbyn travaille bien sur les minorités – et pas seulement les sans-abri… Il a été accusé dernièrement de discrimination raciale par les conservateurs, parce qu’il faisait payer moins cher ses meetings aux militants BAME (Black, Asian and Ethnic Minorities). Idem pour les réfugiés qui ne sont pas « assez » sur le sol de l’Angleterre selon lui.
Corbyn et les sans-abri : acheter des logements est un objectif social et une priorité sociale
Pour Jeremy Corbyn, le pays a besoin de « priorités sociales » et c’est sur le marché du logement que les travaillistes interviendraient, le cas échéant, pour construire davantage de logements sociaux, garantir des locations à vie à un loyer sûr, favoriser les primo-accédants et garantir la régulation effective du secteur immobilier privé locatif pour tous.
Mais il porterait particulièrement cet effort sur les sans-abri, ceux qu’une récente étude a dénombré 4 751 en Angleterre, sur l’année 2017 – le chiffre le plus élevé des huit dernières années.
Dans une interview avec Andrew Marr de la BBC, il a concrétisé ses projets : « acheter tout de suite 8 000 propriétés à travers le pays pour donner un logement immédiat aux personnes actuellement sans domicile ». Avant d’avoir une adresse pour recevoir des prestations ou obtenir un emploi, il faut un toit pour dormir, a-t-il argué.
Haro sur les minorités : le temps du socialisme
Matériellement parlant, il chercherait à racheter des propriétés d’associations de logement quand elles deviendraient vacantes et à les remettre aux sans-abri au lieu de les rendre de nouveau disponibles en tant que « maisons abordables » (ces fameux logements qui ne doivent pas coûter plus de 80 % du loyer moyen du marché local). Pour compenser cette perte locative, il souhaite construire, chaque année, quelque 100 000 logements « vraiment abordables » pour la location et l’achat…
Quant aux appartements et maisons privés laissés et gardés vides, « nous donnerions aux autorités locales le pouvoir de reprendre délibérément les propriétés vacantes ». Selon lui, ce sont les sans-abri qui devraient recevoir ces appartements de luxe achetés par des investisseurs étrangers : « Il y a quelque chose de grossièrement insultant à l’idée que vous construisiez un immeuble de luxe … et que vous le gardiez délibérément vide sachant qu’avec l’inflation des prix de l’immobilier l’investisseur fera 10 ou 12 % par an »…
Le ministre d’État pour le logement, aussi, le travailliste John Healey, a stigmatisé le sujet en répétant que « le sans-abrisme nous fait honte à tous, mais devrait plutôt faire honte aux ministres conservateurs. C’est la conséquence directe des décisions prises par les conservateurs sur le logement et sur le financement des organismes de bienfaisance et des conseils. (…) Un gouvernement travailliste mettrait un terme à ce scandale national et fournirait à ceux qui en ont le plus besoin d’un chez-soi. »
Le catholique et pro-vie Jacob Rees-Mogg, deuxième favori au poste de Premier Ministre
Il est aisé de critiquer les dérives évidentes du capitalisme économique libéral. Il l’est encore plus de proposer des remèdes socialistes utopiques…
« Nous sommes retenus par une élite égoïste, qui ne se préoccupe que d’elle-même, de ses amis d’un système failli qui délivre une richesse stupéfiante en haut, tandis que de plus en plus de gens luttent pour simplement joindre les deux bouts » déclarait Corbyn, en ce début d’année.
Marxisant, il l’est de plus en plus. Quoiqu’il se présente toujours comme modéré, à l’instar de John McDonnell, l’actuel Chancelier de l’Echiquier de l’ombre, en charge donc du projet économique du parti travailliste : celui qui n’hésitait pas à se présenter comme marxiste, multiplie aujourd’hui les rencontres avec les responsables économiques britanniques, y compris ceux de la City, et se rend au forum de Davos, l’air de presque rien… Dialectique toujours.
D’aucuns voient maintenant Jeremy Corbyn à Downing Street, prêt à remplacer Theresa May dont les jours, dit la presse, sont comptés.
Mais il en est un autre qui le talonne, désormais : le catholique et pro-vie Jacob Rees-Mogg. Celui qu’on dit favori pour obtenir la direction du Parti conservateur est considéré aussi comme le deuxième favori pour le poste de Premier ministre, selon les bookmakers. Parce qu’il n’a rien demandé à personne. Et que son Brexit est vrai et entier, qu’il refuse la période de transition admise par le secrétaire du Brexit, David Davis. Jeremy Corbyn, lui, cultive son ambiguïté pour des raisons électoralistes…
Deux extrémités pourraient ainsi s’affronter – car tout ou presque les oppose. Une situation politique très symbolique : contre le socialisme de plus en plus rouge qui cherche à l’emporter, on va chercher à droite – vraiment à droite.