Trois Cœurs se veut un essai de retour au genre, en perte de vitesse, du drame romantique. Il y est donc beaucoup plus question de sentiments que de sexe. Rappelons que ce dernier est trop souvent réduit aux instincts animaux ou la quasi-pornographie suivant la grosse tendance du cinéma français de ces dernières décennies. L’effort pour sortir de cette logique est louable.
 
Le résultat est-il conforme aux attentes ? Ce n’est pas évident. Trois Cœurs est aujourd’hui surtout connu pour ses passages comiques, avec les répliques défensives d’un maire d’une ville moyenne de province fraudeur fiscal, écrites avant les déclarations involontairement comiques de ministres eux-mêmes en délicatesse avec le fisc ou souffrant d’allergie administrative. Elles correspondent assez exactement, et ce avec une écriture de plusieurs mois antérieures.
 
L’acteur principal, Benoît Poelvoorde, convainc assez dans son métier d’inspecteur du fisc, consciencieux, mais pas odieux, cherchant à distinguer les distraits occasionnels des fraudeurs organisés, manifestes, à redresser. Un inspecteur du fisc n’inspire d’emblée nulle sympathie au public, alors qu’il peut certainement être drôle, touchant et sensible. Par contre, et c’est là l’essentiel de l’intrigue, le spectateur peine à croire en son rôle d’amoureux aux sentiments confus, hésitant entre deux sœurs. Les acteurs, très connus, n’arrivent pas à disparaître derrière leurs personnages. Pourquoi tromper Chiara Mastroianni avec Charlotte Gainsbourg, pas plus jolie ni intellectuellement supérieure ? Et ce dans la vie, comme dans les rôles de Trois Cœurs. On ne comprend pas vraiment. Les rôles passés de Charlotte Gainsbourg, bien éloignés de l’amoureuse délicate et grande sentimentale, n’aident pas vraiment.
 
Sur le plan moral, outre l’imbroglio dans le film, ces dames ont eu des compagnons abandonnés sans scrupule, ce qui peine encore à rendre crédible la délicatesse d’âme supposée, tout en correspondant bien à notre époque.
 
Au moins la ville de Valence, avec son patrimoine, ses antiquaires et sa région sont bien filmés et donnent une idée de voyage. D’où le constat que Trois Cœurs, pas trop long, offre un moment pas désagréable mais à l’intérêt assez limité.