Crime d’opinion : arrêté pour avoir prié en silence dans la rue, contre l’avortement

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Il était debout sur un trottoir de la voie publique. Sans rien dire, sans rien faire. Sebastian Vaughan-Spruce, 44 ans, a pourtant été verbalisé, outre-Manche, dans une rue de Birmingham. Le motif : il était dans « une zone tampon » définie autour de la clinique d’avortement et… il devait sûrement prier dans sa tête. Nous ne sommes même plus dans un déni de la liberté d’expression, nous avons atteint, et c’est une grande tristesse, le délit de pensée, le crime d’opinion.

Ce n’est pas la première fois depuis la création, en 2022, de ces zones dites tampons au Royaume-Uni que des personnes sont arrêtées alors qu’elles s’y tiennent pacifiquement. Mais, à chaque fois, rien ne peut leur être reproché si ce n’est de penser différemment ou de prier silencieusement pour autrui. L’Etat se débat donc un peu avec lui-même, les juges contredisant in fine les policiers… Beaucoup soulèvent le danger fondamental de cette pente glissante vers un totalitarisme intrusif avéré.

 

Respecter les normes internationales sur la liberté d’expression et de pensée

S’il avait été assis par terre, à fumer du shit, les deux policiers ne se seraient certainement pas approchés. Mais Sebastian Vaughan-Spruce, trop propre sur lui, devait sûrement être suspect. Et même s’il a déclaré qu’il ne priait pas et qu’il se tenait simplement silencieusement dans la rue, on lui a néanmoins demandé de partir parce qu’il était dans cette zone fameuse tampon. Le tout finissant par une amende…

La police locale de Birmingham lui a déclaré que, même sans manifester explicitement, « la présence continue sur les lieux constitue une violation de l’ordre » : « Si l’individu persiste, le conseil émettra un avertissement en première instance, mais si cela ne le dissuade pas, des poursuites seront engagées, soit par une amende forfaitaire, soit par une convocation au tribunal. »

Mais la présence de qui ? D’un toxico ? D’un mendiant ? D’un violent activiste ? Non. La présence de quelqu’un qui a une opinion opposée au projet défendu par une clinique d’avortement. « J’ai été mis à l’écart en raison de mes convictions », a déclaré M. Vaughan-Spruce dans The Telegraph.

 

Censurer la prière silencieuse dans la rue ?

Tout le problème vient de la nature de ces fameuses « zones tampons » vouées à être déployées dans tout le pays. L’ordonnance de protection des espaces publics (PSPO), en vigueur depuis novembre 2022, criminalise désormais les personnes « se livrant à tout acte d’approbation ou de désapprobation ou tentative d’acte d’approbation ou de désapprobation » de l’avortement dans les rues à proximité d’un centre (comme si l’approbation allait être poursuivie…).

Le projet de directives publié par le ministère de l’Intérieur en décembre précisait initialement que ces zones n’interdiraient pas la prière silencieuse, ni les conversations consensuelles entre adultes au sein de la zone : « La police ne devrait pas cibler ceux qu’elle croit avoir des opinions pro-vie. Cela peut constituer une discrimination illégale fondée sur la religion. » Mais ces éléments ont été, par la suite, censurés.

D’autres en ont déjà fait les frais comme Isabel Vaughan-Spruce qui a été arrêtée à deux reprises en 2023, toujours à Birmingham, pour avoir prié en silence : elle a été accusée de « protestation et d’acte d’intimidation à l’égard des utilisatrices des services », alors que le centre d’avortement était fermé (!) et qu’elle avait bien indiqué ne pas être là pour protester. Elle a donc bien été arrêtée pour des opinions personnelles non affichées.

Un prêtre catholique, le père Sean Gough, a également été inculpé pour avoir tenu une pancarte dans une zone tampon avec ces mots : « Je prie pour la liberté d’expression. » Deux autres individus – Adam Smith-Connor et Livia Tossici-Bolt – seront jugés plus tard cette année après avoir tous deux été accusés d’avoir violé des « zones tampons » à différentes occasions à Bournemouth, en portant notamment une pancarte : « Je suis là pour parler, si vous le souhaitez. »

 

Le premier « crime d’opinion » dans la loi britannique cible l’avortement

Des députés scandalisés ont appelé le ministère de l’Intérieur à protéger les conversations consensuelles et la prière silencieuse dans les « zones tampons », comme nous l’a appris The Alliance Defending Freedom UK. Et ont dénoncé le « deux poids, deux mesures » qui faisait respecter des opinions absolument répréhensibles lors de manifestations pro-palestiniennes ou de marches haineuses appelant au djihad et condamner des prières silencieuses absolument pacifistes, au nom de la même liberté d’expression.

« Le tout sous un gouvernement conservateur » ! « Honteux et embarrassant » ! Il y a « des normes internationales à respecter » !

Comment s’étonner de la réaction de la Commission américaine sur la liberté religieuse internationale (USCIRF), qui a fustigé ce débordement dans son dernier rapport : des gouvernements européens ont « ciblé des individus en raison de leur expression religieuse pacifique ». Elle fait figurer l’arrestation d’Isabel Vaughan-Spruce dans sa liste annuelle des violations de la liberté religieuse dans le monde, lit-on dans dans The Telegraph. « Une honte mondiale » pour le Royaume-Uni dont s’est félicitée la victime.

Le porte-parole de The Alliance Defending Freedom UK en Ecosse a déclaré : « Le projet de loi écossais sur la zone tampon est l’une des mesures de répression les plus étendues contre la pensée et le discours pro-vie qu’il nous ait été donné de voir. Tel qu’il est rédigé, le texte pourrait même interdire la prière et les discours pacifiques en faveur de la vie au sein des foyers s’ils sont situés suffisamment à proximité d’un centre d’avortement. La proposition permettrait également aux autorités locales d’étendre de manière illimitée la distance de 150 m de la zone tampon. »

On peut se rassurer sur le fait que les deux à avoir été jugés, Isabel Vaughan-Spruce et le père Sean Gough, ont été entièrement acquittés de toutes les charges retenues contre eux – forcément, la justice peine à se justifier. Seulement, on ne crée pas une loi pour rien : il y aura de quoi faire. Et si le premier crime de pensée introduit dans la loi britannique concerne la défense de la vie, c’est tout un symbole. Aux Etats-Unis, souffle le même vent inquiétant de répression.

Pendant ce temps au Vatican, on préfère, à la défense des prières silencieuses des pro-vie, les harangues sonores des progressistes woke : c’est au gouverneur du Massachusetts, Maura Healy, une lesbienne en couple, pro-avortement qui soutient les « changements de sexe » des enfants, que le Saint-Siège a demandé de prononcer le discours d’ouverture, lors de son Sommet sur le climat. Là aussi, deux poids, deux mesures…

 

Clémentine Jallais