Suicide républicain au nom des valeurs « humanistes »

Suicide Républicain Valeurs Humanistes
 

La dissolution décidée par Emmanuel Macron n’a pas touché seulement l’Assemblée nationale, mais aussi les partis de droite. Reconquête a explosé au terme d’un bureau politique mouvementé qui en a vu partir, à l’exception de Zemmour, ses principales vedettes, Marion Maréchal en tête, qui venait pourtant d’assurer sa victoire aux Européennes. Quant aux Républicains, après un énième échec qui achève une descente aux enfers commencée avec l’échec de François Fillon à la présidentielle de 2017, ils viennent d’acter leur suicide. Alors que leur président Eric Ciotti venait de passer un accord avec le Rassemblement national pour sauver les meubles, les principaux caciques se sont réunis pour l’exclure en urgence. Eux qu’on présente souvent comme des modérés rompus aux habiletés politiciennes, ils ont agi avec une vigoureuse promptitude. Au nom de la morale. Des valeurs. Il fallait à tout prix empêcher une union des droites permettant la défense des intérêts de la nation. Les grands apparatchiks républicains sont là pour faire advenir un avenir mondialiste conforme aux valeurs « humanistes ».

 

Un putsch républicain au nom des valeurs

On s’est tous trompés. On les prenait un peu pour des mous du bide, des amateurs de tripatouillages et de magouilles propres à récolter de grasses prébendes. Pas du tout. Ce sont de fausses méduses et de vrais durs. Des anciens romains droits dans leurs bottes, terriblement portés sur la vertu. Pour empêcher le pire, l’inacceptable, i.e. la main tendue par Ciotti à l’infréquentable Bardella, ils sont allés jusqu’au suicide. Ils ont préféré organiser leur explosion en direct à courir la chance d’une alliance avec le RN. Même au mépris de la loi, tant il y avait urgence : ils ont convoqué un bureau politique, ce que seul le président peut faire (il a d’ailleurs saisi la justice). C’est la morale qui leur commandait ce putsch, leurs mots le disent. Valérie Pécresse et Xavier Bertrand ont dénoncé un « traître ». Renaud Muselier a parlé « d’infamie ». Christian Estrosi a déploré « l’opportunisme » de son frère ennemi des Alpes maritimes, et Dieu sait qu’il s’y connaît en la matière, lui qui passa de Le Pen père à Macron. Bruneau Retailleau a prêté un « but personnel » et Michèle Tabourot des « ambitions personnelles » à Eric Ciotti. Ont été dénoncées aussi les « combinaisons d’appareil » et les « alliances contre nature ». A quoi Laurent Wauquiez veut opposer la « voix d’une droite républicaine indépendante ».

 

Punir le peuple qui vote contre les valeurs humanistes

Que veulent dire les mots « républicain » et « indépendant » ? Eh bien, que l’on respecte certaines valeurs dites aujourd’hui « démocratiques », alors qu’elles ne le sont pas, puisqu’elles ont pour fonction d’empêcher la voix du peuple de s’exprimer politiquement. Le peuple français vient de dire, aux élections européennes, qu’il ne faisait plus confiance à ses élites et à leur projet européo-mondialiste « humaniste », maçonnique et arc-en-ciel. Son cri a été assez net et Eric Ciotti, sans doute pour sauver sa place, avait décidé de l’écouter. Las, c’est une rupture historique du grand tabou auquel Mitterrand et Chirac ont soumis les droites en 1984. Pas d’alliance avec « l’extrême droite » ! A ceux qui lui demandaient pourquoi il refusait de s’allier au Front National pour vaincre la gauche, ce qui lui aurait permis d’être élu président dès 1988, Jacques Chirac répondit : « Nous n’avons pas les mêmes valeurs. » Cela faisait sourire dans la bouche de ce grand démagogue cynique et manipulateur qu’était Chirac, mais c’était tout de même vrai.

 

Chirac, maçonnerie et suicide politique

Pétri d’humanisme « laïque », Chirac entendait promouvoir en douceur un monde sans frontière et liquider la « France d’hier ». Il en va de même des caciques actuels des républicains, qui se nourrissent aux mêmes sources intellectuelles, morales et spirituelles. Des sources maçonnes. Certes le RN de Bardella et MLP est lui aussi infiltré de maçons, tout mouvement politique l’est : mais son projet n’est pas maçon, et cela suffit à susciter la mobilisation totale et l’action immédiate de l’appareil de contrôle du parti de « droite républicaine et indépendante », quelle que soit l’opinion des militants et l’intérêt du pays. Fait significatif, l’exclusion de Ciotti a été votée à l’unanimité. Et François-Xavier Bellamy, le philosophe catholique qui mène le parti aux européennes depuis cinq ans, a été nommé président par intérim. Il faut toujours un paravent aux opérations les plus douteuses. Je l’ai croisé un jour. Il semblait avoir la foi, et un certain courage. J’ignore s’il est vraiment armé pour faire de la politique. Il vient de dire qu’en cas de duel Front Populaire/RN, il voterait RN pour « empêcher que la France insoumise arrive au pouvoir ». Espérons qu’il ne sera pas exclu.

 

Extrémiste antisémite, ce n’est pas grave si on est humaniste

Cette question des valeurs, qui a précipité la métamorphose des jouisseurs républicains en hommes de fer, est fondamentale. Revenons-y en conclusion car elle gouverne toute la politique française. Mon excellent confrère Yves Thréard a donné un éditorial dans le Figaro intitulé « Le vrai Front de la honte » où il note que nul ne s’indigne, et qu’aucun des patrons des partis de gauche n’a été démis de ses fonctions, après que le nouveau « Front populaire » a été constitué. Or « les gauches dites irréconciliables » se sont remises ensemble pour se partager les circonscriptions. Cette « tambouille » n’a choqué personne. Les partis, qui se battaient « comme des chiffonniers » oublient insultes et divergences de programme : hier on montrait du doigt LFI pour ses sorties « antisémites » et son « antiparlementarisme », aujourd’hui, elle se taille la part du lion. Thréard parle d’« indécence ». Il est naïf. L’extrême-gauche la plus folle et la plus sectaire est du bon côté des valeurs : elle prône la société sans frontière et la fin de la France d’hier, elle est fondamentalement humaniste, donc l’union des gauches est permise, pas celle des droites, à cause du diable national.

 

Pauline Mille