Loi Macron : derrière le prétexte économique, une réforme idéologique

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Les quelques projets précis contenus par la loi Macron, incitation à l’épargne d’entreprise, déréglementation des professions réglementées, facilitation du licenciement, travail le dimanche et aide aux autobus ne permettront évidemment pas la relance économique de la France : c’en est même ridicule. Le propos de cette réforme idéologique est ailleurs : elle satisfait les exigences du mondialisme sans frontières.
 
La première caractéristique de la loi Macron est qu’elle réunit contre elle des minorités hétéroclites : les syndicats, les notaires, les avocats, l’épiscopat, les frondeurs socialistes et Martine Aubry, qui voit en elle une « régression sociale » manifeste. Le pouvoir analyse cette opposition comme la conjugaison d’intérêts que la volonté de libérer la situation économique manifesté par le ministre lèserait. Elle serait l’expression d’une sorte de syndicat des conservatismes pour la défense des avantages acquis. Mais on peut à l’inverse y voir le sursaut de gens de conviction devant un projet qui, sous un prétexte économique, vise en fait à révolutionner la société.
 

La Loi Macron, fourre-tout sans logique économique

 
Pour en juger, il faut d’abord dire en quoi consiste la loi Macron, et ce qu’on peut raisonnablement en attendre. Vue dans son ensemble, c’est une loi fourre-tout, dont il n’est pas facile de dessiner l’axe général au quel se relient les divers éléments. Pour tenter de donner une unité à l’ensemble, le rédacteur a proposé trois slogans, « libérer et ouvrir », « innover et investir », et enfin « travailler », mais quelques mots ne donnent pas une structure logique à un conglomérat dépareillé. Vue d’un point de vue général encore, la loi Macron est dosée comme une recette d’apothicaire, dans la grande tradition radicale socialiste. Par exemple, elle se propose de faciliter l’entrée aux professions réglementées (notaires, avocats, etc…) et de baisser les tarifs de celles-ci, mais, pour éviter le tollé général et satisfaire le lobby médical, elle ne s’applique pas aux pharmaciens. C’est sans doute cela qu’on nomme à Bercy le pragmatisme. Autre exemple, comme l’extension du travail le dimanche menace le petit commerce, la loi Macron donne une tape sur le nez des grandes surfaces de l’autre main en soumettant celles-ci à un dispositif dit « d’injonction structurelle » qui permettra à l’autorité de la concurrence de vérifier qu’elles ne dévorent pas les zones de chalandise où elles s’installent, au détriment des petits détaillants.
 
Voyons maintenant le reste des projets. Pour favoriser l’investissement, il est prévu de réduire le forfait social des PME qui passeront un accord d’intéressement et de participation avec leurs salariés. Ca va certainement dans le bon sens, mais est-ce vraiment cela qu’attendent en urgence patrons et salariés ? Quant à l’assouplissement des règles de licenciement dans le cadre d’un plan de sauvegarde de l’emploi, c’est une mesure partielle, mi-chou, mi-chèvre, qui ne satisfait personne et dont il n’est pas sûr qu’elle apporte quoi que ce soit.
 

La loi Macron s’inscrit dans un processus de réforme globale

 
Telle est d’ailleurs la caractéristique des autres décisions phares, la promotion des autocars et celle du travail du dimanche. Qui eût cru que, dans la crise économique, dans la véritable rupture de civilisation que tous s’accordent à observer, on pourrait jamais préconiser le travail du dimanche et les autocars pour relancer la croissance et sauver la France ? On est ici au-delà du rire et du pleurer, dans le domaine enchanté du surréalisme ministériel.
 
Aussi, quand le ministre de l’économie espère que sa loi sera le « déclic » de la reprise économique, les bras vous en tombent. Il sait si bien qu’il n’en sera rien qu’il s’est soigneusement gardé de faire la moindre évaluation des effets de son projet, en termes de points de croissance ou en terme d’emploi. Regardant le point le plus discuté de la loi Macron, la promotion du travail du dimanche, le ministre a eu un échange avec Emmanuel Cosse, la patronne d’EELV, au cours duquel il a reconnu que cela n’engendrerait des emplois (combien ?) que dans quelques zones limitées, Paris, les gares, la promenade des Anglais et le Mont Saint-Michel. Etait-il dans ce cas nécessaire, était-il seulement opportun, de faire une loi générale ? La réponse tombe d’elle-même : non. Quelques arrêtés locaux suffisaient. Cela implique donc que, sur ce point au moins, la décision de faire passer une loi n’a rien à voir avec l’objet avoué de celle-ci, en d’autres termes, derrière le prétexte économique, il existe une véritable raison idéologique à la réforme.
 
