Energie, assurances, entretien : et si l’usage de la voiture subissait une mutation ?

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La maison et la voiture : ce sont un peu les marqueurs de la réussite sociale dans le monde d’aujourd’hui. Mais les codes sont visiblement en passe d’évoluer. L’accession à la propriété devient de plus en plus un doux rêve pour de nombreux Britanniques. Et les coûts de l’énergie, de l’entretien, les dépenses en assurances pourraient avoir raison de la possession des véhicules devenus trop coûteux, si l’on en croit cet article du Telegraph. Les gens devraient ainsi sacrifier leur liberté de déplacement.

Etonnamment, mais pas tant que ça, les jeunes générations ne le voient pas du même œil, y trouvant une moindre responsabilité, et donc davantage de confort. Et puis… c’est « bon pour la planète ». Une mutation est doucement en cours.

 

Les gens se partageront leur voiture

Tout vient d’une enquête de la société de location Sixt selon laquelle près d’un tiers des automobilistes conduisent moins souvent afin de réduire leurs dépenses depuis le début de la crise du coût de la vie. Et plus de la moitié considèrent que posséder une voiture est un fardeau financier.

« La conduite automobile est en passe de devenir fondamentalement différente, déclare son directeur général. Bientôt, au lieu de posséder une voiture, les gens la partageront. Je vois vraiment cela comme l’avenir. »

Partager… un fort goût de socialisme élaboré dans un monde où la propriété privée devient objet de haine. Et ce sont les jeunes qui sont les fers de lance involontaires de cette prise de conscience contrainte.

C’est un fait, avec la montée en flèche de l’inflation, les coûts associés non seulement à l’achat d’une voiture, mais aussi à sa conduite et à son entretien ont augmenté de manière considérable. Les prix de l’essence à la pompe ont augmenté d’un cinquième par rapport à octobre 2019. Les primes d’assurance automobile ont bondi de 29 % au cours des 12 derniers mois pour atteindre un sommet historique de 561 £ (645 €) outre-Manche, alors que les pénuries de matériaux et de main-d’œuvre font également grimper le coût d’entretien et de réparations, selon l’Association des assureurs britanniques.

Voiture neuve ? Les taux d’intérêt accrus ont augmenté drastiquement le coût des emprunts, sans parler de la taxe automobile annuelle qui augmente le poids de la fiscalité. Voiture d’occasion ? Les prix ont grimpé en flèche pendant la crise de la chaîne d’approvisionnement, et avec la multiplication des zones à faibles émissions ultra contraignantes, ces conducteurs risquent de se trouver redevables de frais quotidiens considérables.

 

Energie, assurance… une crise du coût de la vie qui porte atteinte aux libertés

Qui en profite ? Les agences de location. « Nous voyons maintenant des clients qui viennent chez nous tous les vendredis et louent une voiture juste pour le week-end, pour sortir à la campagne, peut-être pour visiter une résidence secondaire ou retrouver leur famille en dehors de Londres, explique le directeur de Sixt. Ils se disent qu’en fait, c’est un mode de vie bien plus économique. »

Le nombre de clients augmente. En octobre, les réservations ont augmenté de 329 % par rapport au même mois, l’année dernière. A noter que les jeunes professionnels des villes sont au cœur de cette transition en cours : « Ils n’ont pas le même attachement à la propriété. Ils préfèrent ne pas débourser de coûts d’investissement élevés pour un actif qui est très rarement utilisé. »

Selon le co-fondateur de RethinkX, un groupe de réflexion spécialisé dans l’identification des innovations perturbatrices à même d’avoir un impact sur la société, il va y avoir une refonte inévitable de la conduite automobile. « Les véhicules autonomes permettront véritablement de mettre fin à la possession d’une voiture. » Et l’étape intermédiaire serait, selon lui, celle des voitures électriques qui atteindront le million de kilomètres et pourront donc se partager.

Qu’on nous permette d’en douter, tant l’incertitude demeure sur la longévité et la rentabilité de ces dernières… Le coût de leurs réparations en font des produits de luxe et les assurances ont augmenté leurs primes en fonction.

 

Une mutation pour la société de demain ?

Plus certainement, il y a un changement de mentalité, qu’on observe dans l’usage global de la voiture. Les distances parcourues par les automobilistes étaient déjà en baisse avant le début de la pandémie : entre 2002 et 2019, la distance annuelle parcourue par les conducteurs avait diminué d’environ 13 %, selon les données du gouvernement. Comme le fait remarquer The Telegraph, ce chiffre qui a plongé en 2020, alors que le pays était en confinement, ne s’est pas redressé en 2021. Il a même encore baissé : la distance parcourue par les conducteurs en 2021 était inférieure de 40 % à celle de 2002, ce qui est considérable.

C’est l’objectif même de Klaus Schwab ! Relisons le livre blanc, publié cette année, par le Forum économique mondial (Forum de Davos) qui appelle à une réduction drastique de l’utilisation de la voiture privée d’ici à 2050 : il voudrait voir diminuer le nombre de propriétaires de voitures dans le monde de 75 %…

On retrouve ainsi le rêve éveillé de la parlementaire danoise, Ida Auken, qu’évoquait Anne Dolhein, en 2016, dans ces pages. Le même Forum de Davos avait alors publié sa tribune où elle rêvait d’une société « où tout produit deviendrait service : qu’il s’agisse des transports, du logement, de la nourriture ou de toute autre chose dont on peut avoir besoin dans la vie quotidienne… » Nous en approchons-nous ?

 

Clémentine Jallais