Le scénario a un goût de déjà-vu : au Pérou, une petite jeune fille, « Mila » (le prénom a été modifié), 11 ans, est tombée enceinte des œuvres de son beau-père et a servi de détonateur à une polémique politico-médiatique en faveur de l’avortement « thérapeutique » auquel le lobby de la mort estime qu’elle a droit. En Argentine, au Brésil et ailleurs en Amérique latine, où l’avortement demeure illégal dans la plupart des situations dans de nombreux pays, c’est de tels faits que se saisissent les militants, souvent actifs dans des associations internationales, pour faire évoluer la législation et faire apparaître la mise à mort d’un enfant à naître comme un bien et un droit. Quand ce n’est pas le viol de mineure, c’est la santé de la mère qui est invoquée. Et la presse locale et mondiale relaie les faits de manière univoque, où le vrai bien des victimes n’est guère mis en avant.
Dans un premier temps, l’équipe médicale qui a examiné l’enfant a jugé que les conditions n’étaient pas réunies pour pratiquer l’avortement « thérapeutique » que la loi péruvienne autorise dans des circonstances très restrictives. Cela a provoqué une levée de boucliers de la part des féministes péruviennes et notamment de l’ONG Promsex qui assure la promotion de la « santé reproductive » chère aux Objectifs du Développement durable de l’ONU à travers la lutte pour l’accès à la contraception et pour la légalisation de l’avortement.
Mila, petite adolescente, soumise à un avortement à 18 semaines
La directrice de cette association féministe, Susana Chávez, a dirigé la campagne visant à réclamer l’avortement pour Mila, tout en assurant défendre simultanément la mère de la petite, une femme très pauvre et analphabète qui selon Promsex a eu elle-même à souffrir des violences de son concubin, tout comme deux petits frères de Mila âgés de 7 et 3 ans. L’ONG dénonce l’absence de réaction des autorités locales d’Iquitos qui a décidé de placer les trois enfants, ainsi que leur petit frère nouveau-né de 3 mois, en dehors de leur famille. Leur mère a été déclarée « incompétente ». C’est elle qui, avec Promsex, a exigé qu’un avortement fût pratiqué – sous quelles pressions ?
Au terme de cette agitation, la jeune fille, enceinte de 18 semaines, a fini par subir jeudi dernier un avortement tardif (et certainement pas sans danger), pour « éviter un dommage grave ou permanent à sa santé physique et mentale », ainsi que l’affirme un communiqué de l’Instituto Nacional Materno Perinatal. Les autorités ont reculé en faisant intervenir une nouvelle équipe médicale de Lima auprès de l’enfant pour prendre cette décision de mort.
La petite Mila a grandi dans la forêt amazonienne au nord du Pérou, dans une région extrêmement pauvre. Elle s’est présentée le 3 juillet dernier à la police criminelle en accusant son beau-père d’avoir abusé d’elle dès l’âge de sept ans ; auparavant, elle disait avoir subi le même type d’abus de la part de son oncle. Son beau-père a été mis en examen, mais laissé libre faute de preuves.
Les victimes de viols instrumentalisées pour imposer l’avortement
Sordide affaire où le beau-père, échappant à la prison préventive, en aurait profité pour venir menacer de mort sa concubine si elle osait dénoncer ses violences ; c’est du moins ce qu’affirmait Promsex, qui a publié le 8 août un long communiqué pour exiger « protection et application de l’avortement thérapeutique » pour la fillette de 11 ans. Vrai ou faux, la justice péruvienne le dira peut-être un jour. Ce que ces ONG féministes ne dénoncent jamais, c’est le délitement de la famille qui est si souvent à la racine de ce type de faits divers : combien de viols de mineures sont le fait de « beaux-pères » des enfants agressées, à la merci d’un homme qui a remplacé leur père dans le foyer natal !
Le nombre de viols sur mineures signalés aux centres d’urgence pour les femmes s’établit actuellement à une moyenne de 22 par jour ; en dix ans, le pays a compté plus de 12.000 naissances chez des fillettes âgées entre 10 et 14 ans ; 2.552 d’entre elles fréquentaient encore l’école primaire. Les statistiques évoquées par la presse ne disent rien de l’identité des pères, soulignant seulement que les chiffres sont en augmentation. Et l’on parle, pour régler le problème, de l’accès facilité à l’avortement, alors que le problème se situe en amont.
Le Pérou condamné par l’ONU au nom des « droits de l’enfant »
La presse péruvienne met en avant le « stress post-traumatique » avéré de la petite Mila à la suite des viols qu’elle a subis, et on ne doute pas de sa réalité. La première équipe médicale l’avait constaté, mais n’y avait pas vu une raison pour autoriser l’avortement, l’important étant certes d’apporter à cette petite victime une aide sérieuse sur le plan psychologique. Scandaleux, clament les féministes et une presse péruvienne qui leur est largement acquise. Cependant, nul, parmi celles-ci, ne parle du traumatisme que représente un avortement tardif, et des conséquences à long terme que peut avoir une telle opération, qui dans le cas présent semble avoir été imposée à la fillette avec le même mépris de son bien que le viol.
C’est finalement le « Deuxième parquet pénal supra-provincial spécialisé dans les droits de l’homme et l’interculturalité », appelé à la rescousse, qui a engagé une nouvelle enquête préliminaire pour « délit de torture aggravé » à l’encontre de Mila – la torture étant constituée par le fait de nier l’avortement, s’il faut en croire Susana Chávez.
Celle-ci s’est indignée de que ce refus ait pu avoir lieu au Pérou alors que le 23 juin dernier, le Comité des droits de l’enfant de l’ONU a rendu une décision « historique » condamnant le Pérou pour violation des droits à la vie et à la santé d’une autre petite jeune fille, Camila, qui s’était vu refuser l’information sur l’avortement et l’accès à ce dernier. Les juges de Genève avaient eux aussi qualifié ces faits de « torture ».
Où l’on comprend qu’il n’est plus du tout question de « droit » à l’avortement, mais d’obligation faite aux Etats qui osent résister au massacre de l’approuver et d’y collaborer.