Les médias, cauteleux, appelaient mardi matin à la « prudence » dans l’analyse de la « prise d’otages » de Saint-Etienne-du-Rouvray, à quelques kilomètres de Rouen. Mais ce n’était pas une prise d’otage. Deux hommes hurlant des « cris à caractère religieux » et « islamiste » comme l’a déclaré la religieuse qui a réussi à se sauver et à donner l’alerte ont fait irruption du côté de l’autel à l’heure où le prêtre auxiliaire de la paroisse, l’abbé Jacques Hamel, célébrait la messe de la sainte Anne devant une poignée de fidèles. Mais c’est en tant qu’« infidèle » qu’il a été égorgé, aussitôt, et en haine de la foi catholique. Cela a fini par devenir tellement évident que François Hollande, le premier, sur place, a parlé d’attentat, d’islamisme et de Daesh.
On ne sait quelle était l’attitude du P. Jacques Hamel, 86 ans, à l’égard de cet islam qui l’a assassiné. Vu son âge, il y a des chances qu’il ait été atteint par le discours lénifiant sur le dialogue inter-religieux. Mais sa mort au moment de célébrer le Saint Sacrifice est un symbole et une réalité qui efface tout cela. Les islamistes ont fait de cette mort un martyre. Le sang versé l’a été au nom d’Allah, quoi qu’en disent ceux qui ont peur « d’allumer » une guerre de religion dont ils refusent de reconnaître qu’elle n’a non seulement déjà été déclenchée, mais qu’elle s’inscrit dans une histoire déjà longue de persécutions et même de génocide. Qu’en pensent les Arméniens de France ?
Le martyre du P. Jacques Hamel, prêtre égorgé alors qu’il célébrait la messe
Oui, les deux terroristes, criant la grandeur d’Allah et brandissant leurs chapelets en même temps que leurs couteaux, étaient là pour tuer. Ils ont peut-être laissé de côté les trois ou quatre religieuses – grisonnantes elles aussi ? Selon une source policière, c’est pourtant une religieuse qui a été attaquée à l’arme blanche elle aussi, égorgée et laissée entre la vie et la mort. Deux autres paroissiens ont été blessés. Les « preneurs d’otage » ne demandaient rien. Ils n’avaient pas de revendication. Pas d’autre volonté que celle de supprimer du chrétien, acte en soi méritoire et qui leur a permis de sortir tranquillement à l’arrivée des forces de l’ordre, pour attendre eux-mêmes la mort. Ils ne craignaient pas pour leur vie : c’est ce qui les rend si dangereux. Peut-être signalera-t-on plus tard qu’ils étaient shootés au Captagon – mais l’islam radical, celui des racines et des débuts comme d’autres époques de l’histoire, suffit.
Selon leur croyance, l’enfer attendait leurs victimes. Pour eux, c’était le paradis d’Allah, avec ses délices et ses vierges. (On s’étonne parfois de ce que les terroristes de l’Etat islamique s’autorisent des écarts par rapport à la morale et à leurs interdits – mais ce n’est qu’avance sur hoirie – sur hourie… Puisqu’ils mourront martyrs !)
C’est toute la différence avec la foi catholique : le Christ demande aux siens d’aimer leurs ennemis, leurs persécuteurs. C’est-à-dire : de vouloir leur salut et d’être prêts jusqu’à donner leur vie pour la rédemption des tueurs eux-mêmes… Scandale et folie de la Croix. Mais Il a donné l’exemple. Et Il a dit : « Heureux êtes-vous si l’on vous persécute. »
A Saint-Etienne-du-Rouvray, un jeune homme fiché S tue des catholiques
Voilà pourquoi le discours sur la « guerre de religion » est fondamentalement faux, nonobstant les écarts des hommes. La foi révélée par le Fils de Dieu Lui-même n’appelle pas à la vengeance, mais au pardon, à l’évangélisation et à la conversion – seuls moyens de sortir du cercle vicieux d’une haine qui ne nous est pas permise.
Mais ce n’est pas un langage de démission. On apprend que l’ancien curé de Saint-Etienne-du-Rouvray, l’abbé Pierre Belhache, est responsable du « dialogue avec les musulmans » : interrogé par Normandie Actu, il a appelé à « ne pas faire d’amalgame ». C’est absurde. C’est voler à la victime son martyre. Seule la vérité peut rendre libre : le chrétien, comme le musulman – appelé lui aussi au salut et à qui l’on refuse aujourd’hui tristement de lui faire la charité de lui dire qu’il est dans l’erreur !
L’acceptation du martyre, sans haine et jusque dans la volonté de s’associer à son Sacrifice suprême, est le propre du vrai disciple de Jésus. Cela ne veut pas dire qu’il faut laisser le troupeau des chrétiens offert aux crocs du loup. Aux pasteurs le devoir de leur enseigner le vrai et de tout ordonner à l’amour du Christ ; aux gardiens de la cité de mesurer les dangers et de leur assurer une terre paisible où croître dans la foi et dans la sainteté.
Les gardiens de la cité, qu’on le veuille ou non, s’appellent aujourd’hui Hollande, Cazeneuve, Valls… Ils ont gravement failli. Ils continuent de présenter le risque de l’« amalgame » et de la rupture de l’« unité nationale » – « Il faut faire bloc ! » – comme presque plus grave que l’atrocité qui a été commise à Saint-Etienne-du-Rouvray, après celles de Nice et du Bataclan, de toutes ces attaques qui, elles, n’hésitent pas à faire l’amalgame entre la décadence de l’Occident et la foi au Christ.
La haine de la vraie foi, un moteur de l’islamisme
Mais ce sont eux (et ceux qui les ont précédé) qui ont délibérément et malgré des avertissements répétés ouvert les frontières à une population plus ou moins radicalement islamique, mais en tout cas capable d’abriter et de cacher par son nombre, comme la forêt cache les arbres, les fous d’Allah.
Ce sont eux qui ont laissé évoluer en liberté un suspect fiché S jusqu’à aller couper la gorge d’un vieux prêtre. Natif de Saint-Etienne-du-Rouvray (mais ce n’est pas une raison pour le qualifier de Normand) il a tenté de partir pour la Syrie l’an dernier selon des sources sérieuses, avant d’être refoulé par la Turquie. A son retour, il avait été mis en examen pour association de malfaiteurs en lien avec une entreprise terroriste et placé en détention provisoire. Puis il a été libéré et placé sous bracelet électronique, ce qui a dû lui faire une belle jambe, lui qui ne craignait ni la guerre ni la mort…
Au service des terroristes il y a une incurie criminelle qui ne s’explique pas seulement par la volonté de respecter l’« état de droit ». Si le pouvoir politique en avait pris les moyens, ce terroriste-là au moins aurait pu être coffré. Et peut-être l’abbé Hamel serait-il encore en vie.
Mystérieusement, son sang versé va peut-être laver ces fautes et ces trahisons d’un pouvoir plus soucieux de rester en place que de protéger les honnêtes gens, et qui lui aussi agit si souvent en ennemi de Dieu, au service d’une autre culture de mort.
On récolte ce qu’on a semé. A vue humaine, il n’y a guère de raison de prévoir que les tueries s’arrêtent. Mais les martyrs, les vrais, sont semence de chrétiens. Voilà notre espérance.
Anne Dolhein