« I have a dream »… pas pour tout le monde visiblement. Selon une nouvelle étude américaine, le pourcentage de jeunes enfants et d’adolescents hospitalisés pour des pensées ou des actions suicidaires aux États-Unis, aurait doublé depuis près d’une décennie. C’est un signe, qui plus est pour un pays phare comme l’Amérique, chef de file de nos pays développés où il devrait faire bon vivre…
C’est surtout le signe du mal qui ronge nos sociétés occidentales déchristianisées : à la fois gavée et affamée, entourée et esseulée, « libérée » et pourtant aux fers, la jeunesse ne sait plus où elle va.
De plus en plus de jeunes suicidaires aux Etats-Unis
« Nous avons remarqué au cours des deux dernières années que plus en plus de nos lits d’hôpitaux n’étaient pas utilisés par des enfants atteints de pneumonie ou de diabète, mais par des enfants en attente de placement parce qu’ils étaient suicidaires »… L’étude menée par le professeur et pédiatre, Gregory Plemmons, entre 2008 et 2015, sur 32 hôpitaux, a été présentée dimanche à la Réunion des sociétés académiques pédiatriques, à San Francisco.
Des résultats qui rejoignent les données récemment signalées par les Centres pour le contrôle et la prévention des maladies (CDC) des États-Unis : les taux ont doublé en une seule décennie. Deux fois plus de jeunes enfants ou d’adolescents se retrouvent hospitalisés pour des pensées ou de véritables tentatives de suicide : nous sommes passés de 0,67 % des enfants admis dans les hôpitaux en 2008 à 1,79 % en 2015.
Plus de la moitié avait entre 15 et 17 ans, près de 37 % avaient entre 12 et 14 ans, les enfants de 5 à 11 ans représentant quelque 13 % du total. Et 66 % sont des filles – au niveau mondial, pour les adultes, le phénomène est le même : les femmes tentent plus, mais les hommes réussissent davantage (en revanche, les chiffres des CDC attestent que les suicides chez les filles âgées de 10 à 14 ans ont triplé entre 1999 et 2014.)
A 15 ans, en France, 21 % des filles ont tenté de suicider
Si l’étude ne s’attache qu’aux profils « encore en vie », qui ne sont pas passés à l’acte ou qui ont raté leur suicide, l’augmentation globale ainsi repérée rejoint aussi les données des CDC selon lesquels le taux de décès par suicide chez les personnes de 10 à 24 ans a doublé depuis 2007.
En France, selon les dernières estimations, entre 600 et 1.000 adolescents mettraient fin à leurs jours chaque année. En janvier 2014, Le Concours Médical affirmait dans ses colonnes qu’à 15 ans, près de 21 % des filles et près de 9 % des garçons avaient déjà tenté de se suicider… le syndrome semble le même.
Et pourtant, à la base, un mineur n’est-il pas le moins enclin à se suicider ?! C’est encore vrai – et encore heureux. Seulement, il ne faut pas négliger un tel langage des courbes. Le suicide ou les tentatives de suicide de la jeunesse d’un pays sont signes éminents d’une société profondément abîmée.
Les facteurs de la courbe ascendante des tentatives de suicides, entre réels et officiels
Les causes multiples de ce ravage, le Dr Plemmons n’en a pas fait l’objet de son étude. Au micro de CNN, il évoque cependant, tous azimuts, plusieurs pistes, « les antécédents familiaux de la dépression ou du suicide, la violence familiale, la maltraitance des enfants, les jeunes gais et lesbiens »… mais aussi ce qu’on appelle la pression scolaire, « la cyberintimidation », l’influence globale des « réseaux sociaux », la « puberté précoce » des jeunes filles, la toxicomanie…
Il y a à boire et à manger dans ces causes. Mais il est facile d’y déceler les maux vrais et profonds de notre effrayante modernité… Le bouleversement induit par la tabula rasa familiale, avec les divorces, les ménages recomposés, l’absence d’un foyer stable et rassurant… L’individualisme forcené d’une société qui confine à la solitude, avoir mille « amis » Facebook et rester seul devant son écran… L’hédonisme à tout crin qui sert le plaisir mais ne fait pas le bonheur. Le spectre des réseaux sociaux, amplificateurs de détresses, voire incitateurs mortels (la Russie avec ses « groupes de la mort » s’y connaît bien)… Et surtout, surtout, la désespérance, le vide laissé par la perte des repères, l’abandon des valeurs et de la Foi.
Mais parions que la plupart de ces causes resteront dans l’ombre épaisse… Et que d’autres explications voient et verront peu à peu le jour, comme (le Dr Plemmons l’a déjà noté) le problème de l’identité sexuelle par exemple (une étude, fin février, a affirmé lier la légalisation du mariage gay dans plusieurs Etats américains à la baisse de 7 % des tentatives de suicide chez les lycéens, entre 2004 et 2005…). Ou encore celui des soins mentaux ou affectifs qui ne sont pas suffisamment donnés : la journaliste de CNN évoque ce psychologue qui estime que « 20 % à un tiers des enfants ont besoin de soins mentaux »… Et même celui de la religion, autoritaire et déformatrice, on l’a vu au Canada, en Ontario avec le projet de loi en Ontario…
Autant de bons prétextes pour prendre la main sur ces adolescents en mal-être réel ou potentiel. L’Etat le fera fort bien.