Face à la division que son évolution politique a provoquée au sein de son parti et de sa majorité, le premier ministre grec Alexis Tsipras a remis jeudi soir sa démission, sept mois après sa prestation de serment, ouvrant ainsi la voie à des élections législatives anticipées. Ce faisant, le chef du gouvernement grec joue quitte ou double ; car, soit les nouvelles élections lui rendront une majorité remodelée sur les relations telles qu’elles ont été reconstruites avec Bruxelles ; soit le peuple grec manifestera une nouvelle fois son opposition à la politique européiste, et Alexis Tsipras sera bien contraint d’en tirer les conséquences.
En attendant, Alexis Tsipras joue à fond la carte du peuple, espérant bien sortir renforcé de ce nouveau scrutin : « Le mandat que j’ai reçu le 25 janvier a atteint ses limites et le peuple grec a désormais son mot à dire », a-t-il affirmé. Et, en pratique, a-t-il expliqué au président Prokopis Pavlopoulos, « le Parlement actuel ne permet pas de dégager un gouvernement majoritaire, ni un gouvernement d’union nationale ».
La démission du premier ministre grec
En effet, le Parlement qui, face à la nécessité économique, a accepté de voter le plan d’aide, n’a pas accepté cependant de soutenir un programme gouvernemental si visiblement opposé aux promesses faites il y a six mois.
S’exprimant à la télévision, Alexis Tsipras a joué la double carte de l’honnêteté et de la responsabilité, et son intervention peut se résumer à ces deux points :
« Je vais être honnête avec vous : nous n’avons pas obtenu l’accord que nous voulions avant les élections de janvier. »
« Je ressens profondément la responsabilité morale et politique de remettre à votre jugement tout ce que j’ai fait, mes réussites comme mes échecs. »
Le quitte ou double d’Alexis Tsipras
Le quitte ou double d’Alexis Tsipras est cependant risqué. D’abord, parce que le peuple ne se laissera pas nécessairement prendre à ces humbles accents. Nombre de Grecs ont trop le sentiment d’avoir été floués par Alexis Tsipras pour lui faire encore totalement crédit. Surtout que, dans l’esprit de beaucoup, le referendum du printemps exprimait un désaveu de l’Union européenne et non un blanc-seing pour négocier avec elle.
En outre, le président ne peut fixer un nouveau scrutin sans consulter auparavant les dirigeants des autres partis pour voir s’ils sont en mesure de former un gouvernement. De fait, vendredi, Prokopis Pavlopoulos a donné un mandat de trois jours au chef de file de l’opposition conservatrice grecque, Vangelis Meimarakis, dirigeant du parti Nouvelle démocratie, pour tenter de constituer un gouvernement de coalition, et ce afin d’éviter à son pays les effets négatifs d’élections législatives anticipées. S’il y parvenait, ce serait la fin du coup de poker, et surtout des espoirs d’Alexis Tsipras.
Autres tentatives de solutions de la crise grecque
Cela dit, les principaux analystes estimaient vendredi, du fait notamment du très court mandat confié par le président à Vangelis Meimarakis, que le chef de l’Etat avait plus obéi à une obligation constitutionnelle qu’au réalisme d’une perspective que l’état actuel du Parlement condamne quasiment à coup sûr à l’échec.
Enfin, et malgré la popularité affirmée, affichée peut-être, du chef du gouvernement démissionnaire, la profonde division de son parti pourrait lui jouer des tours. Déjà, la faction la plus à gauche a annoncé faire sécession pour fonder un nouveau parti indépendant. Vingt-cinq parlementaires se sont ainsi regroupés autour de l’ancien ministre de l’Energie Panagiotis Lafazanis pour créer un nouveau mouvement qu’ils ont nommé Unité populaire.
Bref, les semaines à venir pourraient bien n’être pas aussi roses que l’espérait Alexis Tsipras…