Le recours au privé pour gérer les aides sociales, une idée utile que le Kentucky et l’Illinois veulent appliquer

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A l’avant-garde de la révolution conservatrice, l’Etat du Kentucky entreprend une vaste réforme de l’aide sociale et de son système de pensions, désirant externaliser la gestion de ses aides sociales à des entreprises privées pour fournir de meilleures prestations à moindre coût. Une solution limitée, pour les aides fédérales, par la législation actuelle mais qu’un projet de loi tente de débloquer. En janvier, le Kentucky était déjà devenu le premier Etat américain à exiger des heures d’activité pour accorder l’assistance médicale gratuite Medicaid. Les conseillers du gouverneur Matt Bevin, Républicain pro-vie élu en 2015 par surprise face au Démocrate Jack Conway, estiment que la moitié des 350.000 bénéficiaires locaux de l’assurance maladie Medicaid remplissent déjà la nouvelle exigence de 80 heures d’activités par mois, y compris comme bénévole ou en formation qualifiante. Handicapés, personnes âgées, enfants et femmes enceintes ne sont pas concernés. L’administration estime que cette condition permettra à l’Etat fédéral et au Kentucky d’économiser 2 milliards de dollars sur cinq ans. Matt Bevin commente : « Pourquoi une personne en âge de travailler ne pourrait-elle pas se voir exiger quelque chose en échange de ce qui lui est offert ? »
 

Faire appel au secteur privé pour optimiser les aides sociales : le Kentucky y songe

 
Adam Meier, chef de cabinet adjoint du gouverneur, estime dans un entretien avec le site Breitbart que cette réforme ne suffit pas. Il demande que les Etats fédérés puissent plus facilement faire appel au secteur privé pour optimiser les aides sociales : assistance temporaire aux familles nécessiteuses (TANF), assurance santé pour les enfants (CHIP), assistance alimentaire (SNAP), bons alimentaires. Se référant au principe de subsidiarité, Adam Meier dit à Breitbart que « les Etats sont les plus compétents pour gérer leur propre force de travail ». Il explique : « Avec les retraites et les charges statutaires, employer un fonctionnaire coûte très cher pour le même service. Les contrats (avec le privé) peuvent comporter des objectifs à atteindre, comme le temps d’attente à un service téléphonique ou le nombre de demandes traitées. Souvent, un service privé peut atteindre des objectifs qu’un personnel fonctionnaire ne peut pas atteindre au même coût. Enfin, on peut demander à un même contractant privé d’effectuer son travail d’attribution des aides pour plusieurs programmes, ce que nos technologies permettent mais que les politiques fédérales interdisent ».
 
Pour Meier, « Les contractants privés peuvent être plus efficaces dès lors que l’Etat peut imposer des objectifs de performance » alors qu’il « est difficile d’accorder des primes de rendement ou des pénalités » aux fonctionnaires.
 

Le privé se voit imposer des règles strictes pour les refus d’attribution de Medicaid ou de SNAP

 
Les autorités publiques garderaient la haute main sur plusieurs programmes sociaux. Les contractants privés se verraient imposer les règles les plus strictes sur les refus d’attribution de Medicaid, de l’assurance chômage et de l’assistance alimentaire (SNAP). Les délégataires de service public ne pourraient généralement pas décider de l’éligibilité des demandeurs. L’Etat du Kentucky a déjà fait appel au privé pour les programmes Emploi-Formation, passés d’une agence publique à l’entreprise Workforce Innovation Boards (WIBs), qui recrute elle-même des contractants pour fournir des formations. « Nous veillons toujours à fournir de meilleurs services à un coût moindre », a commenté Meier ajoutant que « Si une plus grande flexibilité est permise aux Etats fédérés, nous verrons comment et jusqu’où nous pourrons l’utiliser. » Il a demandé, à la chambre des Représentants à Washington, que le Congrès « accorde aux Etats pleine liberté et autorité pour déléguer le service public sur l’ensemble des programmes sociaux », pour partie fédéraux.
 
Pour Robert Doar, de l’American Enterprise Institute, spécialiste de la pauvreté, « On impose que l’éligibilité aux bons alimentaires soit déterminée par des fonctionnaires, ce qui a limité fortement le recours au privé dans ce secteur ». « Meier estime qu’il faut plus de liberté sur ce point, et je n’ai pas d’objection », ajoute-t-il, car « il serait très rentable de permettre aux entreprises contractantes de travailler sur plusieurs programmes à la fois ».
 

Une proposition de loi pour permettre au privé de limiter les coûts de la bureaucratie, confirmée en Illinois

 
Représentant républicain de Géorgie, Buddy Carter avait confirmé que le recours à des services privés pour établir l’éligibilité d’un demandeur au Medicaid « permettrait de baisser les coûts en éliminant les erreurs, la fraude et les abus ». Carter a co-signé une proposition de loi en ce sens intitulée « Liberté d’usage d’entités par contrat », qui permettrait à des entreprises privées de déterminer l’éligibilité au nom de l’Etat pour le Medicaid, limitant les coûts des bureaucraties publiques. Récemment, l’Illinois a fait appel à des contractants privés pour confirmer l’éligibilité au programme Medicaid de l’Etat, ce qui lui a permis de limiter les coûts et la fraude et d’économiser des millions de dollars. Les contractants ont mis en évidence que des aides étaient fournies à des personnes décédées, que les numéros de sécurité sociale n’étaient pas vérifiés, et ont prôné la radiation de la moitié des 5.000 cas étudiés. Malheureusement, les syndicats entreprirent une procédure pour interdire à l’Etat d’avoir recours au privé, débouchant sur la censure du contrat par un juge. Selon les projections d’Illinois Policy, le contribuable aurait pu économiser de 390 à 430 millions de dollars par an si la collaboration avec le privé avait pu continuer, soit 2 % du budget Medicaid.
 

Matthieu Lenoir