Il y a exactement une semaine, un décret publié au Journal Officiel annonçait la finalisation de la vente de droits d’exploitation pour les 14 aéroports régionaux grecs au consortium allemand Fraport-Slentel. Des points juridiques et techniques sont encore à régler, mais l’accord sera définitif « au cours des semaines à venir ». Des privatisations, il y en avait déjà eu, comme celle du site de l’ancien aéroport d’Athènes, Hellenikon, ou celle de la société de jeux, l’OPAP, cédée à un consortium gréco-tchèque. Mais celle-ci est la première effective du gouvernement Tsipras qui y était formellement, apriori, opposé, et – paradoxalement ? – la plus importante depuis 2010 et le début de la crise en Grèce… L’Allemagne ne sera pas le seul vautour.
Des aéroports prometteurs pour quelques dizaines de millions d’euros l’unité…
Sont concernés des aéroports très touristiques tels que ceux des îles de Mykonos, Rhodes, Santorin, Corfou, Kos, Skiathos, Samos, Zakynthos, Cephalonie… Mais aussi des aéroports de Thessalonique, Kavala, Mytilène, Aktio et Chania en Crète.
Le tandem germano-grec devrait investir environ 330 millions d’euros sur quatre ans dans la modernisation de ces aéroports, dans le cadre d’une concession de 40 ans, en plus d’un loyer de 22,9 millions d’euros payés à l’État grec chaque année.
Syriza n’a pas sauvé la Grèce
Certes, l’appel d’offres remonte au gouvernement précédent. Il avait d’ailleurs été gelé sitôt l’élection en janvier dernier du premier ministre Alexis Tsipras, fermement opposé à ce gigantesque programme de privatisation forcé. Aujourd’hui, il se retrouve pourtant approuvé, mis en œuvre par ce même gouvernement de coalition de gauche radicale qui n’a pas su résister à l’imposition du troisième plan d’aide à la Grèce, approuvé par le Parlement le 15 août dernier.
Syriza avait tant bien que mal promis de réexaminer les termes de l’appel d’offres. Mais l’accord final ne comporte décidément aucune modification significative… Depuis début juillet et l’acceptation par Tsipras des propositions de l’Eurogroup, on parle de « capitulation », de « trahison ». Ce décret du 18 août en a été la preuve pour beaucoup : victime de son oui à l’Euro en dépit de la réponse populaire qu’il avait lui-même sollicité, le premier ministre grec a d’ailleurs annoncé sa démission deux jours plus tard…
Privatisations : l’Allemagne à l’affût ? Parmi d’autres…
« Les privatisations bénéficieront à l’économie grecque et au peuple », ont assuré les ministres et le principal parti d’opposition Nouvelle Démocratie (ND). Création d’emplois, vivier de développement…
Elles entrent surtout dans le grand projet européen et par-delà mondial d’asservissement des États par leur économie. Selon le protocole établi avec ses créanciers internationaux, c’est à toute une série de privatisations que la Grèce va devoir procéder : ses aéroports régionaux, mais aussi ses ports, l’opérateur de son réseau électrique, sa compagnie de chemin de fer, son gestionnaire du réseau ferré… Son objectif imposé est d’engranger 50 milliards d’euros – 25 milliards pour restructurer les banques, 25 autres au service de la dette et aux investissements. C’est la contrepartie des 86 milliards d’euros de sauvetage décidés et nouvellement promis cet été.
La grande vente – grande braderie ? – d’actifs publics grecs devrait se poursuivre jusqu’en 2025. Et il n’y aura pas que l’Allemagne à se mettre sur les rangs.
L’Eurogroupe a évité tout « Grexit » pour garder la main sur le pays et la renforce même via ces accords successifs. Le grignotage méthodique qui commence n’est que la suite logique d’une politique d’endettement progressif : la Grèce entrée, à force de promesses et de mirages, dans la zone euro, n’a plus qu’à tendre ses poignets. La politique d’austérité est la politique des puissants – des riches.