A compter du 1er avril, et après trente-et-un ans d’existence, le régime des quotas laitiers dans l’Union européenne disparaît. Ce qui signifie que les producteurs laitiers pourront, désormais, produire autant de lait qu’ils le souhaiteront afin de répondre à la demande. On pouvait croire que cette libéralisation du marché se ferait à la grande satisfaction des professionnels du secteur. Mais c’est loin, manifestement, d’être aussi simple…
Fin des quotas européens
Ce changement s’explique, du moins à Bruxelles, par une évolution du marché. Lorsque, en 1984, ces quotas ont été décidés, il s’agissait de limiter la production laitière européenne, alors excédentaire, et de permettre ainsi de stabiliser les prix. Aujourd’hui, pour des raisons qui demanderaient à être analysées, la consommation de produits laitiers est en pleine expansion, tant en Europe que dans le reste du monde.
D’où cette décision de mettre fin aux des quotas laitiers, afin de permettre aux agriculteurs européens de répondre à cette demande, en produisant dorénavant les quantités qu’ils estiment souhaitables.
Or, alors qu’il y a trente ans nombre d’agriculteurs – notamment français – se sont opposés à cette politique des quotas, leurs successeurs font aujourd’hui la fine bouche. La raison de cette volte-face est assez simple à comprendre – peut-être moins à admettre. Face à une concurrence mondiale très forte, le système de la stabilisation des prix, s’il n’est pas en soi satisfaisant, avait au moins le mérite d’assurer une garantie de revenu au producteur. Bon an, mal an. Tant pis pour celles qui auraient pu être de bonnes années, mais tant mieux pour les mauvaises… Si la vache grasse n’était pas toujours aussi grasse qu’elle aurait pu l’être, la vache maigre, du moins, ne risquait pas de dévorer sa consœur plus généreuse.
Lait : un marché mondialisé
Si l’Europe est actuellement en tête en ce qui concerne le fromage ou le lait en poudre, bien d’autres pays, tels la Nouvelle-Zélande ou les Etats-Unis, la devancent désormais dans les autres spécialités du secteur.
Les professionnels européens craignent donc de devoir faire face à une volatilité accrue des prix du lait. La Commission européenne en est consciente, dont le responsable à l’Agriculture, l’Irlandais Phil Hogan, assure : « Nous aurons encore des mécanismes à notre disposition si une crise explose ». Mais reconnaît que « le secteur industriel va devoir s’adapter à une nouvelle réalité ».
Quoi qu’il en soit, le marché de l’assistanat qui, sous couvert de les protéger, a fini par tuer un grand nombre d’agriculteurs, à commencer par les « petits », a encore de beaux jours devant lui. Et ce dernier changement de réglementation pourrait bien mettre à mort de nombreuses exploitations qui ont réussi à échapper à la politique malthusienne des trois dernières décennies, achevant l’élimination d’un pan entier de notre agriculture. La lutte de l’Etat français et de l’Europe contre les indépendants se poursuit.