Le Capitole de l’Oklahoma échappe à une statue de Satan (Baphomet), mais en ordonnant l’éviction d’une Table des Dix Commandements

Le Capitole de l'Oklahoma échappe à une statue de Satan (Baphomet), mais en ordonnant l'éviction d'une Table des Dix Commandements
 
Au Capitole de l’État d’Oklahoma, se trouvait érigée une Table des Dix Commandements en granit : la Cour suprême vient de décider que ce monument religieux n’avait pas à y être, violant de fait l’interdiction constitutionnelle de l’État sur l’utilisation des biens publics pour le bénéfice d’une religion. Une décision qu’il faut mettre en regard de la proposition quasi concomitante du Temple satanique, qui voulait offrir pour le même lieu un monument de bronze représentant Baphomet (figure de Satan)… La Cour a-t-elle rejeté le premier pour ne pas devoir accepter le second ? Si ce n’est pas la raison invoquée, nul doute que le geste du Temple a joué son rôle. La Table des Dix Commandements avait déjà été fracassée en 2014 par un homme qui avait déclaré avoir agi « sur ordre de Satan ». Là, Baphomet a vraiment remporté la manche.
 

Les Dix Commandements contre Satan au Capitole de l’Oklahoma

 
Le monument avait été proposé par le Temple Satanique (organisation basée à New York) en 2013, soit un an après que le monument des Dix Commandements ait été érigé près du Capitole, après approbation de la législature de l’État de l’Oklahoma, parce que les Tables de la Loi revêtaient une importance historique dans la terre chrétienne d’Oklahoma. De toute évidence, l’idée était d’opposer un contrepoids, qui chasse de façon effective la donnée judéo-chrétienne.
 
Si l’on autorise le message chrétien, impossible aujourd’hui (l’évolution est criante) de rejeter le message satanique, « simplement parce qu’il s’agit d’une opinion religieuse différente ». Selon le porte-parole du Temple, Baphomet est censé symboliser la pluralité et la liberté religieuse. « Nous voyons Satan comme symbole de la révolte contre la tyrannie ». Une figure religieuse anti-religions en somme…
 

La statue de Baphomet est entourée de deux enfants

 
100.000 dollars, 2m60 de hauteur, le bronze représente Baphomet, figure symbolique satanique, assis sur un trône. Tête et pieds de bouc, corps humain, ailes d’oiseau, un caducée lui montant des genoux (signe phallique bien connu) Baphomet fait de ses deux mains le « signe de l’Hermétisme », sa droite montrant le Ciel, sa gauche la Terre : «  Là-haut comme ici-bas », la nature et la grâce se confondent. Et son trône est orné d’un pentagramme inversé, signe démoniaque.
 
Surtout, la bête est entourée de deux petits enfants debout, un garçon et une fille, habillés très classiquement, qui le regardent, la tête en arrière, avec ébahissement et dévotion… Le porte-parole du Temple a expliqué que l’organisation voulait inclure les enfants dans sa sculpture parce que les satanistes sont « très inquiets pour les droits des enfants et le bien-être de l’enfant » ! D’ailleurs, la statue est faite de telle sorte que l’on peut s’asseoir sur les genoux de Baphomet, tels des enfants qui vont y chercher refuge…
 
La figure de Baphomet est bien ancienne – ses origines remontent au 11e siècle. Il est aujourd’hui associé à tout ce qui a trait à l’occultisme, aux rituels de magie, à la sorcellerie, au satanisme et à l’ésotérique. On y a vu une déformation de « Mahomet », un condensé d’abréviations cabalistiques signifiant « le père du temple de la paix entre les Hommes » ou encore un code secret juif renvoyant au mot grec « sophia », « la connaissance ». Ce « sphinx des sciences occultes » comme l’écrivait l’occultiste français Eliphas Lévi est un grand symbole de la recherche herméneutique et ses représentations sont plurielles. Les deux autres caractéristiques essentielles qu’on ne voit pas sur la statue du Temple consiste en ses deux bras androgynes (l’un masculin, l’autre féminin) et ces mots qui y sont gravés, « Solve » et « Coagula », processus alchimique d’une part et processus dialectique de déconstruction/reconstruction d’autre part, bien connu des méthodes démoniaques…
 

Satan, une figure du « magick » : « Il pourrait être Mickey Mouse »

 
Le témoignage du sculpteur qui a travaillé sur la statue pendant cinq mois dans la fonderie de la Floride, est révélateur. Après avoir trouvé la tâche « effrayante », il a commencé à se dire : « pourquoi ne l’aimerais-je pas? ». Puis, après l’avoir regardé tous les jours, il a pensé : « Il est simplement tout ce qu’on veut – il pourrait être Mickey Mouse. »
 
Tout ce qu’on veut, sauf le signe des religions officielles et en particulier de la religion catholique. « Satan se présente comme l’icône ultime de la révolte désintéressée contre la tyrannie, la libre pensée, le rationnel et la poursuite responsable du bonheur ».
 
Élément essentiel dans la représentation de Baphomet, qui figure d’ailleurs sur la statue, la présence de la torche entre les cornes de la Bête : c’est la connaissance, la force vitale, l’illumination intérieure spirituelle qui est seule capable de nous faire réaliser ce que les occultistes modernes appellent aujourd’hui « magick ».
 
Baphomet est bien le visage de la sorcellerie et de la magie noire, l’anti-religion officielle et en même temps religion de Satan, le paganisme d’aujourd’hui qui ne se voit plus seulement chez une « élite » affiliée mais aussi dans les masses populaires.
 
La Bête est là pour venir en opposition systématique aux symboles chrétiens. D’ailleurs, le Temple satanique se tourne à présent vers l’Arkansas où une table des Dix Commandements a été affichée pareillement près du Capitole.
 

Clémentine Jallais