La portée du missile ICBM de Kim Jong-un lui permettrait de toucher New York et l’est des Etats-Unis : confronter la Corée du Nord sans l’ONU

missile ICBM Kim Jong un portée toucher Etats Unis
Photo diffusée le 28 juillet 2017 par Korean Central News Agency (KCNA), l’agence de presse officielle nord-coréenne du missile ballistique (ICBM), Hwasong-14, tiré d’un lieu non dévoilé.

 
Le missile balistique intercontinental (ICBM) tiré avec succès le 28 juillet par la Corée du Nord, sur une trajectoire de très haute altitude avant amerrissage en mer du Japon, constitue une véritable menace pour les Etats-Unis. Si cet engin, probablement un Hwasong-14, avait été lancé sur une trajectoire normale, il aurait atteint une portée de 10.400 kilomètres, compte non tenu de la rotation terrestre qui l’augmente pour les missiles tirés d’ouest en est. Selon deux experts cités par CNBC, ce type d’engin pourrait donc atteindre la plus grande partie des Etats-Unis. Pour David Wright, co-directeur du « programme de sécurité global » à l’Union of Concerned Scientists, basée dans le Massachussetts, « il paraît presque certain qu’il pourrait toucher New York, Boston et probablement tomber pas très loin de Washington ».
 

Le missile ICBM du 28 juillet met l’ensemble des Etats-Unis à portée de la Corée du Nord

 
Selon David Wright, ce missile tiré le 28 juillet « va considérablement plus loin » que ceux testés auparavant par le régime de Pyongyang. Pour autant, explique ce spécialiste de physique des armements, on ne sait pas encore si les militaires au service du tyran Kim Jong-un ont – ou non – réduit la charge utile du missile pour obtenir une plus grande portée par rapport au tir précédent, le 4 juillet. Bruce Klingner, ancien patron du département Corée à la CIA, devenu chercheur émérite à l’Asian Studies Center de l’Heritage Foundation, basée à Washington, « Le missile semble avoir volé plus haut et plus longtemps que celui du 4 juillet ; il est donc clair qu’il s’agit d’un ICBM et qu’il menace la plus grande partie des Etats-Unis ».
 
Deux spécialistes américains du renseignement, cités par l’Alaska Dispatch News le 1er août, estimaient pour autant qu’en développant ce type de missile l’objectif de Kim Jong-un est plus de conquérir une légitimité internationale que de lancer une attaque contre les Etats-Unis ou leurs alliés. Selon eux, Kim sait que ce type d’agression serait suicidaire. Le Pentagone quant à lui s’est réfugié derrière le statut d’information classifiée sur le sujet. Mais, selon David Wright, « On pourra toujours débattre de savoir si les capacités (d’atteindre les Etats-Unis) sont prouvées ou non, le fait est qu’il faut considérer tout ça sérieusement et nous préparer à nous défendre ».
 

Donald Trump très déçu par l’immobilisme de la Chine

 
Au plan diplomatique, le New York Post a relaté le 1er août que le président Donald Trump a été très déçu par l’incapacité de la Chine, principal partenaire commercial de la Corée du Nord, à brider les programmes d’armement de Kim Jong-un. Le président américain a tweeté lundi que « la Chine pourrait facilement résoudre ce problème ». Puis, lors d’une réunion du cabinet, il a déclaré : « Nous gérerons la Corée du Nord. Nous serons capables de les gérer. Ce sera géré. Nous gérerons tout ».
 
Cette déclaration présidentielle reste aussi volontaire que floue : le secret est le nerf de la guerre. Parmi les options envisagées, l’une, soutenue par Nikki Haley, ambassadeur américaine auprès des Nations unies, consiste à demander une réunion du Conseil de sécurité pour alourdir les sanctions contre le régime nord-coréen. Le 5 juillet, elle avait estimé que « Depuis des années, on (avait) pris de nombreuses sanctions contre la Corée du Nord, ses actions illégales et dangereuses », mais qu’elles s’étaient « révélées insuffisantes à la convaincre de modifier sa politique destructrice ».
 

Le missile de Kim Jong-un doit inciter les Etats-Unis à réagir souverainement

 
Reste que, si les Etats-Unis décidaient qu’il était nécessaire d’imposer de nouvelles sanctions contre la Corée du Nord, écrit Warren Mass, sur le site Thenewamerican, « il serait recommandé de le faire unilatéralement, sans passer par l’ONU » car « tant que notre gouvernement s’en remet aux Nations unies pour tout et n’importe quoi, que ce soit pour un conflit économique ou d’un conflit armé », le peuple américain « renonce à sa souveraineté au bénéfice d’une instance mondiale ». Selon le commentateur, « les 36.516 Américains tués durant la guerre de Corée, conflit supervisé par l’ONU, sont la meilleure illustration des conséquences d’une contrainte imposée par elle. »
 
Le libertarien texan Ron Paul, lui, suggère un virage « non-interventionniste » : « Retirons nos troupes de la Corée du Sud après leurs 70 années de présence. Le nouveau président sud-coréen a proposé des négociations militaires avec le Nord pour réduire les tensions. Nous devrions nous retirer et leur laisser seuls résoudre leurs problèmes ». Pour autant, une telle attitude devrait s’accompagner d’un renforcement des forces offensives des Etats-Unis et de ses défenses anti-missiles. L’Agence de défense anti-missiles américaine (MDA) teste en ce moment des intercepteurs sol-air (GMD) capables de détruire des ICBM en vol. Même si ce type d’armement n’est pas sûr à 100 %, une démonstration de force reste le meilleur argument contre la Corée du Nord, envoyant à Pyongyang le message selon lequel les Etats-Unis utiliseront toute la panoplie à leur disposition face à ses provocations. « La force est la seule chose qu’un tyran fou comme Kim Jong-un peut comprendre », conclut Warren Mass.
 

Matthieu Lenoir