De nouvelles recherches publiées par The Guardian ont confirmé que la chute et le massacre de Srebrenica, dont on commémore le vingtième anniversaire cette année, n’a pas une attaque surprise qui aurait pris de court les forces des gouvernements occidentaux comme ils l’ont toujours affirmé. Selon ces révélations, le Royaume-Uni, la France et les Etats-Unis avaient décidé de sacrifier l’enclave pour obtenir la paix : même s’ils ne pouvaient en prévoir l’ampleur, ils étaient au courant du massacre en temps réel, selon des documents récemment obtenus par la presse.
En juillet 1995, des escadrons de Bosniaques serbes entraient dans la ville de Srebrenica, qui était l’une des six zones « sécurisées » mises sous la protection des Nations Unies, et massacraient 8.000 Bosniaques musulmans, hommes et garçons. L’attaque a duré quatre jours. Jusqu’à une date récente, on a accusé les forces de l’ONU de n’avoir pas repoussé les Serbes, ainsi que les soldats néerlandais qui avaient refusé d’abriter des civils dans leur camp pendant l’attaque.
Plusieurs documents secrets révèlent une responsabilité des gouvernements occidentaux à Srebrenica
L’analyse de plusieurs documents secrets récemment déclassifiés sur le massacre de Srebrenica montre que les gouvernements britannique, américain et français étaient en train de négocier pour céder la ville aux Serbes au moment des massacres. Ils cherchaient alors à obtenir la paix à n’importe quel prix. Ces télégrammes déclassifiés montrent que les massacres étaient connus des forces occidentales quasiment depuis le moment où ils ont commencé ; la CIA a pu les regarder pour ainsi dire « en direct » depuis un poste satellite basé à Vienne, alors que des avions espions suivaient les événements. Un responsable du Département d’Etat assure que tous les partenaires des Etats-Unis ont été aussitôt informés.
Les Occidentaux au courant des intentions serbes
Il paraît démontré que les Occidentaux connaissaient les intentions de Ratko Mladic, qui était alors le commandant en chef de l’armée de la République serbe de Bosnie. Ce dernier avait exprimé le désir de voir « totalement disparaître » la population bosniaque musulmane.
Plusieurs sources affirmaient depuis longtemps que les Occidentaux ont décidé de sacrifier la ville de Srebrenica en toute connaissance de cause. C’est le cas de l’envoyé américain de l’époque en Bosnie, Richard Holbrooke, qui affirmait dans une interview accordée à la télévision bosniaque en 2005 : « J’avais reçu des ordres initiaux en vue de sacrifier Srebrenica, Goražde et Žepa. »
Les documents montrent par ailleurs qu’une forte pression était exercée sur le président bosniaque Alija Izetbegovic pour qu’il cède Srebrenica ainsi que les autres zones sécurisées par les Nations Unies. En avril 1995, la présidence avait convoqué 15 commandants militaires de l’enclave de la ville de Tulza en leur interdisant de retourner dans les zones de sécurité placées sous la protection de la communauté internationale, sous le prétexte que leur défense incombait à l’ONU.
Les Serbes ont perpétré le massacre de Srebrenica sous le regard de l’Occident
C’est dans l’une de ces enclaves que 8.000 personnes ont été massacrées sans intervention de ces mêmes forces de sécurité internationales.
De leur côté, les Serbes ont demandé à la Russie, par la voix de leur président Milorad Dodik, d’utiliser son veto pour empêcher l’adoption d’une résolution de l’ONU préparée par le Royaume-Uni sur le massacre de Srebrenica.
Le Royaume-Uni prépare en effet un projet de résolution à l’occasion du vingtième anniversaire du drame, et se penche sur l’incapacité de l’ONU à éviter cette tuerie. Cette résolution entend « rendre hommage aux victimes du génocide et aux personnes de tous bords qui ont souffert durant cette guerre ».
La justice internationale a en effet qualifié le massacre de génocide, ce que contestent les dirigeants des Serbes de Bosnie. « Tout est fait pour promouvoir une non-vérité, à savoir qu’il y a eu là-bas un génocide, tout en ignorant les victimes serbes », a déclaré Milorad Dodik, précisant que 3.500 Serbes avaient été tués dans la région de Srebrenica durant le conflit.
Il a toutefois précisé qu’il accepterait cette résolution si Srebrenica était considéré comme un lieu de génocide pour les musulmans comme pour les Serbes.