« Embarrassante » : c’est le mot choisi par une cour propre à l’Eglise anglicane pour qualifier une paroisse de son obédience, l’église Holy Cross de Fenham, dans le diocèse anglican de Newcastle. Son tort ? Non, ce n’est pas une histoire de vicaire pris en flagrant délit de conduite immorale, ni même une histoire de chapardage dans la quête, ni même un crime bien anglais à résoudre aux côtés de Miss Marple en buvant un thé bien noir et bien chaud. A l’aune de notre temps, c’est bien pire. Imaginez-vous : le comité de gouvernance de la paroisse, confronté à la nécessité de renouveler le système de chauffage du bâtiment achevé en 1936, a choisi de remplacer sa chaudière à gaz… par une chaudière à gaz. Impardonnable ! La Church of England ne s’est-elle pas engagée à atteindre l’objectif « net zéro » d’ici à 2030 ? En choisissant un combustible « fossile », Holy Cross va continuer de cracher du CO2 dans l’atmosphère.
Et c’est pire que l’hérésie, ou plus exactement c’est un comportement hérétique qui nie le dogme du réchauffement climatique d’origine anthropique. « Embarrassant », en effet, d’attiser les flammes de l’enfer quand on a proclamé vouloir renoncer aux gaz à effet de serre et, en matière de pompes, préférer celles qui extraient les calories de l’air, de l’eau ou de la terre…
La paroisse anglicane qui veut se chauffer au gaz visé par un blâme
Voici donc la paroisse de Holy Cross visé par un blâme, clouée au pilori car il est important que le monde entier connaisse le vice que l’on y pratique : la combustion de gaz proscrits.
Tout a commencé en février dernier lorsque le comité de gouvernance de la paroisse a décidé d’installer une chaudière à gaz plus moderne et plus économique à l’usage. Aussitôt la décision prise, on a réglé un acompte de 17.000 livres (20.400 euros) pour une installation au coût total de 33.000 livres (39.600 euros). L’acompte n’était pas récupérable.
Ce n’est qu’au mois de juin que la paroisse a demandé au diocèse la permission officielle de faire la dépense. Que le juge ait décidé alors que la paroisse avait manqué à ses obligations en omettant de faire valider une dépense de cet ordre, comme c’est la règle, on l’aurait compris. Mais le juge Simon Wood a ajouté que le comité aurait dû « prendre en compte le net zéro » en cherchant plutôt à installer une pompe à chaleur ou un système de chauffage électrique.
Le comité y avait pourtant bel et bien pensé. La pompe à chaleur n’était pas envisageable car le secteur est classé « ceinture verte » et on n’a pas le droit d’y placer de tels engins. L’électrique ? L’addition serait montée à 59.000, voire 86.000 livres (environ 70.800 et 103.000 euros respectivement), selon les devis.
Se chauffer au gaz coûte deux à quatre fois moins cher que les solutions vertes
Le juge Wood a finalement accordé son autorisation rétrospective, assortie, donc, d’un blâme, ainsi que d’une obligation de mettre en place un système de « compensation carbone » pour… expier, sans doute, les émissions de CO2, non sans échafauder un « plan » en vue d’« apporter une contribution significative à l’objectif “zéro émission” ».
Les ministres anglicans locaux se sont montrés agacés par la décision ; pour le Révérend Dr Ian Paul, membre du Synode général anglican et du conseil des archevêques, cela « illustre le problème bien réel de l’affichage de la vertu par ceux qui sont très éloignés des réalités de la vie paroissiale. (…) Le plus grand défi pour l’environnement vient de la croissance de l’utilisation de l’énergie en Chine – et de nos achats de produits chinois – et non de ce qu’une paroisse a pu faire pour maintenir son culte hebdomadaire dans son bâtiment historique ».
Le Rév. Daniel French, vicaire à Salcombe, Devon, a pour sa part dénoncé l’« idéalisme vert de la bureaucratie ecclésiastique ». Et d’envisager que le refus d’adhérer à l’objectif net zéro puisse devenir « le nouveau péché impardonnable contre l’Esprit ».
Sur ce front-là, l’œcuménisme a un boulevard devant lui, puisque Dieu a été commodément mis à l’écart.