Le Chiffre : 20,96

Le Chiffre 20 96
 

C’était, exprimée en degrés Celsius, « la température de surface des océans » dimanche 30 juillet 2023 selon l’Observatoire européen Copernicus, et ce serait, selon un porte-parole de la base de données ERA5, un record, « le précédent record était de 20,95 °C en mars 2016 ». La presse dans son ensemble juge cette donnée catastrophique. Notre confrère BFMTV cite Piers Forster, professeur spécialiste du changement climatique à l’université de Leeds au Royaume-Uni, pour qui « la vague de chaleur océanique représente une menace immédiate pour une partie de la vie marine. On voit déjà des signes de blanchiment des coraux en Floride qui en sont la conséquence directe ». Et le phénomène serait particulièrement épouvantable dans l’Atlantique Nord, qui se réchauffe chaque année de novembre à mars, et qui serait devenu « un point d’observation emblématique de la surchauffe des océans de la planète, sous l’effet du réchauffement climatique causé par les gaz à effet de serre ». Dès le 26 juillet, les eaux de « l’Atlantique Nord avaient atteint un record de température moyenne de l’eau de surface de 24,9 °C, selon des données provisoires de l’Agence américaine d’observation océanique et atmosphérique (NOAA) ».

Mais de quoi s’agit-il ? Que nomme-t-on « température moyenne de la surface des mers » (en particulier celle de l’Atlantique Nord) et comment la mesure-t-on ? On définit d’abord un secteur géographique de mesure : les températures sont mesurées de part et d’autre de l’Equateur jusqu’aux soixantièmes parallèles nord et sud, excluant donc les zones polaires. Puis on mesure « l’eau de surface ». Jadis, on trempait un thermomètre dans un seau d’eau puisée dans la mer : la profondeur de l’eau collectée variait de la surface à un mètre et la mesure était imprécise. Sur les navires modernes, le capteur se trouve dans le conduit de refroidissement des machines, et mesure de ce fait la température de l’eau se trouvant cinq mètres sous la surface. Sur les bouées météo, ils mesurent l’eau se trouvant à un mètre sous la surface. Mais aujourd’hui, les mesures les plus utilisées et les plus vulgarisées sont les mesures par satellite, avec les radiomètres qui captent les rayons infrarouges émis par les premiers millimètres de la surface marine – dont on déduit la température de surface – sauf que ça ne marche pas bien quand il y a des nuages.

On voit donc que, dans ces conditions, un « record » de la température moyenne des océans ne veut pas dire grand-chose, d’une part parce que les mesures sont variables et imprécises, de l’autre parce que c’est une moyenne, qui ne dit rien de la température à un point précis ou dans une zone donnée, qui seule provoque des effets concrets sur la faune ou la flore. Ce type de donnée ne peut que flatter le sens du sensationnalisme et servir le cas échéant à faire peur.