Trois militants anti-esclavagistes de Mauritanie ont été condamnés hier à deux ans de prison ferme.
Parmi ces derniers, Biram Ould Dah Ould Abeid, ex-candidat à l’élection présidentielle et surtout président de l’Initiative pour la résurgence du mouvement abolitionniste (IRA, anti-esclavagiste).
Trois militants condamnés
Le procès s’était ouvert le 24 décembre à Rosso. Dix personnes avaient été mises en examen pour « appartenance à une organisation non reconnue, rassemblement non autorisé, appel à rassemblement non autorisé et violence contre la force publique », d’après la défense. Le procureur avait requis cinq ans de prison ferme « et des amendes financières contre tout le monde, en plus de la confiscation des biens de leur organisation ». Les autorités mauritaniennes ont été jusqu’à accuser les responsables de l’IRA – dont le siège a été fermé le 12 novembre – d’avoir organisé des rassemblements servant notamment de tribune pour une « propagande raciste ».
Et pour cause. Huit des accusés, dont Biram, étaient détenus depuis mi-novembre pour avoir mené une campagne dénonçant l’esclavage en Mauritanie, et en particulier l’accaparement de terres au détriment de la communauté haratine dans le sud du pays.
Là-bas, c’est en effet la couleur de la peau qui distingue majoritairement le maître de l’esclave. Les premiers sont maures, d’origine arabo-berbère, et forment l’élite du pays : les « beidane ». Les seconds sont haratines, descendants des Noirs africains qui vivaient le long du fleuve Sénégal avant d’être asservis, il y a des siècles, par ces mêmes envahisseurs maures.
Mauritanie : premier pays esclavagiste
C’est le premier pays esclavagiste, selon un classement de la fondation australienne Walk Free. 4 % des Mauritaniens sont asservis, soit 150.000 des 3,8 millions d’habitants du pays. « Ces esclaves des temps modernes sont, pour la plupart, éparpillés dans le désert. Ils n’ont pas droit à l’école, aux terres, à l’héritage. Ils ne peuvent ni se marier ni divorcer sans la (rare) permission de leur maître. Ils sont totalement dépendants. Et soumis » nous dit Le Courrier International.
L’esclavage y est bien pourtant, depuis 2007, un crime pouvant entraîner de cinq à dix ans de prison. Peut-être. Mais le gouvernement ne reconnaît pas même « officieusement » l’esclavage. Rappelons que la Mauritanie est un État islamique et que l’esclavage n’a jamais été clairement condamné par l’islam. Biram Ould Dah Ould Abeid a déjà été arrêté et condamné puis grâcié en 2012 pour avoir incinéré des livres faisant l’apologie de l’esclavage : ils contenaient des versets coraniques et des passages de hadith…