C’est un point de vue extrême que le représentant de l’administration Obama a défendu cette semaine devant la Cour suprême des Etats-Unis : interpellé sur le point de savoir si le pouvoir peut exiger que l’Eglise elle-même participe à la couverture des pilules abortives comme il le fait déjà pour les Petites sœurs des pauvres, l’avocat général Donald Verrilli a répondu : « Je pense que nous le pourrions, votre honneur, oui. »
Il était interrogé par le juge John Roberts, qui n’a pas mâché ses mots pour dénoncer le « kidnapping » auquel se livre l’administration Obama en mettant la main sur les plans d’assurance santé privées.
Cela se fait à travers l’« Obamacare » qui contient une règle administrative obligeant les employeurs, qui proposent une assurance maladie à leurs employés, à couvrir des dépenses relatives à l’avortement et à rembourser aussi bien des contraceptifs que la stérilisation volontaire. Le prix à payer est rude en cas de refus puisque les contrevenants sont passibles d’une amende quotidienne de 100 dollars par personne et par jour dès lors que leurs employés n’obtiennent pas cette couverture.
Pilule abortive : les Petites Sœurs des pauvres veulent être exemptées comme l’Eglise
Pour les Petites sœurs des pauvres, qui ont choisi de tenir bon, cela reviendrait à 70 millions de dollars par an de pénalités.
Leur affaire est hautement symbolique. Elle intervient après la décision de l’administration d’aménager le régime des assurances obligatoires après que la société chrétienne Hobby Lobby eut obtenu un jugement favorable devant la Cour suprême reconnaissant son droit de ne pas voir sa conscience violée par l’obligation de financer l’avortement, sur le fondement du droit à la liberté religieuse.
Depuis lors, l’administration a décidé d’exempter les Eglises en tant que telles et de créer des aménagements pour les associations religieuses à but non lucratifs, qui doivent, pour en bénéficier, affirmer leur qualité d’objecteurs de conscience, et surtout mettre à la disposition des employés l’information nécessaire pour qu’ils puissent obtenir directement une couverture de ces actes.
Les Petites sœurs, tout comme d’autres institutions religieuses catholiques ou non, ne veulent pas être obligées à remplir un formulaire obligeant un tiers à payer pour les avortements, ce qui les rendrait complices de l’acte.
La Cour suprême est donc aujourd’hui saisie de la question de savoir si cet aménagement viole les droits religieux des citoyens américains. La réponse de Verrilli montre en tout cas que l’exemption totale dont bénéficient actuellement les Eglises elles-mêmes est des plus fragiles.
L’administration Obama voudrait bien obliger l’Eglise à rembourser l’avortement
De fait, si la Cour devait donner raison à l’Etat face aux Petites sœurs, l’exemption consentie pourrait être dénoncée comme sans objet.
Les défenseurs des Petites sœurs des pauvres soulignent que rien n’oblige l’Etat à faire rembourser l’avortement, la contraception et la stérilisation en faisant en outre peser le poids de ces couvertures à des institutions qui y sont hostiles pour des raisons de conscience. Il y a en effet d’autres moyens d’obtenir individuellement une couverture par le biais de l’Obamacare, tout comme de nombreux Américains ont souvent des systèmes d’assurance distincts pour différents types de soins, comme les prescriptions de médicaments, les lunettes ou les soins dentaires.
Le décès d’Antonin Scalia fait que la Cour suprême est actuellement divisée à 4 contre 4 entre conservateurs et libéraux : en cas de décision sans majorité, les Petites sœurs tomberaient sous le coup des décisions des cours inférieures, qui leur ont été contraires. Si la Cour décide de ne pas juger pour l’instant, et que la nomination d’un nouveau juge est le fait d’un Républicain, il est probable que de toute façon l’Obamacare aura été aménagée en leur faveur rendant l’affaire sans objet. Dans le cas contraire, la dictature du relativisme ne fera que s’accentuer.