La Cour suprême défend les droits des administrés sur les réseaux sociaux

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La Cour suprême des Etats-Unis a jugé que les personnalités officielles publiques peuvent être poursuivies pour avoir « bloqué » des internautes pour cause de commentaires critiques. Cette décision unanime reconnaît que les membres de l’administration qui évoquent des sujets liés à leurs travail sur les réseaux sociaux, même sur leurs comptes personnels, sont susceptibles de violer les droits constitutionnels des administrés en leur refusant l’accès à leur fil de messages, voire en effaçant leurs remarques. Par les temps qui courent, c’est une belle reconnaissance de la responsabilité des personnalités publiques vis-à-vis de leur travail et vis-à-vis du public qui en porte les conséquences…

Deux cas avaient été soumis à la Cour suprême, et ils ont été résolus de manière dissemblable mais en s’appuyant sur les mêmes principes : le droit des administrés d’avoir accès aux informations relatives au travail des détenteurs des comptes.

 

La Cour suprême affirme les devoirs des personnalités publiques sur les réseaux sociaux

Le premier concernait deux membres élus d’une commission scolaire en Californie qui avant bloqué l’accès de plusieurs parents à leurs comptes Facebook et Twitter, au motif que ceux-ci avaient mis en ligne des commentaires critiques. La Cour a validé une décision d’appel fédéral affirment que les dits élus avaient violé le droit de liberté d’expression des parents.

La deuxième affaire opposait James Freed, un directeur des services municipaux de Port Huron (Michigan), qui avait bloqué un habitant de la ville, Kevin Lindke, non sans effacer les critiques de ce dernier à l’égard de la politique covid de la ville. Freed a eu beau arguer que son compte était personnel, et qu’il l’avait ouvert bien avant de devenir une personnalité officielle, le réservant la plupart du temps à des affaires familiales, le juge Amy Coney Barrett a observé dans une explication de 15 pages que les comptes personnels des personnalités officielles ont souvent un caractère « ambigu » parce qu’elles y font paraître des informations officielles au milieu de contenus plus privés. Si le compte était purement privé, Freed aurait le droit de bloquer ses lecteurs comme bon lui semblait ; dans le cas contraire, Lindke était en droit de s’en plaindre.

La deuxième affaire a été renvoyée devant une cour d’appel fédérale, étant donné que Freed avait gagné à ce niveau.

 

Les personnalités publiques aux Etats-Unis ne peuvent bloquer les commentaires critiques sur les réseaux sociaux

Lindke s’est félicité de la décision, assurant qu’elle établit que « les personnalités officielles ne peuvent pas se cacher derrière leurs comptes de réseaux sociaux personnels dès lors qu’elles évoquent des affaires officielles ». La décision est allée contre celle favorisée par les représentants de l’administration Biden.

Ces deux affaires peuvent sembler anecdotiques mais elles pèsent de tout leur poids en une époque où la liberté de critiquer un certain nombre de décisions publiques et gouvernementales rétrécit, et pas seulement aux Etats-Unis. La Cour suprême est d’ailleurs saisie de deux autres affaires relatives au contrôle des réseaux sociaux par les autorités publiques : une première, déjà plaidée, conteste des lois de Floride et du Texas qui visent à réguler les grosses sociétés de réseaux sociaux, et une audience concernant la possible violation du Premier amendement sur la liberté d’expression par la pression sur les responsables des réseaux sociaux en vue de leur faire effacer des contenus jugés faux ou trompeurs par les autorités publiques.

Les décisions dans ces affaires devraient être rendues d’ici à l’été et sont susceptibles d’opposer un frein à la surveillance et à la maîtrise des contenus en ligne de la part de « Big Brother ».

 

Anne Dolhein