Perquisition chez Mélenchon : Macron prépare les Européennes

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Après les Le Pen et le Rassemblement national, c’est la France insoumise de Mélenchon qui est l’objet de perquisitions brutales. Il peut lui aussi s’indigner à bon compte. Macron prépare une digue contre la vague des mécontents : il promeut les deux extrêmes pour limiter la casse.
 
On verra après, mais avant le remaniement, les sondages n’étaient pas brillants pour Macron. Les mécontents sont nombreux en France, les déçus aussi, et, dans la perspective des Européennes l’an prochain, Bruxelles et son poulain Macron ne convainquent ni du côté de l’immigration et de la sécurité, ni de celui de l’emploi et du pouvoir d’achat. Macron craint donc que la vague populiste européenne n’emporte la France. Ça le force à une stratégie subtile.
 

Aux Européennes comme à la présidentielle Macron veut une Marine forte

 
D’un côté, c’est Marine Le Pen qui l’a fait élire, et il compte continuer à s’en servir comme repoussoir pour regrouper et stimuler les siens, c’est-à-dire tout le marais. Il veut mener le combat des « progressistes » contre « la lèpre populiste », et a donc besoin d’un « extrême droite » forte, en bon fils de Mitterrand qu’il est.
 
Mais pas trop. La tension monte en Europe, et, on l’a vu en Italie, cela peut déborder les limites prévues, posant problème au Système. Or la configuration des Européennes est idéale pour Marine Le Pen. Elle est la seule à tenir un discours à la fois eurosceptique et anti-immigration. Les autres sont bruxellophiles ou partisans de l’accueil. Même Mélenchon, sous ses gros mots de tribun, cache un discours très comme il faut. 
 

Booster Mélenchon divisera les mécontents

 
Restait à susciter des concurrents au RN. Mais Philippot fait flop et Dupont-Aignan stagne. Alors ? Mélenchon s’étant composé un personnage de rebelle bien qu’il soit un Rocard’s Boy, professionnel de la politique institutionnelle et pur produit de l’appareil socialiste, Macron a décidé d’en jouer. Il faut en faire un Robin des bois. Une victime de l’Etat et de sa force injuste. Le public adore ça. Ainsi va-t-il monter en flèche, et le mécontentement populaire, en se divisant, s’amoindrira. Deux petites vagues ne font pas un raz de marée. Et puis cela permettra une jolie rhétorique de la raison et de la démocratie contre les extrêmes. Tous les amateur.trice.s de juste milieu en pleureront d’émotion.
 

Grâce à la perquisition, Mélenchon devient l’homme de la république et du peuple

 
Le coup de la perquisition est génial. Il faut du spectacle. La perquisition au Modem, l’an dernier, avait manqué de gnaque. Tout est modéré au Modem, même le soupçon de crime et la promesse de châtiment. Pour la France insoumise, Macron a poussé la sono à fond. On trouve toujours un petit juge qui fait de la muscu, un officier de police judiciaire qui se voit en héros. Côté Mélenchon ça va tout seul. Pas besoin de lui écrire ses répliques. Il sort son grand cinéma. La perquisition de son QG étant en cours, il entre en scène : « Enfoncez la porte, camarades! On va voir si on va m’empêcher d’entrer dans mon local. La République, c’est moi, c’est moi qui suis parlementaire. » Ou encore : « Ne me touchez pas ! » Même Patricia Carli n’aurait pas trouvé mieux.
 
C’est grand. Mélenchon est suivi par la justice pour plusieurs affaires, tant personnelles que relatives à ses assistants parlementaires, se soustrait aux convocations, mais il a en l’espèce raison : la justice, en procédant par perquisition, agit avec brutalité et s’invite dans l’action politique, sans respecter l’indépendance des pouvoirs. Sans parler de la présomption d’innocence, la justice n’a pas à connaître la façon dont le député dépense une indemnité qui lui est allouée, surtout sur un soupçon de soupçons.
 

Une perquisition bien préparée, une réaction bien jouée

 
Donc, Edouard Philippe, qui s’est félicité de la perquisition, et Emmanuel Macron, ont offert sur un plateau à Mélenchon l’occasion d’incarner la « République » et la « Résistance » face aux exactions d’un Etat qui mélange les pouvoirs. 
 
Mélanchon avait à se faire pardonner par l’électeur son passé socialiste et ministériel : il interpelle le garde des sceaux, Nicole Belloubet, naguère rectrice de l’académie de Toulouse au début des années 2000. Lui rappelant qu’il était son « ministre » et son « ami », il lui fait « honte » et rompt ainsi avec ce passé. 
 
Il s’était discrédité par son entrevue « fortuite » avec Macron à Marseille, il le traite au passage de « petit personnage ». Voilà, dans le bruit et la fureur il s’est refait une virginité. Cartouche est de retour, notre théâtre national populaire va pouvoir l’opposer au Zorro du Rassemblement national, et, si Allah veut, Macron mènera les progressistes sinon à la victoire, du moins à l’absence de désastre aux Européennes.
 

Pauline Mille