Ioann Kuntsevytch naquit vers 1580 dans une famille noble désargentée à Volodimir, en Volhynie, dans le grand-duché de Lituanie (ouest de l’Ukraine actuelle), dans une province acquise à l’Eglise orthodoxe ruthène. En 1595, une partie de l’Eglise ruthène se rattacha à Rome par l’union de Brest (une ville biélorusse). Vers l’âge de 20 ans, il entra au monastère de la Sainte-Trinité à Vilnius où il prit le nom de Josaphat et, après avoir été ordonné prêtre, fut nommé quelques années plus tard higoumène (abbé).
Josaphat restait cependant un pasteur particulièrement aimé, notamment pour sa charité envers les pauvres et les prisonniers. Un témoignage rapportait : « Chaque fois qu’il quittait l’église, tous se pressaient aux portes, cherchant du réconfort dans ses paroles. » Particulièrement vertueux et grand théologien, ardent défenseur du rattachement à Rome, il fut nommé archevêque de Polotsk (nord de la Biélorussie) en 1617.
La grande majorité des chrétiens de son diocèse étaient demeurés orthodoxes ; il mit donc toute son énergie à les rallier à Rome, sans modifier fondamentalement leur liturgie. Ce fut l’établissement de l’Eglise grecque-catholique ukrainienne. Il prit possession de nombreuses églises orthodoxes pour les rendre au culte catholique, en prêchant l’unité avec une grande douceur, malgré des épisodes de répression ferme. La politique d’union ne manqua pas de faire des mécontents, qui tentèrent de se révolter, sans succès, en 1622.
Le 12 novembre 1623, alors que Josaphat était en visite pastorale à Vitebsk, à une centaine de kilomètres à l’est de Polotsk, une nouvelle révolte éclata, fondée sur des calomnies. L’archevêque fut assassiné à coups de bâton et de hache par la foule en colère ; son corps fut jeté dans la rivière Dvina. Après plusieurs miracles réalisés par son intercession, l’exhumation de son corps en 1628 révéla son incorruptibilité. Béatifié par Urbain VIII le 16 mai 1643, il fut canonisé par Pie IX le 29 juin 1867.
A l’occasion du tricentenaire de son martyre, le 12 novembre 1923, Pie XI publia l’encyclique Ecclesiam Dei, affirmant la primauté romaine et prêchant l’unité aux chrétiens orientaux : « Le sang de saint Josaphat est donc, comme il y a trois siècles, aussi et surtout aujourd’hui un gage de paix et un sceau d’unité : surtout maintenant, après que ces malheureuses provinces slaves, dévastées par des troubles et des émeutes, ont été ensanglantées par des guerres furieuses et impitoyables. Et il nous semble entendre la voix de ce sang, “qui parle mieux que celui d’Abel”, et voir ce martyr se tourner vers ses frères slaves, répétant, comme autrefois, les paroles de Jésus : “Les brebis reposent sans berger. J’ai de la compassion pour cette multitude.” Et vraiment, comme leur condition est misérable ! Quelle terrible angoisse ! Combien d’exilés de leur patrie ! Que de massacres de corps et que de ruine d’âmes ! Constatant les calamités actuelles des Slaves, certainement bien plus graves que celles que notre Saint a dû déplorer, nous pouvons difficilement, en raison de notre affection paternelle, retenir nos larmes. (…) En considérant tant de maux, la commémoration solennelle de l’illustre Pasteur des Slaves Nous réconforte grandement, car elle Nous offre une occasion favorable d’exprimer les sentiments paternels qui Nous animent à l’égard de tous les Slaves orientaux et de placer devant eux, comme la synthèse de tous les biens, le retour à l’unité œcuménique de la sainte Eglise. (…) Mais puisque cet accord de tous les peuples dans l’unité œcuménique est avant tout l’œuvre de Dieu et doit donc être obtenu avec l’aide et l’assistance divines, nous recourons en toute diligence à la prière, suivant en cela les enseignements et les exemples de saint Josaphat, qui, dans son apostolat pour l’unité, s’appuyait avant tout sur la puissance de la prière. »