Un blog de National Public Radio, la radio publique nationale des Etats-Unis, a publié un commentaire en défense de la stérilisation après la mort de 13 femmes en Inde des suites d’une campagne d’opérations à la chaîne. Histoire de dissiper un peu cet « éclairage négatif », l’auteur de l’article, Eleanor Klibanoff, préconise la stérilisation féminine en tant que forme la « plus populaire », la plus répandue de contraception – alors que la contraception est supposée réversible, ce que la stérilisation, en règle générale, n’est pas.
Les morts de Chhattisgarh ne doivent pas faire oublier, écrit-elle, que la stérilisation féminine concernait 223 millions de femmes dans le monde en 2012 : selon un document de l’organisme d’aide au développement américain USAID, cela équivaut à 19 % des femmes en âge de procréer et vivant dans le cadre d’une union maritale. A moins de 4 dollars américains par opération, frais médicaux et de personnel inclus, dans les pays pauvres, c’est une méthode « longue durée » aussi bon marché qu’elle est efficace, assure ce document publié en 2014. Il se félicite de la mise en œuvre croissante des Objectifs du Millénaire de l’ONU et signale qu’aujourd’hui la demande en vue de « limiter les naissances » excède la demande visant à les « espacer » seulement, dans toutes les régions du monde sauf en Afrique centrale et occidentale. La propagande fonctionne bien.
La stérilisation féminine dix fois plus répandue que la masculine
Le nombre des femmes stérilisées dans le monde est dix fois plus important que celui des hommes, souligne Eleanor Klibanoff – et ce malgré les risques bien moindres liés à la vasectomie, qui est en outre une opération bien plus simple. Le directeur du Population Council de New York, John Townsend, l’a signalé à la journaliste : « J’ai eu une vasectomie au Mexique, j’ai passé plus de temps à attendre l’ascenseur qu’à subir l’opération. » Pour les femmes, les « complications » sont de l’ordre de 1 % tout de même – cela n’a pas l’air d’inquiéter outre mesure.
La sémantique, comme toujours, est importante. Au lieu de parler de stérilisation, on préfère le terme de « contraception permanente », en insistant sur la facilité d’une procédure qu’une femme peut obtenir dès qu’elle a les « deux ou trois enfants » qu’elle désire. Plutôt que d’avoir recours à des méthodes hormonales de courte ou de longue durée, même celles de 25 ans, voire moins, peuvent se faire stériliser définitivement, sans se soucier du coût, des déplacements, des ruptures de stock et autres inconvénients des contraceptifs proprement dits, explique Townsend, qui assure : « Dans la plupart des pays, les femmes ont un ou deux enfants de plus qu’elles ne l’auraient voulu. »
Une affirmation « de choc » que nulle étude sérieuse n’étaye. En France, pour ne prendre que cet exemple, les femmes voudraient en moyenne un enfant de plus que ceux qu’elles ont déjà… Et y renoncent à cause des difficultés économiques, de logement, de travail.
Une contraception permanente sans inconvénients ?
Il n’y aurait en définitive qu’un problème par rapport à la stérilisation : le fait que dans certains cas elle soit pratiquée dans des conditions insalubres, ou à la suite un consentement mal éclairé par faute d’un excès de documents incompréhensibles.
Pour le reste, c’est clair : les organisations internationales et les gouvernements de nombreux pays soutiennent la stérilisation de la population féminine. Comme le dit John Townsend, les femmes obtiennent grâce à elle la vie qu’elles désirent : « Elles peuvent entreprendre d’autres choses en confiance, sûres qu’elles ne tomberont pas enceintes. Elles peuvent accepter un travail (…). Elles ont un sentiment d’autonomie, sous moins sujettes à la violence de genre et de manière générale, elles ont une vie plus pleine et plus riche. »
A ce compte-là, on s’étonne que les hommes ne se bousculent pas aux portillons pour se faire stériliser, eux aussi ! Cela viendra peut-être.