Entre Bill Gates optimiste et les « portes de l’enfer » de Guterres, deux approches divergentes sur le climat

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Drôle de télescopage dans les discours sur le climat : tandis qu’au Royaume-Uni, Rishi Sunak lève le pied sur les mesures « net zéro », des bruits discordants nous arrivent depuis New York, où se tiennent cette semaine deux sommets sur le climat, l’un organisé par l’ONU – le Climate Ambition Summit –, l’autre par les sommités que sont Bill Gates, Michael Bloomberg et le prince William qui a donc choisi d’autres feux de la rampe que son roi Charles de papa qui dînait à Versailles. Antonio Guterres, Secrétaire général de l’ONU, avait un message simple : il faut « fermer les portes de l’enfer » (« the gates of hell »), et il faut le faire vite parce que « la chaleur effroyable a des effets effroyables ». A la réunion au Plaza Hotel, sans doute à peu près en même temps, Bill Gates proclamait : « Il y a beaucoup d’exagération autour du climat. Le climat n’est pas la fin de la planète. Et donc la planète va aller très bien. »

Entre deux « Gates », peut-on donc choisir le moindre ? Sans doute les deux mondialistes patentés ne sont-ils pas en désaccord sur le fond : à savoir qu’il faut utiliser le climat pour faire avancer une cause qui n’a en réalité pas grand-chose à voir avec les « températures qui montent ». Voyez les Objectifs du développement durable de l’ONU, qui sont en dernière analyse des instruments au service du socialisme international.

 

Bon flic, mauvais flic : Gates et Guterres parlent du climat

Mais il est intéressant de voir le langage employé par les uns et les autres, témoignant sinon d’analyses différentes, du moins d’approches qui s’adaptent. Force est de constater que la Grande Peur du climat ne convainc pas aujourd’hui la majorité ; il s’agit d’en prendre acte.

Antonio Guterres, lui, y reste fondamentalement attaché. Ecoutez-le, s’adressant à des leaders mondiaux, des ministres et autres personnalités venus détailler les actions entreprises pour atteindre les objectifs de la COP 21 à Paris : « L’humanité a ouvert les portes de l’enfer » en projetant des gaz à effet de serre dans l’environnement depuis la révolution industrielle, a-t-il dit. « Des fermiers désolés voient leurs récoltes emportées par les inondations ; des températures étouffantes répandent les maladies ; des milliers de personnes fuient, affolées, alors que des incendies historiques font rage. »

« L’action pour le climat est éclipsée par la dimension de ce défi », a encore assuré Guterres, et à moins de réformes dramatiques, l’humanité se précipite vers « un monde dangereux et instable » qui a déjà pris 1,2 degrés depuis la révolution industrielle et qui s’apprête à dépasser une augmentation de 2,8 degrés par rapport à cette époque-là.

 

Deux approches sur le climat : alors, apocalypse ou crise gérable ?

« Nous devons rattraper le temps perdu à cause des tergiversations, des tiraillements et de l’avidité sans vergogne d’intérêts bien établis qui engrangent des milliards grâce aux combustibles fossiles », a ajouté le chef de l’ONU, alors que la Chine, les Etats-Unis, le Royaume-Uni, le Japon, l’Inde et l’Australie ne participaient pas à la réunion. Plus de 100 demandes de participation avaient été faites ; la veille au soir, seules 41 d’entre elles, émanant de 34 Etats membres et de 7 non membres ou institutions financières, ont été acceptées. Les mauvais élèves avaient été prévenus qu’ils n’auraient pas voix au chapitre.

Pendant ce temps-là, les intervenants à l’Earthshot Summit s’étaient réunis pour l’attribution du Prix Prince William d’1,2 million de dollars récompensant de nouvelles manières de « sauver la planète ». « Nous devons nous accrocher à l’optimisme et à l’espérance parce que c’est cela qui peut le mieux impulser le changement et l’innovation », a déclaré l’héritier du trône britannique, affirmant qu’il faut certes une « saine dose de pessimisme réaliste au sujet du climat de la Terre », mais que les gens doivent le croire : « Il y a de l’espoir ; il y a des gens à l’œuvre qui font des choses incroyables qui auront un impact massif sur notre avenir à tous. »

 

Hier la « fatigue pandémique », aujourd’hui la « fatigue du réchauffement » ?

Message repris par Bill Gates : certes, le monde ne va pas limiter le réchauffement à 1,5 degrés, mais il n’atteindra pas non plus les 3 degrés, selon le philanthrope dont, prudent, le magazine Fortune souligne qu’« il n’est pas un scientifique du climat ». Gates a cité des innovations qui paraît-il se multiplient depuis 2015, par exemple un dispositif utilisant des roches pour capturer du CO2 siphonné depuis l’atmosphère selon un processus 100.000 fois plus rapide que celui qu’offre la nature.

Certes, son discours – comme celui du Prince William et d’autres personnalités comme Janet Yellen, secrétaire du Trésor des Etats-Unis –, insiste toujours sur le « net zéro ». On n’a pas fini de nous dire que l’homme est coupable de tout. Mais il semblerait que certains aient décidé de lâcher un peu de lest.

Cela aussi fait partie de la guerre psychologique faite à l’homme.

 

Anne Dolhein