Le parti islamo-conservateur du président Recep Tayyip Erdogan a remporté avec 49,2 % des suffrages (sur la quasi-totalité des bulletins dépouillés) les élections législatives de dimanche en Turquie. L’AKP, Parti de la Justice et du Développement, obtient ainsi 316 des 550 sièges au Parlement, recouvrant ainsi, contre toutes les prévisions et analyses, la majorité absolue qu’il avait perdue il y a cinq mois.
Victoire de l’AKP et d’Erdogan
Même si une légère variation des chiffres est encore possible à l’annonce définitive des résultats, le président Erdogan n’en est pas moins assuré de sortir de l’imbroglio politique dans lequel il se trouvait enfermé depuis le mois de juin, et qui l’empêchait, en pratique, de gouverner tout à fait à sa guise. Rien ne devrait donc plus l’empêcher désormais d’instaurer, par le biais d’une révision constitutionnelle, la « super-présidence » qu’il rêve de mettre en place depuis des années, et qui, à 61 ans, pourrait lui assurer une domination sans partage sur la Turquie pour un certain temps.
Le parti AKP remporte les élections et la majorité au Parlement turc
« Aujourd’hui est un jour de victoire ! », s’est réjoui le premier ministre sortant et chef de l’AKP, Ahmet Davutoglu. « Aujourd’hui, il n’y a pas de perdants, mais que des gagnants », a-t-il ajouté, en une sorte de main tendue à ses rivaux malheureux.
En pratique, le président Erdogan a effectivement tout à gagner à se montrer généreux. Dans le meilleur des cas, il s’ouvre un boulevard politique sans contestation aucune ; dans le pire, il fait porter à ses adversaires d’hier la responsabilité d’une désunion… tout en conservant un pouvoir absolu.
Derrière l’AKP, et toujours selon ces résultats partiels mais quasi définitifs, le Parti républicain du peuple (CHP, social-démocrate) arrive en deuxième place avec 24,5 % des voix, et le Parti de l’action nationaliste (MHP, droite) obtient près de 12 %. Un score en net recul par rapport au scrutin du mois de juin.
Le recul est plus fort encore pour le Parti démocratique des peuples (HDP, pro-kurde), qui, avec un score de 10,4 % au niveau national, passe de justesse le seuil nécessaire pour être représenté sur les bancs de l’assemblée, où il ne devrait conserver que 59 des 80 sièges obtenus la dernière fois.
La victoire absolue du président Erdogan
Mais la victoire du président Erdogan doit également s’entendre sur l’échiquier international. Et il n’a pas manqué, à ce sujet, de donner, lundi matin, une leçon de démocratie aux critiques qui, un peu partout, ont fleuri contre lui. Sortant d’une mosquée d’Istanbul où il était aller prier après l’annonce des résultats, le président a appelé le monde entier à respecter l’issue du scrutin : « Est-ce là votre conception de la démocratie ? » a-t-il lancé. « Aujourd’hui, un parti a obtenu le pouvoir en Turquie avec environ 50 % des voix. (…) Cela mérite d’être respecté par le monde entier, mais je n’ai pas observé une telle maturité. »
L’Union européenne a bien compris le message qui, immédiatement, s’est engagée à travailler avec le futur gouvernement turc. « Les élections de dimanche en Turquie, qui ont été marquées par un taux de participation élevé, ont réaffirmé l’engagement fort du peuple turc pour les processus démocratiques », affirme pompeusement le communiqué de Bruxelles.
Elargissons, élargissons vers la Turquie…
Celui-ci porte les signatures de Federica Mogherini et de Johannes Hahn. La première est logique, puisqu’il s’agit de la signature de la responsable de la diplomatie européenne. La seconde est révélatrice puisqu’elle celle du commissaire à l’Elargissement…
L’optique est d’ailleurs assez clairement réaffirmé dans la suite du texte : « L’Union européenne va travailler avec le futur gouvernement afin d’améliorer le partenariat avec la Turquie et de continuer à faire progresser notre coopération dans tous les domaines pour le bénéfice de tous les citoyens. »
La suite devrait être prometteuse, puisque, ainsi, on nous promet, encore et toujours, des lendemains qui chantent…