Le Vatican veut renouveler son accord secret avec la Chine, malgré tous les affronts du Parti communiste

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C’est le cardinal Parolin lui-même, secrétaire d’Etat du Vatican, qui l’a confirmé à LifeSiteNews : le Saint-Siège entend bien renouveler son accord secret avec la Chine communiste, qui fait pourtant l’objet de critiques cinglantes depuis sa première signature en 2018. Les dernières nominations d’évêques montrent que Pékin ne s’y plie que lorsque bon lui semble et que prime, en dépit de tout, la sinisation du catholicisme, autrement dit sa communisation. Et si le Vatican courait, sans trop mot dire, derrière un leurre ?

Apparemment, le « dialogue » couvre toutes les forfaitures : le Pape François est allé jusqu’à déclarer, en septembre, en survolant la Mongolie, que la Chine était « très respectueuse ». Le Vatican entend vraiment garder le contact avec le Parti Communiste – plus qu’avec les catholiques chinois.

 

La primauté du pouvoir exercé par Pékin dans l’accord

Ce nouveau « rendez-vous » entre la Chine et le Vatican est particulièrement important. Comme le soulignait en février dans un article le Père P. Gianni Criveller, directeur d’AsiaNews, « d’après ce que l’on sait, 2024 devrait être une année décisive pour le dialogue entre la Chine et le Saint-Siège : l’accord de 2018, renouvelé à deux reprises, devra être définitivement ratifié ou abandonné ».

Or le cardinal Parolin, secrétaire d’Etat et chef de la diplomatie du Vatican depuis octobre 2013, a confirmé la volonté vaticane de conforter cet accord historique censé reconnaître l’Eglise approuvée par l’Etat en Chine et permettre au Parti communiste chinois (PCC) de destituer et de nommer des évêques (même si le Pape conserve apparemment son droit de veto). S’il est définitivement approuvé, cet accord, « nouveau chapitre de l’Eglise catholique en Chine » selon le pape François, sera logiquement rendu public.

Et pourtant… les Chinois n’en font qu’à leur tête. En 2023, par deux fois, ils ont œuvré sans l’accord de Rome, via la Conférence des évêques de l’Eglise catholique de Chine (BCCCC) dirigée par le Parti, avec notamment le transfert de Mgr Shen Bin vers le diocèse de Shanghai, comme l’avait noté Jeanne Smits.

Les trois dernières nominations d’évêques ont été diplomatiquement plus lissées, donnant l’impression que le gouvernement chinois ne veut pas rompre avec Rome. Mais, là encore, un examen approfondi montre que le pape François a nommé ces trois évêques bien après leur nomination par les autorités chinoises… Le 25 janvier dernier, le Bureau de presse du Saint-Siège a brièvement annoncé que le père Thaddeus Wang Yuesheng avait été consacré le même jour « dans le cadre de l’accord provisoire entre le Saint-Siège et la République populaire de Chine ». Or les autorités chinoises ont déclaré que Wang avait été « élu évêque désigné de Zhengzhou le 22 mars 2022 »…

Vingt mois d’écart qui indiquent clairement que le PCC mène la danse, toujours.

 

Le Vatican reconnaît des lacunes, mais veut signer

Depuis la signature de l’accord en 2018, les critiques n’ont pourtant pas manqué, et le cardinal Joseph Zen, évêque émérite de Hong Kong, les a particulièrement incarnées en parlant de « trahison incroyable ». En l’espace de six ans, la persécution des catholiques – en particulier des catholiques « clandestins » qui n’acceptent pas l’Eglise contrôlée par l’Etat – s’est d’ailleurs manifestement accrue. La Commission exécutive du Congrès américain sur la Chine a même parlé dans son rapport de 2020 d’« une intensité jamais vue depuis la Révolution culturelle ».

« Tous les évêques qui refusent de rejoindre l’Association patriotique catholique sont assignés à résidence par le PCC ou disparaissent», a déclaré l’expert chinois Steven Moser à LifeSiteNews au début du mois. « Bien que le Vatican ait déclaré il y a plusieurs années que l’accord Vatican-Chine n’obligeait personne à rejoindre cette organisation schismatique, le refus de le faire entraîne des persécutions et des sanctions. Et le Vatican reste les bras croisés et ne fait rien. »

Celui qu’on appelle le ministre des Affaires étrangères du Saint-Siège, l’archevêque Paul Gallagher, tient un discours mitigé sur la question. Lui qui avait déclaré l’année dernière que l’accord n’était « pas le meilleur accord possible » à cause de « l’autre partie », a estimé dans une récente interview accordée au magazine jésuite America que c’était « toujours un instrument utile pour le Saint-Siège et les autorités chinoises » en vue de la nomination des évêques.

 

La Chine mettra à sa botte tous ceux qui veulent jouer au jeu communiste

Le cardinal Parolin a même affirmé, en juillet dernier, que le Saint-Siège espérait « l’ouverture d’un bureau de liaison établi du Saint-Siège en Chine » qui « favoriserait non seulement le dialogue avec les autorités civiles, mais contribuerait également à une pleine réconciliation au sein de l’Eglise chinoise ». Mais Mgr Gallagher a déclaré à America Magazine qu’il n’y avait aucune « volonté ou ouverture » de la part des autorités chinoises sur ce point.

Et puis serait-ce souhaitable ? Les catholiques chinois pourraient se trouver contraints d’adhérer à des associations et de promettre leur fidélité au gouvernement. La concession faite au Vatican pourrait bien être un moyen pour Pékin d’asseoir plus fortement encore son autorité et son contrôle.

Mais elle n’en a guère besoin… Il suffit de lire le Plan quinquennal pour la sinisation du catholicisme en Chine (2023-2027), approuvé le 14 décembre dernier par l’organisme officiel qui regroupe la Conférence des évêques catholiques (non reconnue par le Saint-Siège) et l’Association patriotique des catholiques chinois, toutes deux sous l’égide du Parti communiste : à aucun moment, remarquait le P. Gianni Criveller, le Pape et le Saint-Siège ne sont mentionnés. Le mot « sinisation », lui, apparaît 53 fois.

On y lit que non seulement, le catholicisme doit « se manifester constamment avec des caractéristiques chinoises », mais il doit s’adapter à la politique religieuse établie par les autorités politiques : autrement dit, la foi doit se plier aux exigences communistes, quitte à lui donner un nouveau « fondement théologique ». Pékin fera toujours ce que bon lui semble : en septembre dernier, le Parti avait tout bonnement interdit aux catholiques chinois d’aller rencontrer le pape en Mongolie. Par essence, aucune religion ne peut être libre en terre communiste.

 

Clémentine Jallais