Patients : les téléconsultations entraînent davantage de décès ou de dommages graves

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Avec la « pandémie » covidienne, les téléconsultations ont eu le vent en poupe et des habitudes se sont prises puisqu’en France comme en Grande-Bretagne, ce sont des millions de rendez-vous médicaux qui se passent désormais ainsi. Mais au détriment de qui ? Pas des praticiens qui économisent du temps, ne pouvant ni ausculter, ni jauger les corps. Mais des patients, plus sûrement, à travers « des décès et des dommages graves », selon une nouvelle étude. Au-delà des chiffres, le bon sens ne s’en étonne guère !

Et pourtant, les déserts médicaux aidant, c’est vers une multiplication et une systématisation de ce mode de soins que l’on se dirige, ce qui permettra également de divulguer plus facilement et plus rapidement la prise en charge de la « santé reproductive », en particulier les pilules abortives – avant les packs tout compris pour mourir en douce ?

 

Des décès et des dommages corporels à cause des écrans

Selon une nouvelle étude publiée dans la revue médicale BMJ Quality & Safety, les rendez-vous chez le médecin généraliste par téléphone ou en ligne risquent bien de nuire aux patients. Une analyse des consultations médicales à distance du NHS (National Health Service) entre 2020 et 2023 a révélé que « des décès et des préjudices graves » étaient survenus en raison de diagnostics erronés ou manqués et des référencements tardifs. Et les groupes de patients interrogés ont déclaré que l’étude n’était probablement que « la pointe de l’iceberg ».

Des experts de l’Université d’Oxford ont examiné 95 incidents de sécurité graves survenus en Grande-Bretagne depuis 2020 au cours desquels des patients ont été blessés. Les erreurs commises au téléphone comprenaient des diagnostics manqués, des blessures physiques non évaluées correctement, ou une sous-estimation de la gravité de maladies importantes, notamment la septicémie, le cancer, les cardiopathies congénitales et les complications diabétiques. Des erreurs qui étaient accentuées si les patients étaient particulièrement jeunes ou vieux.

Dans un cas, une jeune fille de 16 ans a reçu un diagnostic de fièvre glandulaire par téléphone par un médecin généraliste, mais est décédée d’une septicémie peu de temps après. Dans un autre cas, une jeune mère est décédée d’une embolie pulmonaire manquée, tandis qu’on diagnostiquait à une femme enceinte des « problèmes urinaires » plutôt que la rupture prématurée de la poche des eaux qu’elle subissait. Les problèmes de communication avec les réceptionnistes des médecins généralistes ont également causé des décès, quand ils oubliaient de rappeler les patients.

 

L’explosion des téléconsultations post-covid

La faute à quoi ? « L’établissement de mauvaises relations » du fait de l’écran, une « collecte d’informations inadéquate », « une évaluation clinique limitée » et « une attention insuffisante aux circonstances sociales du patient », nous détaille The Telegraph. Le Collège de la médecine générale français (CMG) avait, lui, déploré, en avril 2022, l’absence évidente d’examen physique, mais aussi l’impossibilité d’analyser la communication non verbale, le risque de nomadisme médical et les craintes autour de la confidentialité. Le sociologue Alexandre Mathieu-Fritz notait que les médecins exprimaient « un sentiment de distance sociale, émotionnelle et même cognitive ».

Qui ne s’en serait douté ?

Pourtant, aujourd’hui, en Grande-Bretagne, jusqu’à un tiers des rendez-vous chez les médecins généralistes sont désormais virtuels, après que les rendez-vous en « présentiel » ont chuté à moins de la moitié pendant la pandémie : ils étaient auparavant plus de 80 % se tenir face à face. Le nombre de consultations vidéo a quadruplé au cours des deux dernières années, passant d’environ 150.000 à 600.000 par mois.

En France, on observe le même phénomène bien que de façon moindre puisqu’un médecin ne peut encore réaliser « plus de 20 % de son volume d’activité globale conventionnée à distance ». Mais s’il n’y a eu que 80.000 téléconsultations en France en 2019, il y en a eu 13,5 millions en 2020 et 9,4 millions en 2021. 75 % des médecins généralistes proposent désormais la téléconsultation à leurs patients alors qu’ils n’étaient que 5 % avant le Covid-19.

 

Aux patients habitant des zones rurales, les pixels

Et si le mouvement est un peu à la baisse, on ne lui laissera pas le temps de trop redescendre : un nouveau concept a été lancé il y a peu, celui des cabines de téléconsultation ! Officiellement, l’objectif est de lutter contre les déserts médicaux, ce qui, déjà, est assez ridicule lorsqu’on observe que le taux de téléconsultations dans les zones rurales est beaucoup plus faible que dans les zones urbaines. Le bon sens paysan trouve ubuesque l’idée de soins virtuels…

D’ici à 2028, la SNCF va donc déployer des espaces de télémédecine dans quelque 300 gares, a annoncé le 17 novembre sa filiale Gares et Connexions, pour faciliter l’accès aux soins des Français. « Des boxes de 15 m2, confortables et accueillants » où sera toujours présent un infirmier. A terme, 1.735 gares sont visées. Une mesure largement décriée par l’Ordre des médecins qui a enjoint à l’entreprise ferroviaire publique française de chercher plutôt à améliorer la desserte ferroviaire des territoires les plus enclavés !

Mais l’idée plaît tant que Michel-Edouard Leclerc pourrait vouloir assurer la même opération au sein de ses supermarchés, comme il l’a laissé entendre le 23 novembre au micro de SudRadio. Et que dire de la société Ramsay Services qui a lancé un abonnement à 11,90 euros par mois, pour téléconsulter un médecin autant de fois qu’on veut, 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7… évidemment jamais le même !

Est-ce la médecine de demain ? Il faut espérer que non. D’autant que pour des projets comme un avortement ou une euthanasie, ce mode virtuel de soins accentuera encore le manque d’informations et de recul face à un tel acte de mort. Début octobre, le maire de New York, Eric Adams a d’ailleurs autorisé les professionnels de santé à prescrire des pilules abortives par téléconsultation, une « réponse » à l’annulation de l’arrêt Roe vs. Wade.

Mais ne nous plaignons pas, nous avons encore un vrai médecin derrière l’écran. A quand l’intelligence artificielle pour soigner les hommes ?

 

Clémentine Jallais