Poutine et Merkel se mettent d’accord pour l’envoi de casques bleus dans toutes les zones de l’Ukraine de l’Est

Poutine Merkel Ukraine casques bleus
La chancelière allemande Angela Merkel et le président russe Vladimir Poutine, lors de leur dernière rencontre en mai 2017. Les deux dirigeants ont évoqué la possibilité d’étendre l’action des Casques bleus de l’Onu au Donbass

 

Il se fait vraiment tout doux, le « méchant » Poutine… Après avoir joué le rôle du calme et avisé diplomate face à la bombe atomique coréenne et l’offensive vitupérante de Trump, et même appelé à une intervention de l’ONU, il remet le couvert pour la Crimée, enfin… l’Ukraine. Un coup de téléphone avec Angela Merkel, et il est décidé l’envoi de casques bleus dans tous les coins de l’Ukraine de l’Est – et pas seulement sur la ligne de démarcation. Pas une portion ne pourra y échapper, pas même celles par lesquelles, dit-on, la Russie « ferait » passer ses armes…
Vraiment, il est pour le consensus – il faut sauver la paix.
 

Des casques bleus en Ukraine ? et c’est une idée russe….

 
En fait, c’est même tout seul, la semaine dernière, et pour la première fois, que Poutine s’est déclaré favorable à l’envoi de casques bleus légèrement armés dans l’est de l’Ukraine, afin d’assurer la sécurité des observateurs de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), les forces de maintien de la paix.
Le 5 septembre, la Russie a déposé un projet de résolution au président du Conseil de sécurité de l’ONU en ce sens, pour aider à « régler le problème » dans la région – Poutine l’avait déjà évoqué lors d’une conférence de presse au sommet des BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud) quelques jours auparavant.
Un projet réclamé depuis longtemps par Kiev, en proie à un conflit civil où les autres puissances internationales jouent leur rôle, depuis 2014, entre forces gouvernementales et séparatistes pro-russes. Et non moins attendu par la gent politique européenne, en particulier Berlin depuis longtemps favorable au déploiement d’une « mission armée robuste de l’ONU »…
La chancelière allemande s’est donc empressée de joindre, lundi, Poutine, dont elle salué l’initiative et même obtenu davantage.
 

Poutine a « réagi positivement » aux suggestions de Merkel

 
Au départ, Vladimir Poutine avait estimé que ces casques bleus ne devraient intervenir que le long de la ligne de démarcation séparant les forces de Kiev des rebelles du Donbass : « Ils doivent se situer, dans ce but, sur la ligne de démarcation et à aucun autre endroit ». De plus, leurs fonctions devaient être soigneusement limitées à « la sécurité des observateurs de l’OSCE ».
Et bien toutes ces « restrictions » russes sont, comme par enchantement, parties en fumée « grâce » à l’entretien téléphonique avec Angela Merkel.
D’abord, Poutine « a levé la limitation du déploiement de la mission de l’ONU », a indiqué le communiqué de la Chancellerie allemande. Il peut désormais avoir lieu « non seulement sur la ligne de démarcation, après le retrait des forces et du matériel militaire des deux camps, mais également aux autres endroits où les observateurs de l’OSCE mènent leurs inspections », en bref dans toutes les régions où ils veulent opérer.
Il s’est même dit, ensuite, « prêt à élargir les fonctions de la mission de l’Onu évoquées dans le projet russe de résolution du Conseil de sécurité de l’ONU ».
 

Une image de marque au sein de la communauté internationale

 
Il faudra modifier le mandat de l’ONU, pour ce faire ? Poutine acquiesce – quel gentil Poutine, décidément… Le ministre allemand des Affaires étrangères a qualifié cette décision russe de « premier pas juste ». Si cette nouvelle mission réussissait à provoquer un cessez-le-feu durable, cela pourrait devenir, selon lui, une première étape vers la levée progressive des sanctions anti-russes…
Comme il en avait discuté avec les présidents français, allemand et ukrainien, le 24 juillet dernier, Poutine est également revenu sur les accords de Minsk, lors de l’entretien avec Merkel – actuellement, quelque 600 observateurs de l’OSCE sont chargés de contrôler le respect des accords de paix. Ils ont souligné que toute violation du cessez-le-feu dans l’Ukraine de l’Est par n’importe quel côté est « inacceptable », comme l’a rapporté le communiqué du Kremlin. Poutine se taille véritablement une image de dirigeant international de poids, pour la paix et le consensus.
 

Une proposition de Poutine jugée « étrange » par le président ukrainien

 
Côté pays, la situation diffère… Si les représentants des républiques populaires autoproclamées de Donetsk et de Lugansk ont déjà exprimé leur disponibilité et leur volonté de dialoguer sur la question, Kiev est réticente à soutenir l’initiative.
D’abord, les responsables ukrainiens ont déclaré que Kiev n’accepterait jamais de coordonner les détails de la mission avec les républiques autoproclamées, car cela signifierait, quelque part, leur « légalisation ». Et puis comme l’a déclaré le président ukrainien Petro Poroshenko, le 7 septembre, « le but de la mission ne devrait pas être la préservation de l’occupation russe et la légalisation de la présence militaire russe, mais une paix durable »…
Pourtant sa demande de patrouille potentielle dans tous les secteurs du conflit, a été exaucée… Il concède de discuter, donc, à l’ONU, de cette proposition poutinienne qu’il juge – il faut retenir le mot – « étrange ».
Étrange parce qu’irréelle, non réaliste ? Poutine a ses intérêts dans les deux camps – dialectique toujours.
 

Clémentine Jallais