De nombreux « travailleurs qualifiés » entrent au Royaume-Uni grâce aux kebabs et aux commerces halal

travailleurs entrent Royaume-Uni kebabs
 

Sur les 337.240 visas de travail accordés par le Royaume-Uni en 2023 – à l’époque, le gouvernement britannique était encore « conservateur » – plus de la moitié, soit près de 200.000 visas, concernaient des « travailleurs qualifiés », qui bénéficient à ce titre de la possibilité de rejoindre l’El Dorado occidental. La grande majorité de ces autorisations d’entrer en Grande-Bretagne et d’y travailler étaient en effet accordées à des migrants non ressortissants de l’UE. Mais pour mieux comprendre ce qui se passe, il faut se tourner vers le site GBNews qui vient de mettre en ligne une enquête filmée dont il ressort que le sésame du « travailleur migrant qualifié » a été accordé par centaines par le truchement de responsables de kebabs ou de boucheries halal.

Ce document exclusif, intitulé Britain’s Immigration Trap, est accessible en avant-première aux abonnés du média à cette adresse.

Réalisé par Steven Eddington, la vidéo montre que des immigrés ont obtenu des visas de travailleur qualifié grâce au parrainage de 56 restaurants de kebab et de 83 entreprises dont le nom contient le mot « halal ». Une seule boucherie a parrainé 918 visas, révèle GBNews.

Le journaliste s’est appuyé sur une demande d’accès à l’information (FOI) adressée par l’organisme indépendant Centre for Migration Control : il en ressort notamment des exemples de magasins halal et de kebabs qui ont parrainé des dizaines de visas de travailleurs qualifiés entre 2021 et 2023.

 

Un reportage sur les « travailleurs qualifiés » accueillis au Royaume-Uni

Il présente un reportage tourné à Bradford, ville ouvrière de 500.000 âmes où les seuls Pakistanais représentent 20 % de la population. L’un d’entre eux, justement, arrivé légalement au Royaume-Uni en 1994, donne d’emblée le ton : travailler dans un kebab ne nécessite aucune compétence particulière. « Quand je suis arrivé ici, je ne savais même pas cuire un œuf. Mais maintenant, je sais tout… Je ne crois pas que qu’il s’agisse d’un travail hautement qualifié. » Un sentiment largement partagé par la population locale…

C’est en réalité le gouvernement britannique qui est de cet avis puisque le site internet officiel qui détaille les professions permettant l’accès aux visas de travailleurs qualifiés inclut parmi celles-ci les bouchers et les chefs cuisiniers, tout comme les superviseurs de centres d’appels, les gérants de bar, les responsables des ressources humaines et les entraîneurs de gymnastique.

Le système, mis en place en 2008 et modifié depuis lors, prévoit la possibilité d’amener conjoint ou partenaire stable et les enfants à charge. Pour en bénéficier, l’employeur qui parraine le nouvel arrivant doit être agréé par le ministère de l’Intérieur.

Robert Bates, directeur de recherche du Centre for Migration Control, voit dans la réalité de la mise en œuvre du programme le signe d’une volonté politique évidente :

« Le ministère de l’Intérieur a permis aux entreprises d’agir comme des usines à visas, tournant le dos aux Britanniques et faisant venir des personnes peu qualifiées venant de l’extérieur de l’Europe. Il n’y a aucune raison économique pour que nous importions des chefs, des bouchers ou du personnel de centre d’appel étrangers, et les coûts sociaux que cela engendre sont énormes. Après cinq ans de travail dans l’entreprise de leur ami, ces personnes ont alors droit à des prestations sociales et bénéficient d’une procédure accélérée pour obtenir la citoyenneté. L’ensemble du processus s’est transformé en arnaque. »

 

Des kebabs et des commerces halal font accorder des visas par dizaines

Les informations officielles lâchées par l’administration à la suite la requête FOI permettent de constater que c’est dans l’ensemble du pays que des kebabs et des restaurants asiatiques ont parrainé chacun douze migrants en moyenne. Le reportage s’attarde sur un habitant de Bradford, Ben Habib, ancien leader délégué du parti Reform, qui s’indigne :

« Nous revendiquons le titre de nation accueillante. Et en effet, nous le sommes – à l’excès. Sur l’autel de la migration de masse et de la diversité, nous avons fait du halal une profession “qualifiée” et nécessaire. Résultat : nous importons des bouchers étrangers pour tuer des animaux de manière inhumaine. Cette “compétence” n’est pas nécessaire, et les personnes qui se livrent à ce genre de boucherie n’ont pas leur place au Royaume-Uni. »

Priti Patel, ministre de l’lntérieur sous Boris Johnson, assurait encore en ce début d’année que son gouvernement laissant entrer « les plus brillants et les meilleurs » : on parle de 1,2 million de nouvelles entrées en 2023… dans un pays où de nombreux autochtones en âge de travailler sont au chômage ou inactifs. Les détracteurs du système ont beau jeu d’accuser les entreprises qui se servent du système d’en profiter pour recruter une main-d’œuvre bon marché plutôt que de remédier à de réelles pénuries dans les secteurs hautement qualifiés et de faciliter la formation de personnel d’origine britannique.

Mais il faut dire aussi que ce dernier ne se bouscule pas pour remplir certains postes, dans l’industrie de transformation de la viande par exemple.

 

Travailleurs qualifiés au Royaume-Uni : des médecins et ingénieurs aux « chefs de cuisine » recrutés par les kebabs

Cela dit, le système des visas pour travailleurs qualifiées cherchait à l’origine à faire venir des médecins, des ingénieurs et des spécialistes de haut niveau. « Nous voyons plutôt des chaînes de restauration rapide et des bouchers parrainer des dizaines de visas. C’est un détournement du système », dénonce un porte-parole de Migration Watch UK, association qui milite pour la réduction de l’immigration au Royaume-Uni.

Le documentaire de GBNews donne également la parole à un chercheur universitaire, Matthew Goodwin, qui dénonce tout particulièrement le choix de laisser entrer un si grand nombre de travailleurs étrangers au Royaume-Uni au moment où le pays se trouve dans un « piège démographique », qu’il définit comme la situation où « le taux de croissance de la population est si élevé qu’il dépasse la capacité de l’Etat à fournir des services publics ». C’est la raison du « délabrement » actuel des services de santé, des écoles, assure-t-il, sans parler de la dette massive… Et des frais qu’entraîne l’arrivée de migrants qui sont, de fait, faiblement qualifiés.

Plus fondamentalement, c’est le visage du Royaume-Uni qui s’en trouve modifié. Britain’s Immigration Trap en donne la preuve par l’image.

 

Anne Dolhein