Essence : le gouvernement veut déjà prendre des mesures d’exception

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Certes, le mouvement social contre le projet de loi sur le travail se durcit. Certes, la tension se fait chaque jour plus palpable, notamment aux abords de certaines stations essence. Certes, il faut parfois savoir se montrer patient (ou aller plus loin, ce qui revient au même) pour arriver à faire un plein – ou au moins une partie de plein. De là à parler d’une possible paralysie du pays, il y a tout de même un pas que le gouvernement, qui se veut intransigeant en recourant à des mesures exceptionnelles comme quelques ponctions dans les réserves stratégiques de carburant et certaines interventions musclées pour débloquer des dépôts, prétend franchir. Sans réelle surprise, l’exception, avec l’état d’urgence permanent, et le recours quasi systématique au 49-3, lui étant manifestement devenue une seconde nature.
 

Essence : le gouvernement roule des mécaniques

 
« La CGT ne fait pas la loi dans le pays. » Mercredi, à l’Assemblée nationale, Manuel Valls a voulu assurer à la représentation nationale qu’il demeurait maître du jeu, et que les blocages organisés par la centrale syndicale pour protester contre le projet de loi n’auraient donc pas d’impact au long terme, tandis que le projet de loi, assurait-il, ne serait pas retiré.
 
Pour sa part, François Hollande a assuré lors du conseil des ministres que tout serait mis en œuvre pour assurer l’approvisionnement des Français, en essence et autres denrées pouvant être touchées par les grèves, selon ce qu’a rapporté le porte-parole du gouvernement, Stéphane Le Foll.
 
L’Etat a déjà ainsi débloqué onze dépôts pétroliers paralysés par des manifestants. Ainsi, à l’aube, les forces de l’ordre sont-elles intervenues à Douchy-les-Mines, dans le Nord.
 
Parmi les autres mesures, les transporteurs ont été autorisés à déroger temporairement aux règles en matière de temps de conduite et de repos pour faciliter l’approvisionnement des stations-service.
 
Enfin, les autorités ont utilisé trois jours de stocks stratégiques de produits pétroliers, sur les 115 disponibles.
 

On nous annonce – déjà ! – des mesures d’exception

 
Une fois encore, le gouvernement, dont on a déjà dénoncé ici le caractère révolutionnaire d’une politique bradant notre patrimoine économique et entrepreneurial, prétend jouer à la fois les gros bras et les sauveurs face à une situation qu’il a lui-même créée.
 
Mais, même sur ce point, l’équipe de Manuel Valls semble s’avancer beaucoup. Car, à moins de supposer que toute l’affaire ait été montée, en réalité, avec les centrales syndicales, celles-ci, CGT et FO en tête, entendent bien durcir leur mouvement de grèves et de manifestations, et toucher notamment de nouveaux secteurs d’activités où elles sont assez représentées. On parle désormais d’un nouveau blocage énergétique au niveau des centrales nucléaires.
 
Par ailleurs, les transporteurs pourraient, eux aussi, être touchés à terme, ce qui rendrait caduques les mesures d’assouplissement prises à leur propos pour tenter de débloquer la situation.
 
Enfin, on ne comprend pas bien certaines mesures, façon gribouille, prises par les autorités. Notamment en ce qui concerne les stocks stratégiques.
 
D’abord, parce qu’il va de soi que ces stocks stratégiques ne sont pas là pour pallier les problèmes particuliers d’approvisionnement en essence, et qu’en agissant ainsi, on finirait, au bout du compte, par créer d’autres problèmes, peut-être plus importants, par simple souci démagogique.
 

Contradictions ou poudre aux yeux ?

 
Ensuite, parce qu’il n’est pas logique de toucher aux stocks stratégiques lorsque l’on prétend avoir débloqué un certain nombre de dépôts pétroliers. Il est vrai que, dans le même temps, les raffineries, dans leur majorité, sont toujours sous la coupe des grévistes.
 
Enfin, et peut-être surtout, il est pour le moins contradictoire de jouer d’un côté les gros bras quand, de l’autre, on débloque des stocks stratégiques après moins d’une semaine de blocage. Ce n’est pas franchement dans un temps aussi court que l’on donne l’assurance de sa détermination.
 
Il est vrai que, à propos de celle-ci, on peut aussi s’interroger sur les mâles paroles du matamore Valls qui prétend que le projet de loi El Khomri ne sera pas touché, repoussé, ni supprimé, sur le même ton où il assurait, il n’y a guère, qu’il ne changerait rien des propositions affichées dans sa première mouture…
 
On comprend qu’une assurance en peau de lapin comme celle-ci n’impressionne personne, et surtout pas les syndicats de grévistes.
 

François le Luc