Bloomberg siffle la fin de « l’âge d’or » de la main-d’œuvre immigrée

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C’est la fin de l’âge d’or. Le média pro-immigration Bloomberg vient de consacrer un article à la fin de l’immigration de masse qu’il croit avoir constatée : il s’agit d’un véritable « changement de paradigme », selon le journaliste Adrian Wooldridge dans un article publié dimanche, changement imputable à la politique de fermeté de Donald Trump qui a pour ainsi dire fermé les robinets aux frontières mexicaines. Bloomberg y évoque en particulier les Etats-Unis où le gouverneur du Texas vient de signaler qu’il ne souhaite pas poursuivre la construction du mur pour se protéger de l’immigration clandestine depuis les terres de son voisin méridional : la nouvelle attitude des gardes-frontière et la réalité des arrestations et des poursuites ont suffi à le rendre largement superflu.

Pour un grand nombre d’Américains, c’est une excellente nouvelle. Mais pas pour Bloomberg, très gros media mainstream : les employeurs se voient privés d’une source de travailleurs bon marché qui leur a offert ce fameux « âge d’or » évoqué en titre.

 

Bloomberg annonce la fin de l’abondance de la population immigrée

« Les entreprises vont devoir s’ajuster à un monde où les immigrés sont beaucoup plus rares et les emplois plus difficiles à pourvoir », ajoute le sous-titre. Le chroniqueur observe qu’il ne sert à rien d’attendre un changement d’ère alors que des gouvernements de droite comme de gauche finissent par se rendre compte des problèmes culturels qui vont de pair avec une immigration massive et sans grand lien avec le pays d’arrivée.

Les populations autochtones la rejettent de plus en plus nettement, souligne Wooldridge : il prévoit que même la pénurie de soignants qui se profile dans les pays vieillissants ne leur feront pas changer d’avis, puisque la question n’est pas « économique », mais « culturelle » selon lui.

« Il est difficile d’accepter la vieille promesse selon laquelle la diversité est toujours une force lorsqu’on est confronté avec des scandales d’exploitation sexuelle dans les villes nordiques de la Grande-Bretagne à forte présence immigrée ou la guerre des gangs dans les banlieues suédoises », écrit-il.

Manière de reconnaître, de manière très parcellaire, que l’immigration a d’autres effets que de pourvoir des emplois…

D’entrée de jeu, il avait posé :

« D’aussi loin que nous nous souvenons, les entreprises ont toujours pu compter sur une main-d’œuvre étrangère facilement disponible. Les géants de la Silicon Valley, les agriculteurs et les entreprises de la filière alimentaire, les hôtels et les restaurants, les constructeurs immobiliers et les grandes surfaces : tous ont résolu la question de la pénurie de main-d’œuvre en recrutant des immigrants. Il en résulte une transformation démographique étonnante : 16 % de la population britannique, 20 % de la population suédoise, 19 % de la population allemande et 14,3 % de la population américaine sont nés à l’étranger.

« Cet âge d’or pour les employeurs touche à sa fin. Le mécontentement populaire face à l’immigration massive s’accroît, les partis anti-immigration prospèrent et les partis traditionnels en prennent enfin conscience. »

Aux Etats-Unis, le flux d’immigrés est passé de 4 millions de personnes en 2023 à 600.000 cette année en taux annualisé. Royaume-Uni et la Nouvelle-Zélande connaissent des baisses importantes. Et dans la plupart des pays, le taux de natalité est passé largement en dessous du minimum nécessaire au maintien de la population.

 

L’âge or de l’immigration ne l’était pas pour tous

L’article de Bloomberg reconnaît ce que l’on savait en réalité déjà, mais qu’il était de bon ton d’ignorer : l’offre locale de bras s’est dégradée parce que les employeurs comme les responsables politiques ont préféré la « solution facile » : importer des migrants. Le journaliste pointe également la panne de l’ascenseur social dans ces pays occidentaux, notamment en ce qui concerne les formations d’élite, mais aussi les déficiences de l’apprentissage qui a été largement laissé en friche dans de nombreux pays.

En résumé, il propose d’aller chercher des talents là où ils sont, en favorisant les bourses universitaires, en aidant les jeunes à mieux connaître les carrières qui s’offrent à eux, en multipliant les programmes d’apprentissage. Pour séduire les employés plus âgés, il propose de mettre en place des heures de travail flexibles ou des congés plus longs.

Il ne mentionne pas la chute du niveau scolaire que l’on retrouve dans de nombreux pays développés, ni une « culture du travail » dégradée, déplorée par de nombreux petits employeurs qui se heurtent en même temps aux manques d’élémentaires connaissances linguistiques et mathématiques et à la volatilité de certains jeunes qu’ils embauchent… Mais c’est une autre histoire.

 

Bloomberg voit arriver un nouvel âge d’or, celui des robots et de l’IA

Bloomberg ne serait pas Bloomberg s’il n’était pas aussi et peut-être d’abord question de l’IA et des robots. Pour conclure sa chronique, le journaliste observe que les entreprises doivent se concentrer sur les techniques de rationalisation du travail, notamment dans les secteurs où l’on emploie de nombreux immigrés comme « la construction, l’agriculture et l’hôtellerie-restauration » ; l’agriculture pourrait faire appel à des « machines “intelligentes” fonctionnant à l’IA » qui peuvent désormais « cultiver les graines et désherber », contrairement aux machines « stupides » dont on disposait jusqu’à présent. La plonge et le ménage dans l’industrie de l’hospitalité pourraient eux-mêmes être confiés à des robots de plus en plus précautionneux…

Du tri des élèves les plus doués, sponsorisés par de grosses entreprises comme Amazon ou Palantir, au recrutement de prisonniers, Bloomberg voit bien des possibilités – et met en avant la société japonaise Eat & Holdings qui vient d’embaucher un robot comme chef de cuisine dans l’un de ses restaurants. « De telles manières de penser vont devoir se répandre et accélérer à travers l’ensemble de l’économie », affirme Wooldridge.

Pour lui, les entreprises vont même pouvoir y gagner en automatisant des tâches répétitives jusqu’ici confiés à des immigrés, le tout en renforçant la productivité.

A lire ces lignes, on comprend mieux la raison pour laquelle nombre de pays développés acceptent désormais l’idée de limiter ou d’inverser les flux migratoires. Un nouveau remplacement remplace bel et bien le « grand remplacement » : quand l’homme lui-même devient superflu ou substituable on peut bien se permettre d’afficher un changement de politique pour amadouer le peuple. Ça l’occupe…

 

Anne Dolhein