A Cuenca, la capitale de l’Azuay qui compte environ 350.000 habitants, la vague migratoire vient du Nord et elle concerne principalement des retraités arrivant des Etats-Unis. Le Miami Herald parle de près 10.000 immigrés, pour la plupart originaires du Texas et de Floride, mais ce chiffre date du dernier recensement réalisé en 2010. Or, alors que cette population d’étrangers avait déjà quasiment triplé entre 2000 et 2010, la véritable vague migratoire a commencé en 2009, avec la publication d’un article dans International Living vantant la ville de Cuenca comme un des meilleurs endroits au monde pour passer sa retraite. Une vague concernant les enfants du baby-boom aux Etats-Unis qui, arrivés à l’âge de la retraite, choisissent de bénéficier d’un coût de la vie moins cher que chez eux et aussi de l’Etat-providence mis en place par les gouvernements équatoriens successifs pour leurs propres citoyens : des services de santé de qualité et des transports en commun subventionnés pour les retraités, avec en sus un cadre de vie agréable et des fruits et légumes frais toute l’année.
Nombre de retraités américains veulent émigrer à la recherche d’une meilleure qualité de vie mais s’intègrent mal dans leur pays d’accueil
Cet afflux migratoire n’est cependant pas sans poser certains problèmes ni sans engendrer des ressentiments dans la population locale. Et ces problèmes pourraient bien s’amplifier, puisqu’à ce jour 4 % des 78 millions de personnes que compte la population issue du baby-boom d’après-guerre aux Etats-Unis ont l’intention de vivre leur retraite à l’étranger. En ce qui concerne Cuenca, une étude réalisée par la municipalité montre que nombre de ces immigrés du troisième âge ne semblent toutefois pas intéressés par la langue et la culture locales. Plutôt que d’apprendre l’espagnol, ils recherchent des services en anglais et importent des Etats-Unis leur propension à menacer un peu trop facilement les gens de procès en justice.
L’immigration américaine à Cuenca est source de hausses de prix difficilement soutenables pour les personnes nées en Équateur
A l’opposé de ces seniors, 65 % des natifs de Cuenca ont moins de 35 ans et ils n’apprécient pas toujours d’avoir à payer des taxes et impôts pour financer un Etat-providence dont profitent ensuite des retraités étrangers. Un autre problème, c’est que l’afflux d’immigrés en moyenne plus riches que les locaux provoque automatiquement une augmentation des prix, y compris dans l’immobilier où les logements, notamment à proximité du centre historique prisé par les étrangers, deviennent hors de portée des Équatoriens tant à l’achat qu’à la location.
Si l’arrivée d’immigrants originaires des pays riches de l’hémisphère nord semblait au début plutôt flatter les autorités locales, le maire de Cuenca avait, dès 2013, fait part des difficultés pour les Equatoriens liées aux hausses de prix. Deux ans plus tard, un membre du gouvernement de l’Equateur s’inquiétait de la création de « ghettos » de riches Américains risquant de changer le caractère de Cuenca. D’après la directrice des relations internationales de la ville, citée par le Miami Herald, la municipalité n’a jamais cherché à attirer les retraités étrangers et « les Cuencanos se sentent comme des étrangers dans leur propre ville ».
Des habitants qui râlent contre l’arrivée d’un nombre excessif d’immigrants peu enclins à s’intégrer mais attirés par le niveau de vie et les prestations sociales ? Va-t-on traiter ces Cuencanos de dangereux xénophobes ?