Le Japon, en voie de suicide démographique, compte sur la 4e Révolution industrielle : robotisation et AI. Le Forum économique de Davos applaudit

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Une tribune publiée par le Forum économique mondial de Davos vante les mérites du Japon qui s’en remet à la 4e Révolution industrielle pour dessiner les contours de son avenir assombri par sa natalité désastreuse. Le suicide démographique du Japon est inéluctable, et déjà bien engagé : voici pourtant ce pays mourant érigé en « modèle » à imiter pour le monde entier par l’un des plus influents think tanks qui existent, qui peut se vanter de réunir chefs d’Etat, responsables de multinationales et d’organisations internationales, et tout ce que le monde compte de plus influent. On dira que c’est une tribune, ce qui permet au site weforum.org de se distancer du contenu. Il n’empêche. C’est sans réserve que le papier est mis en avant et titré comme suit : « Le Japon pourrait-il devenir un modèle à imiter pour la 4e Révolution industrielle ? » Il aurait été plus exact d’écrire : « Robotisation et intelligence artificielle (AI) remplaceront-ils un jour une humanité en voie de destruction ? »
 

La 4e Révolution industrielle pour compenser le suicide démographique

 
L’auteur de l’article, Murat Sönmez, est supposé ne pas représenter l’opinion du Forum économique mondial mais il se trouve être quand même le directeur exécutif du Centre pour la 4e Révolution industrielle et le réseau global.
 
Son idée est de montrer que, face aux objectifs du futur quant à la mise en place des nouvelles technologies émergentes, le Japon possède deux atouts essentiels : « un fort sens de la mission » (sic) à tous les niveaux du pouvoir et de la société, et un bon équilibre d’« actifs » intellectuels et industriels qui lui permettront notamment de profiter des voitures sans chauffeur, de la médecine de précision alimentée par une grande quantité de données, et bien sûr de l’ensemble des possibilités ouvertes par l’intelligence artificielle « pour affronter les défis sociaux ».
 
Défis sociaux ? Ce sont les « problèmes critiques » parmi lesquels Murat Sönmez cite « une population vieillissante, et qui se rétrécit ». C’est l’autre grand remplacement qui se profile, plus inquiétant encore que celui de l’immigration en ce sens que l’homme est toujours un homme et qu’il possède toujours au fond de lui l’appel de la vérité et de la vie éternelle. Le robot n’aura jamais d’âme.
 
Le Japon, explique l’auteur, est comme le canari dans la mine de charbon : l’oiseau qu’on envoie au casse-pipe pour savoir si l’atmosphère est respirable. Pourquoi ? Parce qu’il est déjà confronté au problème d’une population en repli. « En Europe et dans d’autres parties de l’Asie, spécialement, des nations qui affichent de pareils taux de natalité bas s’en vont vers une même contraction de leur population, avec un vivier de population active qui se rétrécit au service d’une population de personnes âgées en plein boom. Le monde se tournera vers le Japon pour savoir comment faire : reste seulement la question de savoir s’il y trouvera un modèle à imiter capable de l’inspirer », écrit-il.
 

Japon, 3,03 robots pour 100 travailleurs, pays modèle pour le Forum économique de Davos

 
Avec 3,03 robots pour 100 travailleurs, le Japon fait partie des pays les plus densément « peuplés » dans ce domaine, derrière l’Allemagne qui en compte 3,09, Singapour avec 4,88 robots pour 100 actifs, et la Corée du Sud qui plafonne à 6,31 et qui affiche également, comme les deux autres « vainqueurs », une natalité désastreuse.
 
Pour Murat Sönmez, cette situation au Japon répond à une volonté délibérée et un nouveau sentiment d’urgence alors que les défis « sociaux, économiques et technologiques » ne toléreront plus d’être ignorés.
 
En filigrane, même si l’article ne le met pas en évidence, on devine une tendance à la socialisation tous azimuts, avec un brouillage progressif des frontières entre les transports en communs et les transports privés et un isolement de plus en plus notable des zones rurales où les personnes âgées peinent à se déplacer et à avoir accès aux soins. « Pour combler le trou, voici les véhicules autonomes, les soins à distance, les drones de livraison », se félicite l’auteur.
 

La robotisation et l’intelligence artificielle annoncent un autre « grand remplacement »

 
Il prône notamment l’utilisation des innombrables données de santé conservées numériquement au Japon pour faire appel à l’intelligence artificielle et à l’apprentissage des machines afin de trouver de nouveaux traitements, de nouvelles solutions : pourquoi ne pas utiliser le blockchain pour mettre en réseau les données que les patients pourraient même vendre au laboratoire de recherche ?
 
Pour cela, suggère l’auteur, il faudra peut-être que le Japon rompe avec ses cultures de l’attention méticuleuse et de la diligence, « des qualités admirables, mais qui, par le passé, ont parfois pu entraver la vitesse ». Les nouvelles technologies vont vite, il va falloir que le Japon prenne des décisions rapides… Et surtout, devine-t-on, sans se poser des questions sur ce grand remplacement qui se profile.
 

Anne Dolhein