Marie, Pierre, s’en vont, Mohamed arrive : invasion ou apostasie ?

Pierre Mohamed invasion apostasie
 

Les deux, mon général, bien sûr. L’INSEE vient de publier, comme chaque année, son classement des prénoms les plus courants en France. Dans l’ensemble, des prénoms traditionnels comme Louise ou Louis gardent encore la corde, mais les prénoms exotiques gagnent, et dans certains départements, la Seine-Saint-Denis (on n’y trouve plus un prénom français dans les dix premiers), le Val-de-Marne, le Val-d’Oise, les Bouches-du-Rhône, etc., ils arrivent en tête, avec Mohamed par exemple. En général, les prénoms anciens résistent mieux dans les campagnes et les nouveaux prénoms préfèrent les banlieues des grandes villes. Sur toute la France, en 2024, dans les cent premiers, on trouve une dizaine de ces prénoms venus (récemment) d’ailleurs chez les filles, chez les garçons une quinzaine. Dans le détail, des prénoms typiquement chrétiens, tels Pierre et Marie, disparaissent à peu près, alors que les prénoms de fantaisie foisonnent (Ambre, Jade, Eden). Comme si les habitants de la France, ressentant une invasion soudaine, choisissaient l’apostasie pour oublier l’origine ethnique et religieuse du pays. Le grand remplacement des prénoms sanctionne la victoire de la nouvelle France de Mélenchon.

 

Ni Pierre ni presque Marie, Mohamed, Fatoumata et Owen

530 petites Marie sont recensées en 2024 à l’Etat-civil, ce qui ne veut pas dire qu’elles ont été toutes baptisées. Cela met le prénom à la 96° place, quatre rangs devant Aïcha, très loin derrière Inaya, Nour, Alya, Louna, Assia, Jannah, et même Fatoumata et Fatima. Quant à Pierre, il n’entre pas dans le « top cent », pas plus que Jean ni Charles. Jésus apparaît à la 78° place, mais sous la forme d’Issa, tout juste devant Ali, 80°, loin derrière Mohamed, Ibrahim et Imran. Cela dit, tout aussi frappante que la disparition des grands prénoms chrétiens (32.000 Marie étaient baptisées voilà cent ans, dans une France qui comptait près de trente millions d’habitants de moins, contre 530 aujourd’hui), et que le flot des prénoms musulmans, paraît celui qui vient d’ailleurs : (Mia, Charlie, Lya, Nora, Leya, etc., pour les filles, Liam, Ethan, Aaron, Ayden, Elio, Tom, Nino, Ezio, Kaïs, Timéo, Rayan, Sohan, Charlie, Tiago, Nolan, Owen, Soan, Mathéo, Kayden, Anas, Evan, Livio, Lenny, Adem, Loan, Milan etc.) empruntés tant à l’Italie qu’aux prénoms bibliques ou fantaisie utilisés par le monde anglo-saxon. Cet attrait de l’étranger se lit dans le choix de la finale a pour près de la moitié des prénoms féminins du top cent : elle ne vient pas du latin mais d’un fantasme d’Italie ou d’Amérique « internationale ».

 

L’apostasie a précédé l’invasion, qui a précipité un mouvement lent

Le fait est relativement récent, comme si l’apostasie, quoi qu’antérieure à l’invasion (l’assèchement des vocations et la baisse de la pratique dès les années soixante-dix le montrent), ait un temps de retard du point de vue de la religion sociale que marque le prénom. Dans la décennie 80-90, les filles ne portent que des prénoms du calendrier, il n’y a encore que peu de finales en a et de fantaisies anglo-saxonnes (Sabrina, Vanessa, Jessica, Audrey, Cindy, Sandra, Deborah, Cynthia, Nelly), et pas un prénom musulman ni Africain. Même chez les garçons, cela reste encore à peu près stable, malgré Anthony, Jonathan, Jeremy, Kevin, Mickael, Gregory, Geoffrey, William, Morgan et Teddy. Mais on voit apparaître des Mohamed, des Karim et des Mehdi. Le politologue et géographe Jérôme Fourquet, de l’IFOP, perçoit ce lent mouvement, dans son livre L’archipel français comme « le symptôme d’une prise de distance progressive avec le catholicisme ». En français : une lente apostasie.

 

Mohamed, Owen, Tiago, Lya, c’est la créolisation de Mélenchon

A l’ultragauche, Jean-Luc Mélenchon se réjouit bruyamment de cette apostasie-archipellisation qu’il nomme pour sa part créolisation, pour exprimer son côté ethnique et linguistique, mais il n’est pas le seul. L’ensemble de la gauche fait de même, tacitement ou explicitement, comme Vincent Peillon lorsqu’il était ministre de l’Education nationale. Cela ne fait que continuer la tradition anticatholique de la troisième République lancée par les francs-maçons. Ce qu’on nomme souvent « conquêtes laïques » fut une guerre civile préparée de longue main par les républicains maçons contre la majorité catholique des Français. Dès 1869, avant la chute du Second Empire, Louis Andrieux réclamait au congrès des Libres Penseurs « l’anéantissement du catholicisme par tous les moyens ». On se souvient du slogan du grand chef républicain Gambetta : « Le cléricalisme, voilà l’ennemi ! » Il l’avait chipé à son ami Aulard (« le catholicisme, voilà l’ennemi »). Pour que les choses soient bien claires, ce dernier avait précisé « toute distinction entre cléricalisme et religion est une tromperie ». Pour qu’elles le soient encore plus, le frère Galand déclarait en plein Convent de 1894 : « La maçonnerie est la République à couvert, comme la République est la maçonnerie à découvert. »

 

La guerre civile républicaine a produit apostasie et invasion

Les déclarations des uns et des autres lui donnèrent raison. Paul Bert lâchait : « Le prêtre n’est pas un citoyen » ; Clemenceau : « L’école neutre, c’est l’école nulle » ; Jules Ferry : « Le catholicisme et la République française sont philosophiquement incompatibles l’un à l’autre », et il préconisait une « société sans Dieu et sans roi ». Un autre président du Conseil, Jules Méline : « J’ai chassé plus de congrégations qu’aucun de mes collègue » ; un troisième, Viviani, entendait « éteindre des étoiles dans le ciel » chrétien. Jaurès exigeait que l’Eglise « paie le salaire de ses crimes » et le rapporteur de la loi de 1901 sur la laïcité expliquait uniment qu’elle « donnait toute liberté aux associations (…) et aucune aux congrégations ». Tous voulaient effacer « le passé condamné par les doctrines et les mœurs de la démocratie ».

 

Dans la catastrophe, les maçons divisés ne savent plus à quel Saint se vouer

Ce court florilège est représentatif sans être exhaustif. Ce laïcisme anticatholicisme rabique et général a gagné, il a fini par « extirper le fétichisme » catholique, selon son vocabulaire, mais se trouve aujourd’hui divisé devant l’islam : certains, fanatiques de la laïcité, s’inquiètent de la croissance politique et sociale du Croissant, d’autres, fanatiques de l’anticatholicisme l’approuvent, voyant en elle le moyen d’éliminer une Eglise résiduelle. Face à cela, le peuple français, accablé par l’invasion et l’apostasie, gît, à peu près atone.

 

Pauline Mille