L’Institut du Monde Arabe à Paris propose une exposition consacrée à un des domaines d’excellence en principe reconnu de la civilisation arabo-musulmane, celui des jardins. Le parcours proposé entend balayer la totalité du sujet, ce qui s’avère fort ambitieux en termes historiques ou géographiques. Le sujet est compris chronologiquement, de manière très large, des jardins traditionnels du Proche-Orient préislamiques à nos jours. Quant au cadre géographique, il est étendu du Maroc à l’Inde, voire de façon marginale à la péninsule malaise et l’archipel indonésien.
 
Aussi l’exposition débute-t-elle par les mythiques Jardins de Babylone, dont une intéressante et séduisante reconstitution par un film en 3D est proposée aux visiteurs ; il n’en demeure pas moins que leur emplacement, leur forme exacte, voire leur existence réelle, est encore fort discutée. Par contre, sont beaucoup plus connus de l’archéologie, de manière certaine et très documentée, les fameux paradis des empereurs de Perse. Leur présentation est des plus intéressantes selon nous. Le visiteur peut rester songeur quelque instant en constatant que des terres aujourd’hui désertiques, poussiéreuses, ont été de merveilleux jardins, alimentés massivement en eau par un système complexe de longs canaux souterrains et de nombreuses et vastes citernes. Ces paradis ont proposé des images pour la description des paradis des Juifs antiques, des Chrétiens, ou, plus tardivement, des Musulmans.
 

Les Jardins d’Orient : une promenade agréable et dépaysante

 
Après les conquêtes arabes du VIIème siècle, cet art fondamentalement persan des jardins a été repris par les cours califales des Omeyades puis Abbassides. La filiation persane, implicite dans le parcours, n’est toutefois, sauf distraction de notre part, jamais explicitement formulée dans les commentaires…Il s’est probablement agi de respecter le chauvinisme arabe, qui voudrait qu’une civilisation arabo-musulmane aurait tout inventé, alors qu’elle a tout pris au contraire aux très anciennes et prestigieuses civilisations du Proche-Orient, avant de stagner puis sombrer. Quant à l’agriculture d’oasis en Afrique du Nord ou en Arabie, incluse dans le parcours, elle relève pourtant au sens strict relève d’un art en fait significativement différent, celui du jardin consacré à un usage exclusif, ou quasiment exclusif de production agricole, sans souci esthétique. Enfin, sont présentées, après de nombreux exemples historiques qui forment l’essentiel du sujet, des études et réalisations récentes de parcs publics dans les pays arabes aujourd’hui, particulièrement au Maroc et à Oman.
 
Il y a là certainement un véritable sujet avec ces Jardins d’Orient. La limite majeure de l’exposition se conçoit dès la définition du sujet, trop large, qui condamne pratiquement à la superficialité. Il est néanmoins proposé au visiteur une forme de promenade agréable et dépaysante. Signalons seulement qu’une forte densité de visiteurs, fréquente, peut gâcher quelque peu le plaisir. Il ne faut absolument pas manquer le jardin éphémère, extérieur, qui conclut l’exposition.
 

Hector JOVIEN

Jardins d’Orient

 
De l’Alhambra au Taj Mahal
 
19 avril 2016 – 25 septembre 2016
 
Du mardi au vendredi : 10h-18h ; samedi et dimanche jusqu’à 19h
 
Tarif plein : 12€