La loi Macron s’inscrit ici dans un processus de réforme idéologique que les gouvernements successifs se transmettent, qu’ils soient de gauche ou de droite. Elle s’apparente ainsi aux lois Taubira, c’est une loi sociétale plus qu’économique. Notre confrère em>Libération a consacré sa Une ce matin à Jacques Attali, qui serait selon lui le véritable président français depuis deux quinquennats, celui qui fait « le plus difficile, réfléchir », tandis que Sarkozy et Hollande se chargeraient du « plus facile » en tentant « d’agir », c’est-à-dire d’appliquer ses recommandations. Avec un cynisme roboratif, Libération répertorie les réformes faites ou en cours, qui découlent de rapports remis à Nicolas Sarkozy par Jacques Attali, le penseur officiel du mondialisme en France, et qui se définit lui-même comme tel. Le personnage à lui seul justifie le discours du Front National sur l’UMPS. La continuité de la réforme idéologique menée par deux présidents élus par des électorats différents, tous deux opposés pour des raisons différentes aux politiques qu’ils ont suivies, montre la collusion des élites politiques françaises et leur commune soumission à des directives qui les dépassent.
 

Jacques Attali, grand prêtre du mondialisme idéologique

 
Ici, il n’est pas dans notre intention de juger mauvaises toutes les décisions nées du rapport Attali, mais juste de relever leur origine commune d’une part, et ensuite de définir plus précisément l’esprit de la réforme incarnée dans la loi Macron. Le statut d’auto-entrepreneur, la rupture conventionnelle de contrat, les pôles d’excellence universitaires peuvent très bien se défendre, par exemple. Mais ils ont été préconisés par Attali, comme aujourd’hui le travail du dimanche, la réforme territoriale, la modulation des allocations familiales selon le revenu et le bouleversement des professions réglementées. Tout cela concourt, on le voit bien, sous le prétexte de réduire les coûts et de simplifier les procédures (simple prétexte : de quelle usine à gaz va accoucher la réforme territoriale, par exemple ?), à défaire les structures existantes, les habitudes liées à l’identité française (réforme territoriale, travail le dimanche, allocations familiales).
 
L’affaire du travail du dimanche est emblématique. A part la demande de quelques grandes surfaces, rien ne poussait à son accroissement, et rien ne dit qu’il aura un effet significatif sur l’emploi. C’est typiquement un point où le grand capital et la pression idéologique mondialiste convergent, contre le sentiment populaire, que défendent pour une fois les syndicats et l’Eglise. Les arguments agités par les partisans du travail « libéré » sont singulièrement pauvres. Ils disent qu’on travaille plus le dimanche dans certains pays. C’est vrai, mais moins dans d’autres. Et alors ? Ils disent que 27% des Français travaillent déjà le dimanche. C’est vrai. Mais, parmi ceux-ci, combien, petits commerçants et agriculteurs, souhaitent l’extension de l’ouverture des grandes surfaces ? Epsilon. Et parmi les autres, employés souvent précaires, combien aimeraient ne pas travailler le dimanche, si cela leur était possible ?
 

Ce qui est visé dans le dimanche, c’est le catholicisme et la France

 
La majorité. L’argument n’a donc strictement aucune valeur. Un autre relève que la législation et les règlements sur l’ouverture le dimanche sont confus et contradictoires. Ce n’est pas faux, mais est-ce une raison pour les aggriaver ? Cet argumentaire révèle, dans sa pauvreté, que le débat n’est nullement économique, mais politique et idéologique. Mgr Robert Poinard, vicaire général du diocèse aux armées, a publié un long texte où il situe clairement les véritables enjeux. Il y fait l’historique du dimanche jour chômé pour la défense et la protection des petits, en rappelle la valeur chrétienne, consacrée au Seigneur, et affirme sans ambiguïté que le « bien commun doit primer », afin que « le bien-être des uns » ne devienne pas « l’esclavage des autres ».
 
Il est clair que la loi Macron ne vise pas ici seulement à se débarrasser des liens syndicaux, arrêtés préfectoraux, et règlements divers jugés trop restrictifs, ni a donner de nouvelles parts de marché aux grandes surfaces. Elle s’inscrit dans une réforme idéologique de la France qui vise à vider celle-ci de son identité, ici de son identité chrétienne. Car c’est le découpage du temps commun qui est en cause, donc du « vivre ensemble », pour reprendre leur vocabulaire. Ce « vivre ensemble » doit être « déconstruit » (en français, détruit) pour ne plus se conformer à la France d’avant, chrétienne, mais à la France plurielle et laïque de Jacques Attali et des mondialistes, chaque communauté ayant son jour de culte et son jour chômé. La position abusive aux yeux du mondialisme idéologique qui est celle du dimanche doit être supprimée. Emmanuel Macron est un démagogue hors pair : il réunit dans son entreprise l’argent, la maçonnerie, les communautés religieuses minoritaires en France, et les gourous de la gouvernance globale. Il ne lui manque que le peuple.