Transhumanisme : son avènement est facilité par la science-fiction et les jeux vidéo

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La revue Usine Digitale profite de la trêve estivale pour se pencher sur le phénomène du transhumanisme dont l’avènement s’annonce à travers les progrès de la technique et de l’informatique. Elle consacre une série à la question de savoir si le transhumanisme peut être considéré comme un « humanisme », expliquant notamment comment la science-fiction, le droit, et les jeux vidéos rendent l’idée de « l’homme augmenté » de plus en plus acceptable aux jeunes générations, notamment.
 

L’avènement du transhumanisme facilité par des conférences

 
Milad Douehi, historien des religions et titulaire de la chaire d’humanisme numérique – oui, ça existe ! – à l’université Paris-Sorbonne, s’intéresse au transhumanisme en tant qu’« ensemble des technologies et sciences qui peuvent modifier d’une façon ou d’une autre le corps et l’esprit humains ». Pour lui, ainsi qu’il l’a expliqué lors d’une conférence dans le cadre de « Futur en Seine » en juin dernier, l’angoisse face à l’annonce d’une modification profonde de l’homme est propre au vieux continent. Les pays anglo-saxons, Royaume-Uni en tête, y voient plutôt un enjeu pratique, voire juridique : s’accorder sur le « statut émergent des êtres culturels, qui ne sont pas exclusivement de l’ordre du vivant conventionnel, de l’humain ou de l’animal ».
 

Transhumanisme : l’homme augmenté préparé par la science-fiction aura des droits

 
Cela vous donne-t-il la chair de poule ? Rassurez-vous : vous n’êtes pas pour autant un hybride d’homme et d’oiseau, mais demain, on en verra peut-être voler dans les airs… Et ils auront des droits, des « drois non humains » en quelque sorte, qui ont déjà leurs militants comme le Non Human Rights Project qui travaillent déjà sur les droits des plantes et des animaux.
 
Après l’abolition des frontières entre l’homme et la femme à travers l’idéologie du genre, voici la prochaine étape de la lutte (révolutionnaire) contre la discrimination qui s’installe déjà : il s’agit de gommer la spécificité de la nature humaine. Solve et coagula, dit la maçonnerie, qui veut tout dissoudre et agglomérer dans le grand Tout…
 
Douehi explique que la science-fiction, essentiellement anglo-saxonne, a habitué les esprits à l’émergence d’hommes augmentés. Cela commence, paraît-il, avec la possibilité de porter sa montre sur soi : à gousset ou à poignet, elle équipe l’homme et se décline aujourd’hui en objet connecté.
 
Change-t-elle pour autant la nature de l’homme ? Certes non : elle ne fait que lui apporter des informations sans le modifier de l’intérieur. Mais si l’on comprend bien le chercheur, elle prépare le terrain pour rendre acceptable l’idée de modifications plus profondes.
 

Les jeux vidéo habituent les jeunes au transhumanisme en leur permettant de s’augmenter via leurs avatars

 
Usine Digitale s’est aussi penchée sur les annonces d’un chercheur en sciences de la communication et de l’information, Etienne-Armand Amato, conseiller technique à l’IHEST (Institut des Hautes Etudes pour la science et la technologie). Il a participé aux conférences « Futur en Seine » en simulant un « téléchargement » dans un robot humanoïde flottant dans l’espace.
 
Si l’opération était évidemment virtuelle elle n’en est pas moins riche d’enseignement, car en imaginant évoluer dans un monde imaginaire, virtuel, inaccessible, l’homme accepte déjà de bénéficier de super-pouvoirs. Le jour où de vrais robots évolueront dans notre monde, en somme, nous serons prêts à nous y projeter…
 
C’est ce qui permet à Amato d’expliquer que les jeux vidéo préparent parfaitement le terrain au transhumanisme, qu’il décrit ainsi : « Notre condition humaine est de finitude. Le transhumanisme, c’est l’idée que l’humanité est transitoire ». On va vers un homme nouveau qui n’en sera plus un, véritablement, mais un mélange d’humanité et de technique bien plus durable que nos pauvres carcasses corporelles. Pourquoi pas immortel ?
 
Amato en dessine en tout cas l’avènement en expliquant combien les habitués des jeux vidéos, à la 3D et toutes les autres techniques qui créent l’illusion de la réalité seront prédisposés à accepter les avantages (mais sont-ce des avantages ?) du transhumanisme. S’identifiant au héros de leur jeu, ils sont déjà à même dans leur monde virtuel de s’acheter un nouveau bras, un nouvel œil, un nouveau rein… une nouvelle vie. Il y aurait même selon Amato – l’auteur de l’article d’Usine Digitale paraît s’en étonner, « toute une économie du téléchargement d’âmes ».
 
Qu’est-ce qui les empêchera d’accepter de telles augmentations ou réparations à l’avenir, habitués qu’ils y sont ?
 
On peut même y voir un avènement de la « métempsychose », dit-il : l’« avatar » auquel s’identifie le joueur d’aujourd’hui ne désigne-t-il pas en sanskrit les incarnations du dieu hindou Vishnou ?
 

Anne Dolhein