Le gouvernement russe indigné par des actes de vandalisme contre des monuments à l’Armée rouge en Pologne

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Le ministère russe de la Défense a exprimé sa colère après des actes de « profanation » contre des monuments érigés à la gloire de l’Armée rouge sur le sol polonais qui se multiplient ces derniers mois, et particulièrement contre le vandalisme dont a été victime celui d’un parc public à Varsovie en marge des cérémonies du souvenir de l’indépendance polonaise, le 11 novembre. Le mémorial de l’Armée soviétique au parc Skaryszewski fait partie de ceux qui restent encore debout en Pologne alors qu’un mouvement officiel de démantèlement de ces rappels de l’occupation russe est en cours, lui aussi régulièrement dénoncé par le gouvernement de Vladimir Poutine.
 
Le message diplomatique du gouvernement russe déclaré : « Il est très peu probable que la Pologne eût pu célébrer aujourd’hui un nouvel anniversaire de son indépendance, sans l’héroïsme des 600.000 soldats et officiers soviétiques qui ont sacrifié leurs vies pour libérer ce pays des envahisseurs nazis. »
 

Le gouvernement russe demande à la Pologne de protéger ses monuments à l’Armée rouge

 
C’était pourtant un envahisseur qui chassait l’autre, non sans atrocités – qu’on se souvienne du massacre de Katyn qui avait pour objectif de décapiter les élites polonaises, militaires ou non. Sans compter la déportation de 300.000 Polonais vers la Sibérie ou le Kazakhstan… Les décennies de glaciation communiste qui ont suivi ont livré la Pologne à leur ennemi de toujours. Pourquoi lui rendraient-elle hommage aujourd’hui ?
 
Quant à la Russie, elle assume une fois de plus pleinement, et au pris de bien des non-dits, son passé soviétique. Imagine-t-on l’Allemagne demandant la mise en place de monuments à la gloire de soldats de Hitler dans d’anciens territoires occupés ?
 
Elle demande aujourd’hui que la Pologne retrouve et punisse les vandales, et qu’elle procède au restauration du monument ainsi qu’à la mise en place de mesures pour éviter de nouveaux épisodes de vandalisme.
 
Le 12 octobre dernier, l’Institut national de la mémoire en Pologne, un organisme public, expliquait pourquoi le pays procède aux démantèlements de ces monuments à la gloire des soviétiques. Les réactions russes, lit-on sur le site, montrent le manque de compréhension russe à l’égard de la « sensibilité historique de la Pologne » et répandent des « mensonges qui reproduisent la propagande stalinienne ».
 

Actes de vandalisme et indignation sélective

 
L’article rappelle notamment qu’au moment où l’Armée rouge envahissait la Pologne, le 17 septembre 1939, l’Union soviétique était encore liée à l’Allemagne nazie par le pacte germano-soviétique, en exécution du pacte secret Molotov-Ribbentrop signé le 23 août précédent. Et de souligner qu’une parade militaire conjointe entre la Wehrmacht et l’Armée rouge eut lieu à Brest (aujourd’hui en Biélorussie) alors que la Pologne essayait encore désespérément de se défendre face aux deux régimes totalitaires qui la dépeçaient.
 
Les massacres de Polonais par les Soviétiques devaient continuer après le retournement russe contre l’Allemagne en 1941. L’Institut de la mémoire rappelle que si des Polonais ont par la suite combattu aux côtés de l’Armée rouge, les Soviétiques se sont à bien des reprises retournés dans la foulée contre les officiers et soldats polonais emprisonnés et pour beaucoup morts en détention. Ils ont aussi restés sans bouger alors que les Polonais ont tenté un soulèvement contre les forces allemandes à Varsovie le 1er août 1944 : deux mois et 150.000 victimes plus tard, la voie était ouverte pour que l’Union soviétique prenne le contrôle, ce qui fut accompli un an plus tard, avec son cortège d’horreurs, et une Pologne réduite en esclavage.
 
Les monuments à l’Armée rouge – qui ne sont pas des tombes ni des cimetières – ont ensuite poussé comme des champignons en Pologne, au fur et à mesure que les Soviétiques les érigeaient. « Il n’est pas surprenant que la Pologne veuille se débarrasser de ce ballast », observe l’article de l’Institut de la mémoire. Il rappelle que cela n’a rien à voir avec le respect à l’égard des cimetières où reposent des Russes tombés pendant la Seconde Guerre mondiale, qui continuent d’être officiellement entretenus : « Les Polonais sont bien conscients que des millions de Russes ont été victimes du même totalitarisme inhumain. »
 
Il ne semble pas que la Russie en ait la même conscience.
 

Anne Dolhein