L’OCDE ouvre une enquête contre le WWF pour violation des droits de l’homme

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Petite fille Baka torturée en 2016 à l’âge de 10 ans par une escouade anti-braconnage au Cameroun

 
C’est un événement sans précédent. L’Organisation pour la coopération et le développement économique a décidé d’ouvrir une enquête contre le World Wildlife Fund (WWF) à la suite d’accusations selon lesquelles le groupe de protection de l’environnement a favorisé des violations des droits de l’homme au Cameroun, au détriment de plusieurs tribus autochtones. Les accusations ont été portées devant l’OCDE par le groupe britannique Survival International : selon celui-ci, le WWF soutient des pratiques gouvernementales qui poussent – violemment – le peuple des pygmées Baka ainsi que d’autres tribus vivant de la cueillette à quitter leur habitat traditionnel dans la forêt équatoriale.
 
L’OCDE a donc suffisamment pris au sérieux ces allégations pour décider de mener ses propres investigations. Il devra déterminer si le WWF a en effet contribué au financement et au soutien logistique – ce qui ne semble pas contesté – des « écogardiens » du gouvernement camerounais qui traquent le braconnage et surtout si ce faisant, comme le soutient Survival International, ceux-ci ont systématiquement méconnu les droits ancestraux des habitants de la région.
 

OCDE a accepté d’enquêter sur la violation des droits des pygmées Baka

 
« Les Baka ont été obligés de quitter d’importantes zones de leur terres ancestrales et ils sont confrontés à la violence des brigades anti-braconnage dès lors qu’ils chassent, pratiquent la cueillette ou se rendent dans leurs sites sacrés », assure l’ONG qui a pour objet de protéger les droits des peuplades traditionnelles. Cela fait plus de 20 ans, selon cette organisation, que les Baka subissent « arrestations et passages à tabac, la torture et même la mise à mort ».
 
Prudemment, l’OCDE a publié un comité annonçant que son enquête ne préjuge pas de l’issue de cette affaire ; elle entend agir comme « médiatrice » entre le WWF, basé comme elle à Genève, et Survival International.
 
C’est en tout cas la première fois que l’OCDE enquêtera sur une organisation à but non lucratif, son action s’étant focalisée jusqu’ici sur les multinationales commerciales et leur « comportement responsable ».
 
Le WWF assure de son côté avoir toujours œuvré pour faire respecter les droits du peuple Baka en particulier, mais reconnaît aujourd’hui que l’on pourrait en faire davantage pour faire améliorer ses conditions de vie. Entre autres choses, le WWF assure fournir des formations aux droits de l’homme pour les « écogardiens » et travailler à faire accepter des membres de la tribu Baka parmi leur nombre. L’organisme « regrette » que « Survival International » n’ait pas donné suite à sa proposition de coopérer sur le terrain pour réfléchir au « contexte politique et social complexe où se trouvent les Baka au Cameroun. »
 

Le WWF soupçonné de violations des droits de l’homme

 
Selon Survival International, ces propositions sont insuffisantes, vu que le WWF a certes reconnu que des violations des droits de l’homme avaient eu lieu mais qu’il assure aujourd’hui que ces incidents « semblent ne plus guère se produire ». L’ONG affirme au contraire avoir reçu de multiples témoignages de la part des Baka qui demandent simplement à vivre comme ils ont toujours vécu, à avoir leur mot à dire sur la conservation de leur territoire, et qui avancent de nouveaux faits de violence et de torture de la part des autorités camerounaises et de leurs préposés à la protection de la nature.
 
La méconnaissance des droits des hommes au nom de la priorité des droits de la « nature » n’est en tout cas pas étrangère à la logique environnementaliste et surtout celle de l’« Ecologie profonde » qui voit l’homme comme un perturbateur de l’équilibre de la « Terre-Mère », sa prolifération mettant en péril les « écosystèmes ».
 

Anne Dolhein