Jérusalem : Trump simple maillon de l’histoire d’Israël et des Anglo-Saxons depuis la déclaration Balfour

Jérusalem Israël Trump Maillon Histoire Anglo saxons Déclaration Balfour
 
La communauté diplomatique vilipende Trump pour avoir reconnu Jérusalem capitale d’Israël. Il ne fait pourtant qu’acter une décision prise depuis vingt ans, et que postule toute l’histoire d’Israël et des Anglo-Saxons depuis la déclaration Balfour – dont il n’est qu’un maillon pas plus voyant que les autres.
 
Comme d’habitude Donald Trump est présenté comme un irresponsable boutefeu qui menace la paix du monde, inquiétant mesdames May et Merkel et messieurs Juncker et Macron. Pourtant, la reconnaissance de Jérusalem pour capitale d’Israël est une vieille histoire en Amérique : le Congrès l’a votée en 1995.
Certains la jugent scandaleuse pour des raisons religieuses, ils pensent que Jérusalem serait la troisième ville sainte de l’islam. C’est abusif. Il n’y en a que deux. Mahomet, originaire de Médine, priait tourné vers La Mecque. Les controverses autour de l’esplanade des mosquées sont l’exemple typique d’une instrumentalisation du religieux par le politique.
 
D’autres font mine de croire que cette décision ruinera le « processus de paix » au Proche Orient. C’est une blague : les négociations sont arrêtées depuis trois ans. Et, depuis l’occupation de l’est de Jérusalem en 1967, rien n’a jamais marché en la matière. D’autres, enfin, se placent sur le plan du droit international. Ils ont raison, la décision de Trump le bafoue. Le hic, c’est qu’elle n’est pas la seule.
 

Résolution 242 : les Anglo-Saxons au secours d’Israël

 
Voilà cinquante ans tout ronds, lors de la guerre des Six jours, Israël fichait une rouste aux pays arabes et s’octroyait un bon peu de leurs territoires, dont l’est de Jérusalem. La photo du général Dayan pleurant de joie sur le mur des Lamentations a fait le tour du monde. Le 22 novembre 1967, après d’âpres négociations, le conseil de sécurité de l’ONU votait sa résolution 242, qui obligeait Israël à se retirer des territoires occupés au cours du conflit, en échange d’une paix durable assorties des garanties nécessaires. La version originale française précisait bien « des (de les) territoires », elle était reprise et corroborée par les versions rédigées dans les autres langues officielles de l’ONU, espagnole, russe, arabe, russe et chinoise. Mais, profitant d’une imprécision (sans doute volontaire) de la version anglaise (« occupied territories », sans article, peut signifier les territoires ou des territoires) les pays anglo-saxons permirent à Israël de se maintenir dans la partie orientale de Jérusalem, dans le Golan, et d’autres territoires occupés. Les Anglo-Saxons avalisaient ainsi en fait le droit de conquête, interdit par la communauté internationale : ils devaient faire un prétexte de cette interdiction pour entrer en guerre contre Saddam Hussein en 1991.
 

Jérusalem capitale : moins risqué que la création d’Israël par l’ONU

 
On retrouve le même mépris du droit international dans le plan de partage de la Palestine voté par l’assemblée générale de l’ONU le 29 novembre 1947. Comme le monde entier suivait un mouvement général vers la décolonisation, l’émanation de la communauté internationale, l’ONU, décidait de donner un Etat aux colons juifs, Israël, alors que les Arabes sur place en combattaient l’idée depuis des décennies, les armes à la main, et que les pays avoisinant n’en voulaient pas. Or cette décision fut soutenue par quatre fées marraines, les quatre grands d’alors unanimes (Angleterre, Etats-Unis, France, Russie). On peut la juger généreuse, ou juste du point de vue moral, mais elle était infiniment plus risquée et dangereuse que la reconnaissance de Jérusalem pour capitale d’Israël par Trump. Et elle n’avait aucun fondement en droit international.
 

La déclaration Balfour, histoire très simple et très compliquée

 
Que dire enfin du premier maillon de cette histoire, la déclaration Balfour du 2 novembre 1917, par laquelle le gouvernement de sa majesté britannique promettait à Lord Lionel Rothschild et à la fédération sioniste un foyer national pour les Juifs en Palestine ? En pleine grande guerre, elle entendait capter au profit de l’Entente le soutien des communautés juives, notamment dans les empires centraux, traditionnellement favorables à ceux-ci et opposées à la Russie. Elle exprimait aussi à la sympathie sioniste que Balfour tirait de l’histoire des religions. Mais, du point de vue du droit international, elle surprend : l’une des puissances en guerre, sans attendre la mort de l’ours austro-allemand, prétendait vendre et distribuer la peau de son allié ottoman, de son propre chef et à son seul profit. Cela surprend d’autant plus que, vu d’Europe, la protectrice des lieux Saints et des chrétiens d’Orient était, depuis au moins François premier (la première tradition en remontait à Pépin le Bref), la France. Il fallut d’ailleurs un puissant lobbying et la complicité du laïciste anglophile Clemenceau pour que la Grande Bretagne obtienne le mandat sur la Palestine. C’est donc par un double déni de l’histoire et du droit que la déclaration Balfour put prendre effet et jeter les fondations de l’Israël actuel.

Face à l’islam, Trump maillon modéré de l’histoire

 
On voit que Trump n’est qu’un maillon d’une longue histoire. Nettement plus modéré que les autres. On lui reconnaîtra le sens de la chronologie et du symbole. Il a pris sa décision cent ans après la déclaration Balfour, soixante-dix ans après le vote de l’ONU créant Israël, cinquante ans après la guerre des Six jours et la résolution 242. Si son geste est un violent camouflet à l’ONU et à la « communauté internationale », raison profonde des condamnations quasi unanimes qu’il reçoit, il n’est pas du tout sûr que son acte mène à une aggravation du conflit. Au contraire, des négociations vont peut-être s’ouvrir : en échange de Jérusalem, Netanyahou peut donner des garanties à un futur Etat palestinien. Il faut toujours se méfier des faucons, ils finissent parfois en colombes extrêmes parce qu’ils peuvent se le permettre, voir De Gaulle en Algérie.
 
Notons une dernière chose : la Tchéquie elle aussi reconnaît Jérusalem pour capitale d’Israël. Son président Milos Zeman avait déclaré en janvier 2016 que la vague des migrants vers l’Europe avait été « organisée par les frères musulmans ». Une coalition Trump-Israël-Europe de l’Est est en train de se dessiner contre l’extension de l’islam.
 

Pauline Mille