Les Drôles d’oiseaux dont il est question sont en fait des éléments très périphériques à l’action principale. Dans Paris, chose inattendue et inusitée, des oiseaux tombent du ciel, morts brusquement. Ce serait une épidémie foudroyante affectant les goélands. Paris n’est pourtant pas un port de mer, mais on y rencontre en effet des goélands de temps à autres. Il y aurait là une forme de lien logique avec un des personnages principaux de Drôles d’oiseaux, un exilé politique, qui du moins consent parfois à se présenter comme tel, depuis des décennies, loin de son pays d’origine.
Une ancienne étudiante en lettres à Tours cherche du travail à Paris, et si possible un logement. Or, ces deux ambitions élémentaires sont difficiles à satisfaire, du moins en suivant ses aspirations et compétences, peu recherchées sur le marché du travail. En attendant, elle loge chez une amie, et se promène la journée, traverse Paris dans tous les sens, à pied, ce qui se fait. C’est parfaitement exact, « Paris [intra muros] n’est pas si grand ». Le film, et c’est une de ses qualités, propose de beaux plans de Paris, en particulier entre Seine et Panthéon, où se déroule le cœur de l’action. Elle s’arrête de temps à autres dans les cafés, et y lit sans conviction les petites annonces du journal Le Parisien. Ce qui lui pèse est les bruyantes amours de son hôte, surtout la nuit. Aussi saisit-elle volontiers l’offre inattendue d’un libraire misanthrope : assurer une présence – curieuse formulation pour un travail de vendeuse – contre un logement – un studio – et une rémunération, non précisée.
Drôles d’oiseaux, une curiosité plutôt sympathique
Heureuse de travailler, et dans un secteur à son goût, elle remet en ordre la librairie, visiblement à moitié à l’abandon, envahie par les cartons de livres à peine ouverts. Elle essaye aussi de nouer contact avec son patron, un homme des plus bourrus. Mais, lorsqu’il consent à parler, il se révèle fin connaisseur de la littérature, capable de jugements iconoclastes et bien argumentés. Elle finit par tomber sous le charme du personnage. Consciente de la différence d’âge, supérieure même à celle entre monsieur et madame Macron, elle s’interdit toutefois une vraie liaison amoureuse. Lui, blasé de tout, respecte son choix. Drôles d’oiseaux propose donc l’histoire d’une amitié amoureuse. Il y a aussi un mystère dans le film : ce libraire n’est visiblement pas passionné par son activité officielle, dans laquelle il s’investit peu ; il manie aussi régulièrement de fortes sommes d’argent en liquide…Le spectateur comprend assez vite ce dont il s’agit, ce que nous nous garderons pourtant de révéler ici. Nous signalerons seulement que nous ne partagerons le point de vue indulgent du film.
Drôles d’oiseaux, s’il n’est certes pas un grand film, n’en reste pas moins, de façon générale, une curiosité plutôt sympathique.
Hector JOVIEN