Tapi dans l’ombre depuis sa tentative, il y a six ans, de prendre la tête du parti libéral en Australie, Malcolm Turnbull a récolté les fruits d’une campagne discrète parmi électeurs et élus pour obtenir un vote favorable, lundi soir, de 54 voix contre 44 face au Premier ministre Tony Abbott, dont il défiait le titre tel un « challenger » dans un ring de boxe. En l’occurrence, Abbott a un passé de boxer, tandis que Turnbull, l’une des 200 plus grosses fortunes dans son pays, est avocat, hommes d’affaires, ancien banquier. Chez Goldman Sachs, pour être précis. C’est peu de dire qu’il est plus conforme au profil mondialiste que son prédécesseur à la tête de l’immense île continentale.
Il n’aura guère fallu attendre pour que le nouveau leader du parti de centre droit – un leader qui se trouve afficher des convictions beaucoup moins conservatrices que la plupart des membres du parti libéral – prête serment en tant que nouveau Premier ministre par le Gouverneur-général qui représente la Couronne britannique.
Tony Abbott, un Premier ministre de l’Australie controversé – dans les milieux mondialistes
Ironie des choses : Malcolm Turnbull est un républicain qui verrait bien l’Australie rompre ses liens avec le Commonwealth de sa gracieuse Majesté…
Le système politique australien, tout comme le système britannique, accorde aux partis la faculté de nommer le chef de l’exécutif. Pour prendre le pouvoir il suffit d’obtenir l’adhésion des caciques du parti, chose assurément plus facile que de gagner une élection populaire, et qui permet un meilleur contrôle.
Ambition personnelle dévorante ou manipulation ? La montée de Malcolm Turnbull tient certainement de la première mais elle n’a pas été entravée, c’est le moins que l’on puisse dire, par des choix politiques non-conformistes. S’appuyant sur la perte de popularité de Tony Abbott (affirmée par les médias), Turnbull s’est présenté comme le sauveur du parti libéral à l’approche des élections australiennes de 2016 qu’Abbott, selon cette approche, eût été incapable de remporter.
En attendant, ce sont diverses lignes politiques propres au catholique Abbott qui devraient changer, même si Turnbull affiche une patience qui ne lui est pas connaturelle : il s’agit de ne pas brusquer les choses.
Malcolm Turnbull, acquis à l’idéologie mondialiste du climat
La première, la plus spectaculaire et celle qui explique l’enthousiasme d’autres chefs d’Etat devant la chute de Tony Abbott, c’est son attitude à l’égard de la lutte contre les « changements climatiques ». Malcolm Turnbull a souvent raillé les positions climatosceptiques propres à son prédécesseur et son arrivée a provoqué la satisfaction de l’administration Obama, qui verrait bien l’Australie prendre avec la Chine et les Etats-Unis la tête de la grande marche vers la réduction des émissions carbone. Pour la COP21 de Paris, la donne est changée avec la disparition des sphères du pouvoir d’un chef d’Etat d’un pays grand comme un continent…
Tony Abbott a résisté sans états d’âme aux tentatives législatives de reconnaître le « mariage » des couples de même sexe. Malcolm Turnbull, au contraire, et tout comme le chef de l’opposition australienne, y est résolument et ouvertement favorable. Il a déclaré qu’il ne modifierait pas l’approche mise en place par son prédécesseur qui a refusé de concéder aux parlementaires de son parti un vote libre dans le cadre législatif ordinaire, préférant la solution du référendum. Turnbull a déclaré qu’il le maintiendrait. La pression monte déjà en sens contraire.
Pour ce qui est de l’immigration, on connaît la fermeté de la politique mise en place par Tony Abbott qui a interdit le territoire australien aux clandestins. Quelle sera la politique de Turnbull ? Cela reste à voir, mais il est clair qu’il est bien plus consensuel sur le plan global et que « l’accueil des migrants » fait partie des passages obligés aujourd’hui.
Quant à son attitude face à l’islam, on sait seulement que des représentants musulmans d’Australie l’ont déjà appelé à mettre fin à la politique du « blâme permanent » dont ils accusaient Tony Abbott : ils cherchent à le rencontrer et font état du « soulagement » exprimé par de nombreux coreligionnaires.