Accords Israël-Hamas : qui a gagné, Biden ou Trump ?

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Qui faut-il créditer du cessez-le-feu sur lequel viennent de se mettre d’accord Israël et le Hamas ? A quelques jours de son départ de la Maison Blanche, Joe Biden a quitté mercredi une conférence de presse où une journaliste lui demandait à qui l’on devait cet accord de paix, à lui ou à Trump, en lançant : « C’est une blague ? » Et de tourner les talons. Il venait de chanter longuement les louanges du secrétaire d’Etat Anthony Blinken, du conseiller national à la sécurité Jake Sullivan, et de la candidate battue à l’élection présidentielle, Kamala Harris, qui ont présidé aux 15 mois d’impasse sur le sujet, pendant que la barbarie des deux camps continuait de se déployer.

Biden avait tout de même lâché : « Je voudrais aussi noter que cet accord a été développé et négocié sous mon administration, mais il sera mis en œuvre en grande partie par la prochaine administration. Ces derniers jours, nous avons parlé comme une seule équipe. » Trump raccrochant ses wagons, en quelque sorte.

Mais en Israël, ce n’est pas la même chanson. Pour Haaretz, c’est bien « l’envoyé au Proche-Orient de Donald Trump qui a contraint Netanyahu à accepter un plan pour Gaza qu’il avait refusé à de multiples reprises » – ledit envoyé, Steve Witkoff, homme du secteur privé et investisseur immobilier, a pu mener les négociations depuis la semaine dernière. Avec l’accord de l’administration Biden… Et ce au motif que les obligations qui pourraient naître pour les Etats-Unis de l’accord incomberaient au président entrant.

 

Les accords de cessez-le-feu sous les auspices de Trump

D’où la porte ouverte à ce porte-parole juif, proche de Trump et très peu versé dans les arcanes de la diplomatie. « C’est un homme d’affaires qui veut vite arriver à un deal et qui avance de manière singulièrement agressive », déclarait ainsi un haut fonctionnaire israélien au quotidien, sous condition d’anonymat.

Il est difficile, vu le calendier, vu le rôle joué par Witkoff, de ne pas y voir le poids de Trump – au grand dam des plus bellicistes en Israël. S’il est vrai que le plan de paix est le même que celui soumis en mai par Biden, le fait qu’il ait été enfin accepté seulement une fois que Trump a été élu ne peut être une pure coïncidence.

« Ce cessez-le-feu épique ne peut qu’être un résultat de notre Victoire Historique en novembre, puisque celle-ci annonçait au Monde entier que mon Administration rechercherait la Paix et négocierait des accords pour assurer la sécurité de tous les Américains et leurs Alliés » : les majuscules sont de Trump dans son message sur Truth Social et soulignent le côté fanfaron du président élu… Mais le fait est que même des Démocrates expriment leur reconnaissance à Trump.

Ainsi le porte-parole du Département d’Etat, Matthew Miller, a déclaré que « le rôle joué par l’équipe du président élu Trump a été absolument crucial pour faire accepter ce deal ». Il a souligné que les Etats-Unis, l’Egypte et le Qatar en sont les garants, les deux derniers encourageant le Hamas à demeurer à la table des négociations et les Etats-Unis poussant Israël à faire de même. Commentant la présence de Witkoff lors des discussions, il a ajouté : « Evidemment, nous remercions l’équipe Trump d’avoir travaillé avec nous à cet accord de cessez-le-feu. Nous jugeons important le fait qu’elle ait été présente aux pourparlers. »

 

Les accords entre Israël et le Hamas encouragent Trump à continuer

De son côté, Donald Trump a annoncé qu’une fois à la Maison Blanche, il entend étendre les accords Abraham signés lors de sa première présidence entre Israël et les Emirats et Israël et Bahreïn (déjà prolongés par des accords avec le Soudan et le Maroc et ayant pour effet d’accentuer la division entre les pays sunnites et l’Iran chiite). Tout en empêchant la bande de Gaza de devenir un « sanctuaire pour terroristes ».

Trump avait préparé le terrain du cessez-le-feu en promettant que cela « chaufferait dur » (« all hell to pay ») au Proche-Orient s’il n’y avait pas d’accord sur la libération d’otages par le Hamas avant son entrée en fonctions.

L’accord de cessez-le-feu prévoit dans un premier temps le retour des otages israéliens femmes, enfants et hommes de plus de 50 ans sur une période de six semaines ; puis, dans une seconde phase, le retour des hommes israéliens plus jeunes et des soldats de l’Etat hébreu retenus par le Hamas, tandis qu’Israël rendra quelque 1.000 prisonniers palestiniens et commencera à rappeler ses troupes de Gaza et autorisera les résidents d’y retourner. La troisième phase verra le Hamas rendre à Israël les dépouilles des otages qui sont morts.

De quoi Netanyahu et le Hamas ont-ils été menacés, au juste, par l’équipe Trump, notamment pour que le premier accepte de prendre le risque de se voir lâché par certains de ses alliés ? Ce devait être du lourd. Ce que Trump appelle la « Paix par la Force » !

 

Anne Dolhein