Tenir son journal pour avoir meilleure mémoire

Tenir journal meilleure mémoire
 
Il y a pour beaucoup une satisfaction réelle à tenir son journal, à se raconter – qui s’exprime aujourd’hui comme jamais par les blogs et, de manière encore plus narcissique, par les réseaux sociaux. Sentiment d’exister, et plus encore incarnation de l’idée qu’on se fait de ses objectifs, de ses réussites et – pour les plus sincères – de ses échecs. Mais alors que les informations se multiplient la dispersion les accompagne, zapping sur internet oblige. Selon Arthur Applebee, professeur d’éducation à l’Albany University de New York, organiser quotidiennement ses souvenirs du jour par écrit – et mieux encore, en les écrivant à la main – permet à la fois de tirer des leçons de ce qu’on a vécu et de se le rappeler. Tenir son journal, un moyen pour avoir meilleure mémoire ?
 
Il en est persuadé, d’autant que le fait a été confirmé par les recherches universitaires réalisées par Martin Conway et son épouse Susan Gathercole à Lancaster University au Royaume-Uni : il apparaît que le fait d’écrire ce qu’on entend aide à le retenir. Les travaux d’Elisabeth Nuyts le confirment aussi : le fait d’avoir recours à la vue, l’ouïe et le mouvement améliore la mémoire longue. « Se parler » de ce qui s’est passé pendant la journée et l’écrire permet ainsi de retenir ses expériences, ses impressions… et de les analyser. Pour aller plus loin, il y a aussi l’examen de conscience !
 

Pour avoir meilleure mémoire, écrire ses souvenirs !

 
Quand s’y mettre ? A l’heure du coucher, selon Agnes Szollosi et ses collègues de l’université de technologie et d’économie de Budapest. Ces chercheurs ont recruté 109 jeunes adultes qui reçurent pour consigne l’écriture quotidienne de leur journal pendant cinq jours consécutifs. Répartis en trois groupes, ils devaient soit coucher sur le papier les souvenirs de la journée le soir avant de se coucher, soit attendre le lendemain matin, soit poser par écrit, le soir, les événements de la veille.
 
Trente jours plus tard, ils devaient se rappeler le plus possible de faits remontant à cette période de cinq jours. Ceux qui avaient écrit le soir – le jour même ou le lendemain – avaient une mémoire plus précise et plus fournie de ce qu’ils avaient vécu que les « rédacteurs du matin ». Les chercheurs ont estimé que cela pouvait être lié au fait que les souvenirs des événements qu’on se rappelle le soir sont consolidés et stabilisés au cours des heures de sommeil qui suivent.
 

Journal du soir, espoir…

 
Prendre le temps de ce retour sur le quotidien se révèle donc efficace. Et qui sait, permettre d’inciter à renoncer à la publication minute par minute de ses rencontres, de ses achats, des photos du plat qu’on vient de commander ou de réaliser qui forment l’essentiel des échanges en ligne, sans le moindre intérêt pour la postérité !
 
Une petite réflexion supplémentaire pourrait même surgir dans les têtes des enseignants : demander à leurs élèves de faire un résumé écrit, rédigé à la main, de leurs cours le soir les aiderait certainement mieux à retenir de nouvelles connaissances que le simple fait de les lire sur écran… Cela va à rebours des consignes des pédagogistes qui recommandent le tout informatique. Encore un moyen de détruire la culture qui, sans mémoire, ne saurait exister.
 

Anne Dolhein