Ils ne veulent rien lâcher. Au Royaume-Uni, les manœuvres des européistes pour tenter de faire dérailler le Brexit continuent. Un rapport de la haute administration du Trésor, qui a étrangement fuité dans les médias, affirme que la Grande-Bretagne prévoit l’apocalypse en matière de croissance si elle quitte l’Union européenne, quel que soit le scénario de modélisation. Sa publication a suscité une violente protestation des eurosceptiques, parlementaires ou ministres, contre le Chancelier de l’Echiquier Philip Hammond, l’un d’eux ironisant sur des prédictions qui « rendent l’astrologie respectable ».
Cette analyse de Whitehall, siège du gouvernement britannique, affirme que la croissance économique chuterait de 5 points durant les quinze prochaines années si le Royaume-Uni quitte effectivement l’UE tout en conservant un traité de libre-échange avec elle, et de 8 points s’il la quitte sans accord. Il prétend aussi que si le pays maintient sa seule appartenance au Marché unique, la croissance serait inférieure de 2 points.
Steve Baker, sous-secrétaire d’Etat voit dans ce rapport fuité « une tentative pour saboter » le Brexit
Steve Baker, pro-Brexit, sous-secrétaire d’Etat pour la sortie de l’Union européenne, a répliqué que les prévisions gouvernementales étaient « toujours fausses » et affirmé que la fuite du document « constitue une tentative pour saboter notre sortie de l’UE ». Ce papier « n’est en rien endossé par les ministres » et « l’équipe ministérielle de mon département n’a été consultée à son sujet que ces tout derniers jours », ajoute-t-il, précisant : « Nous avons clairement signifié qu’il imposait des travaux plus complets. » David Davis, Secrétaire au Brexit, n’en a pris connaissance que lundi soir. Steve Baker a ajouté que cette étude « ne prend pas en compte les opportunités présentées par une sortie de l’UE » et souligne avec ironie qu’elle « suscite un scepticisme bienfaisant au sujet de l’usage des mathématiques économiques ».
La haute fonction publique europhile du ministère du Trésor est visée. Philip Davies, élu conservateur eurosceptique aux Communes, accuse les fonctionnaires : « Nous avons ici dans l’administration quelques eurobéats furieusement londoniens qui ne veulent à aucun prix que nous quittions l’UE, et rassemblent quelques données louches pour plaider leur cause. » Oliver Robbins, un des hauts fonctionnaires les plus gradés du secrétariat au Brexit, serait très impliqué dans l’affaire. Le ministre Philip Hammond aurait demandé à son équipe que le débat sur l’avenir de l’Union européenne soit nourri d’études sur les impacts économiques globaux, indique le Daily Telegraph.
Iain Duncan Smith : « Pratiquement toutes les prévisions se sont révélées totalement fausses »
Theresa May, premier ministre, a fait savoir à ses ministres que l’étude ne représentait qu’une ébauche de travail qui n’avait pas été validée. L’ancien dirigeant conservateur Iain Duncan Smith a souligné lui aussi que « pratiquement toutes les prévisions issues du gouvernement et des principales organisations internationales s’étaient révélées complètement fausses ».
La fuite surprenante de ce document confidentiel, par Buzzfeed News, a déclenché immédiatement une chasse au coupable. L’étude était à l’origine destinée à être produite confidentiellement auprès des principaux ministres, des règles strictes en vigueur étant censées éviter toute fuite. Or les journalistes en ont eu connaissance dans les quelques heures qui ont suivi la réunion où elle a été présentée. Duncan Smith souligne que le timing de cette fuite – les négociations sur le Brexit ont atteint une étape critique –, est « suspect ».
Une source ministérielle a désigné « Jeremy Heywood », patron de la Fonction publique, « à la manœuvre avec le Trésor dans une opération destinée à pousser les ministres à accepter un Brexit limité », rapporte le Daily Mail. Une analyse confirmée par de hauts fonctionnaires issus de plusieurs ministères, Trésor inclus.
Le Trésor britannique lance une nouvelle « Grand peur » en annonçant l’apocalypse pour l’économie britannique en cas de Brexit
Jacob Rees-Mogg, président de l’European Research Group, groupe réunissant les députés conservateurs pro-Brexit, a qualifié l’étude de « hautement spéculative », soulignant que des modélisations de même type produites par le Trésor avant la tenue du référendum sur le Brexit, qui prévoyaient des destructions d’emplois massives dès le lendemain d’un vote en faveur d’une rupture avec l’UE, avaient été « totalement démenties » par les faits.
La fuite des conclusions de ce document survient alors que les conservateurs favorables au Brexit s’inquiètent des dernières exigences émises par Bruxelles. L’UE veut maintenir le Royaume-Uni comme sujet de la législation européenne durant un période de 21 mois après la rupture.
Au moment où le modèle protecteur développé à Washington par Donald Trump porte ses fruits, contraignant jusqu’au très globaliste Economist à reconnaître son efficacité, ces prédictions apocalyptiques des caciques européistes londoniens soumis à ceux de Bruxelles peuvent aussi être interprétées comme un tir de la dernière chance.