Péchés et examen de conscience écologiques : le pape François ne peut changer le catéchisme…

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L’affaire avait ravi les écologistes du monde entier : début septembre, dans la foulée de Laudato si’, le pape François a demandé aux catholiques de confesser leurs péchés contre la nature et d’ajouter la miséricorde envers celle-ci à la liste des œuvres traditionnelles de miséricorde corporelle et spirituelle. Sont-ils nombreux, les catholiques qui confessent désormais une omission de covoiturage ou un oubli de tri sélectif ? L’infime proportion des catholiques – même « pratiquants » – qui s’approchent du sacrement de pénitence enlève beaucoup à la portée de la suggestion pontificale. Mais quoi qu’il en soit des péchés et de l’examen de conscience écologiques prônés par le Saint-Père, ce qu’il a proposé ne change pas le catéchisme.
 
Selon le père dominicain Thomas Creane, interrogé par LifeSiteNews, le pape n’a en réalité imposé aucune nouvelle obligation sur les fidèles, mise à part peut-être celle qui consiste à devoir écouter ses paroles. « Lui-même ne parle que d’une “proposition”, et non d’un enseignement ou d’une loi ; c’est pourtant par ses enseignements et par les lois (et le fait de nommer certaines personnes à certains offices) que le pape crée des obligations pesant sur les fidèles. »
 

Le péché d’omission du tri sélectif, une invention qui ne peut changer le catéchisme

 
Pour Joseph Shaw, professeur à Oxford, le pape n’a pas davantage le pouvoir d’allonger subitement le catalogue des œuvres de miséricorde.
 
« La liste des “œuvres de miséricorde” ne correspond pas à un “enseignement” de l’Eglise : comme bien d’autres listes vous la trouverez dans le Catéchisme ; il s’agit d’un outil didactique traditionnel inspiré par l’Ecriture sainte. Je n’ai pas réussi à trouver qui les avait constituées au départ, mais leur existence est attestée depuis le début de la Renaissance au moins, en juger par leurs représentations artistiques », a-t-il déclaré au site provie par mail.
 
« Ces listes – les sept péchés capitaux, les trois conseils de la perfection, les quatre péchés qui crient vengeance au ciel – même si elles ont été étendues un peu au départ, sont fixées par la tradition. C’est précisément parce qu’elles ne sont pas vraiment officielles qu’il est difficile de voir comment on pourrait les changer aujourd’hui », a-t-il ajouté.
 
Dans ce contexte, le Pr Shaw estime que le pape voulait simplement indiquer que la liste des œuvres de miséricorde est spécifique et limitée : il s’agirait dès lors simplement d’inciter les fidèles à aller au-delà, dans un esprit analogue.
 

Le pape François ne pet changer les œuvres de miséricorde

 
Alors que les catéchismes existants présentent déjà ce type de listes de manière diverse, les deux spécialistes de l’enseignement de l’Eglide estiment qu’il n’y a nullement lieu de le modifier pour tenir compte de la proposition du pape François. « Celui-ci ne demande pas que les nouvelles éditions du catéchisme fassent état d’œuvres de miséricorde supplémentaire pas plus qu’il ne dit où il faudrait les faire figurer en ce cas », observe le Pr Shaw.
 
Ainsi le Catéchisme de l’Eglise catholique ne mentionne-t-il que six œuvres miséricorde corporelle, où l’on suppose que le fait de donner à boire à ceux qui ont soif est sous-entendu dans l’œuvre qui consiste à nourrir les affamés, et il omet deux œuvres spirituelles traditionnelles : l’admonestation des pécheurs et la prière pour les vivants et les morts. Il explique également que les œuvres font l’objet d’interprétations diverses : ainsi peut-on parler, à propos des prisonniers, de payer leur rançon ou de leur rendre visite. D’autres œuvres qui évidemment expriment la miséricorde, comme le fait de donner des médicaments aux malades ou d’amener un prêtre aux mourants n’ont jamais figuré dans les listes. « Mais il faut s’arrêter quelque part, et le chiffre sept est symbolique, et toutes les œuvres de la miséricorde corporelle au moins sont bien attestées dans la Bible, de telle sorte que les listes traditionnelles ont été établies comme le sont, de manière fort utile, j’en suis sûr », conclut le professeur.
 
Le P. Creane va un peu plus loin en soulignant qu’aucune des suggestions faites par le pape François ne lui semble pouvoir être incluse de manière naturelle dans les listes existantes.
 
C’est parce que « la miséricorde s’exprime à l’égard des personnes », souligne-t-il. Il faut donc faire la distinction entre la miséricorde et la gentillesse ou la bonté. Nous ne traitons pas un chat avec miséricorde, mais de manière aimable. « Parler de miséricorde lorsque nous éteignons une ampoule ou que nous trions le papier et le plastique en vue de mieux préserver les ressources naturelles semble incongru. Peut-être un autre être humain pourrait-il tirer profit de cette action, mais la miséricorde désigne un acte d’amour envers un être humain particulier qui se trouve devant moi, dont la souffrance m’émeut. Pour ce qui est de l’œuvre de miséricorde spirituelle, “la contemplation de l’œuvre de Dieu”, celle-ci est certainement une bonne chose, mais elle n’est pas une œuvre de miséricorde, puisqu’elle porte pas secours aux besoins du prochain. Par conséquent, alors que le prestige de l’office papal peut conduire certains à ajouter ces “œuvres” à leur liste, personne n’est obligé de le faire. »
 

L’examen de conscience écologique ne s’impose pas aux catholiques

 
Voilà une manière bien diplomatique de renvoyer le pape François dans ses cordes.
 
Si diplomatique que l’auteur évite d’aller au bout de son argumentation. Ou, à tout le moins, de la réflexion qui s’impose.
 
En effet, si le pape demande aux catholiques d’être « miséricordieux » non plus à l’égard des personnes, mais de la nature, vivante ou inanimée, cela implique une sorte de personnification de celle-ci, l’idée qu’elle puisse souffrir et avoir besoin d’être soulagée. Notre devoir de miséricorde est dictée par les paroles du Christ : « Ce que vous ferez au plus petit d’entre les miens, c’est à moi que vous le ferez »… « Car j’avais faim, et vous m’avez donné à manger ; j’avais soif, et vous m’avez donné à boire ; j’étais un étranger, et vous m’avez accueilli ; j’étais nu, et vous m’avez habillé ; j’étais malade, et vous m’avez visité ; j’étais en prison, et vous êtes venus jusqu’à moi ! »…
 
Nous devons voir le visage du Christ dans notre prochain qui souffre. Le visage du Dieu fait homme. Dans les hommes qui sont tous appelés à être ses frères au ciel.
 
Devrions-nous aussi le voir dans la nature ? Au risque de déifier la nature ? Pour les tenants de l’écologie profonde, cette logique est la bonne ; cela s’inscrit dans l’adulation païenne de la Terre et de Gaïa. Le panthéisme… La proposition du pape est à cet égard pour le moins imprudente.
 

Anne Dolhein