Tapisserie sataniste à Davos ? La très dérangeante décoration au Forum économique mondial

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Une imposante tapisserie de l’artiste britannique Grayson Perry, travesti flamboyant à l’œuvre quelque peu dérangée, ornait la salle à manger réservée aux grands de ce monde lors de la dernière réunion en date du Forum économique mondial à Davos. Large de quinze mètres, haute de trois, la Walthamstow Tapestry a été présentée en ligne par une journaliste « infiltrée », Larry Alex Taunton, qui a eu accès au film de l’œuvre devant laquelle a notamment posé l’ancien Premier ministre britannique, Theresa May. La tapisserie prétend décrire les sept âges de la vie dans un contexte consumériste : comme dans bien des productions de l’« art » contemporain, des noms de marques y sont présents (mais ici c’est à foison), ainsi qu’une imagerie religieuse détournée, chrétienne pour l’essentiel. L’œuvre fait désormais le buzz sur les réseaux sociaux où de nombreux internautes s’interrogent sur son caractère sataniste.

Et il y a de quoi, comme on peut le constater sur cette présentation détaillée de la Walthamstow Tapestry.

La tapisserie se « lit » de gauche à droite et s’ouvre sur l’image d’une vieille femme nue donnant naissance à un bébé rouge sang, sang qui se prolonge en une sorte de rivière qui parcourt toute la largeur de la scène pour aboutir dans la gueule d’une tête de démon à laquelle deux rois (ou mages) orientaux présentent une carafe précieuse et une tiare, tandis qu’une princesse lui tend un petit enfant.

 

La tapisserie utilisée comme décoration à Davos présente Satan comme l’aboutissement du voyage humain

Un chemin jaune, apparemment moins douloureux, part également de la parturiente et traverse lui aussi la tapisserie tissée selon la technique Jacquard, mais croise et recroise le chemin de sang et finit par se joindre à lui pour finir avalé par l’image du démon. C’est sur ce chemin jaune qu’on trouve une vilaine petite fille tenant dans ces mains une sorte de poupée christique, un jeune homme auréolé tenant un poignard, et une chapelle ; au-dessus de celle-ci, sur le chemin de sang, un évêque semble baptiser un roi – Clovis ?

Le point focal, au centre de l’œuvre, montre une femme portant un foulard de soie sur la tête et tenant de ses mains cruelles comme son bien le plus précieux un sac à main de couturier : Grayson Perry l’appelle « la Madone au sac à main ».

Enfin, à droite de la scène finale montrant Satan engloutissant la vie de tous les hommes et femmes de tout rang qui traversent le tissu – touristes, pèlerins, ménagères, religieuses, chevaliers, motocyclistes, ivrognes, aviateurs, familles, amoureux, aveugles, soldats, hommes d’affaires, pendus, paysans et cowboys, et même un terroriste qui s’apprête à se faire sauter, bref, tout le monde – se trouve un homme nu, visiblement mort, étendu sur une sorte de drap décoré. C’est une référence évidente à L’Homme des douleurs debout près d’une colonne d’Albrecht Dürer.

 

Les choix artistiques et spirituels du Forum économique mondial vont dans un sens très précis

Toute l’imagerie utilisée par Grayson Perry est une mise en cause des croyances futiles de l’humanité, aussi futiles que les nombreux noms de marques commerciales, omniprésentes : c’est la mise en scène d’une désespérance que rien ne peut détruire, ni la joie, ni la peine, puisque tout aboutit à une même destinée infernale, à la mort définitive… la mort définitive du Christ, croit-on comprendre.

Pourquoi cette œuvre-là (ou peut-être sa reproduction ?) a-t-elle été choisie pour décorer une salle d’apparat de la réunion de Davos, où se retrouvent les représentants du pouvoir comme ceux des multinationales ? Ce qui est sûr, c’est que l’art – et surtout l’art contemporain ou l’art associé à l’intelligence artificielle – tient une place importante au Forum économique mondial. Tout comme la spiritualité panthéiste, qui lui est d’ailleurs associée.

 

Jeanne Smits